PODCAST Taxer les rachats d'actions : beaucoup de bruit pour pas grand chose

HISTOIRES ECONOMIQUES. Le patronat est sur les charbons ardents depuis que Gabriel Attal a affirmé vouloir taxer les rachats par les entreprises de leurs actions en bourse. Pas de panique, l'an dernier, Emmanuel Macron les avait lui aussi fustigé et il ne s'est rien passé. Écoutez chaque mardi 6h48 la chronique "Histoires Economiques" de Philippe Mabille dans le 5/7 de France Inter présenté par Mathilde Munos.
Philippe Mabille
(Crédits : KAI PFAFFENBACH)


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En ces temps de disette budgétaire, une idée revient sur le tapis : taxer les rachats par les entreprises de leurs propres actions. De quoi s'agit-il exactement ?

Depuis quelques années, les grandes entreprises ont pris l'habitude de racheter sur le marché boursier une partie de leurs propres titres, afin de récompenser leurs actionnaires. Elles utilisent une partie de leurs profits pour annuler du capital ce qui mécaniquement a un effet positif sur le cours de l'action.

Les entreprises font cela dans des proportions croissantes depuis quelques années.

En 2023, les sociétés du CAC 40 ont racheté pour 30 milliards d'euros de leurs propres actions, après 23 milliards en 2022.

C'est beaucoup ?

C'est beaucoup et en devenant plus visible, cela donne des idées au fisc. A la différence des dividendes, qui rapportent à l'Etat la « flat tax » de 30%, les rachats d'actions ne supportent aucun impôt.

De là à dire que certaines entreprises en abusent, il n'y a qu'un pas que n'a pas hésité à franchir Gabriel Attal. Vendredi dernier, dans un entretien au Monde, le Premier ministre a donc dit vouloir les taxer, accusant les entreprises de faire ces rachats au détriment de l'investissement ou de leurs salariés, ce qui est un raccourci un peu injuste.

Mais Gabriel Attal ne fait que s'inspirer d'Emmanuel Macron qui au printemps de l'an dernier avait déjà dénoncé le « cynisme » des grandes entreprises qui procèdent ainsi et appelé à créer une « contribution exceptionnelle ».`

Et alors, que s'est-il passé ?

C'est là l'amusant de l'histoire, rien. Nada. Oh si, quelques fausses tentatives avec des amendements proposant de taxer à 1% voire 10% ces opérations. Mais au final, face au lobbying intense du patronat, Bruno Le Maire a jeté l'éponge et seulement pris une mesure obligeant les entreprises qui pratiquent ces rachats d'actions à mieux partager leurs bénéfices avec leurs salariés.

Et donc, cette fois, c'est du sérieux ?

Cette fois, c'est différent parce que le gouvernement affronte une impasse budgétaire insurmontable

Il ne veut pas augmenter les impôts, mais il se dit prêt à taxer les « rentes ». Une mission parlementaire a été créée à cet effet et cible les rachats d'actions comme l'ennemi à abattre. Il faut dire que même aux Etats-Unis, le royaume du capitalisme, ces opérations sont mal vues. Joe Biden propose de multiplier par 4 la taxe de 1% qu'il a institué pour lutter contre cette pratique.

Les entreprises françaises savent qu'elles risquent bien cette fois de passer à la caisse car politiquement, au moment où le gouvernement veut réduire les droits des chômeurs, il va falloir un scalp pour rééquilibrer le message adressé à l'opinion.

Cela ne rapportera pas grand chose, mais c'est une affaire plus politique qu'économique. Emmanuel Macron l'a dit hier à propos des économies sur les dépenses publiques : il ne faut pas que ce soit « la foire à la saucisse ». En matière fiscale, en tout cas, face à des déficits insurmontables, c'est déjà la foire aux idées et cela ne fait probablement que commencer.

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Philippe Mabille
Commentaire 1
à écrit le 11/04/2024 à 11:11
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Beaucoup de bruit de façon générale venant du complexe politico-médiatico-affairiste pour pas grande chose en ce moment c'est certain. Nos dirigeants trop faibles s'agitent. Ils sont repus de faire mentir leur bouche alors ils essayent de faire menti...

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