Gabriel Attal : « J'appelle au sursaut »

ENTRETIEN EXCLUSIF - Le chef du gouvernement annonce à La Tribune Dimanche que la durée d’indemnisation des chômeurs passera de dix-huit à quinze mois à compter du 1er décembre. À deux semaines des européennes, il monte au front contre Jordan Bardella et Raphaël Glucksmann.
Gabriel Attal ce samedi à Matignon.
Gabriel Attal ce samedi à Matignon. (Crédits : © LTD / ELIOT BLONDET/ABACA POUR LA TRIBUNE DIMANCHE)

Jeudi, il a débattu face à Jordan Bardella sur France 2. Le lendemain, il a présenté les premières mesures du gouvernement pour lutter contre la violence des mineurs. Aujourd'hui, dans La Tribune Dimanche, il dévoile en exclusivité les mesures de la réforme - explosive - de l'assurance chômage... À quinze jours d'élections européennes qui pourraient être très douloureuses pour son camp, Gabriel Attal est sur tous les fronts. « J'appelle au sursaut », lance le Premier ministre dans l'interview qu'il a accordée à notre journal, samedi matin, dans le jardin de Matignon.

Assurance chômage

LA TRIBUNE DIMANCHE - Vous vous êtes engagé à durcir les modalités d'accès à l'assurance chômage. Qu'avez-vous décidé ?

GABRIEL ATTAL - Je suis attaché à notre système d'assurance chômage, pilier d'un modèle social que nous voulons préserver. Le cœur du financement de ce modèle social, c'est le travail. Notre action est d'aller vers le plein-emploi. Nos réformes ont permis de créer 2,5 millions d'emplois, notre taux de chômage est au plus bas depuis quarante ans... Nous avons montré que nous n'étions pas condamnés au chômage de masse. Mais si nous ne réformons pas l'assurance chômage aujourd'hui, nous risquons de caler sur la route du plein-emploi. Cette réforme, c'est donc le carburant qui nous permettra de créer toujours plus de travail dans notre pays. C'est aussi un renouvellement de notre pacte social : oui, la solidarité aide ceux qui en ont besoin en cas de coup dur. De plus, le financement de notre protection sociale ne doit pas uniquement reposer sur l'effort de classes moyennes. Les Français nous demandent de valoriser encore plus le travail : c'est ce que nous faisons. Très concrètement, nous allons changer les conditions pour avoir droit au chômage. Jusqu'ici, il fallait avoir travaillé six mois sur les vingt-quatre derniers mois pour percevoir une indemnisation. À l'avenir, il faudra avoir travaillé huit mois sur les vingt derniers. Nous prolongeons la réforme engagée en 2019, dont les études montrent qu'elle produit ses effets. Par ailleurs, nous conservons un régime plus généreux que nos voisins, en nous rapprochant du système allemand, où il faut avoir travaillé douze mois sur trente. Au Portugal et au Royaume-Uni, c'est douze mois sur vingt-quatre, et seize mois sur trente-trois en Belgique.

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Une récente étude de l'Unedic montre que réduire la durée affiliation va affecter en priorité les plus jeunes et les CDD... donc les plus précaires.

La plus grande arme contre la précarité, c'est le travail. Or, une étude de la Dares montre que renforcer les conditions d'affiliation a un impact sur le retour à l'emploi. Nous l'avons fait dans la réforme de 2019. Nous étions passés de quatre mois sur vingt-huit à six mois sur vingt-quatre : cela a marché et accéléré le retour à l'emploi. Par ailleurs, cette réforme est prise dans un contexte où il y a des créations d'emplois - près de 50 000 encore au premier trimestre - et où beaucoup d'entreprises ne parviennent pas à recruter.

Mais ces changements vont de facto réduire la durée d'indemnisation...

Oui, comme nous réduisons la période de référence d'affiliation, il y aura un impact sur la durée d'indemnisation. J'assume de dire que, dans les conditions actuelles, cette durée d'indemnisation passera donc de dix- huit mois à quinze mois. Dans le même temps, nous renforçons massivement l'accompagnement avec France Travail.

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Les partenaires sociaux vous accusent de démagogie...

Nous leur avons laissé huit mois pour négocier sur l'emploi des seniors. Ils ne sont pas parvenus à un accord. La ministre du Travail, Catherine Vautrin, les a rencontrés la semaine dernière pour échanger sur les paramètres. C'est en responsabilité que nous prenons ces décisions. Cette réforme de l'assurance chômage entrera en vigueur à l'automne. J'ai parlé d'« automne du travail ». Nous allons prendre un décret, le 1er juillet, pour qu'elle puisse entrer en vigueur le 1er décembre.

Cette réforme, c'est donc le carburant qui nous permettra de créer toujours plus de travail dans notre pays

Et concernant les seniors ?

Le taux d'emploi des seniors continue de progresser grâce aux réformes que nous avons engagées. Des propositions de suppression de la filière seniors ont été faites par certains. Mais je refuse que cette filière seniors soit supprimée, car il est important de maintenir une protection et des règles spécifiques. Dans la discussion des partenaires sociaux, un consensus semblait s'être établi autour de l'application mécanique de la réforme des retraites, ce qui signifie le relèvement de deux ans, de 55 à 57 ans, de la filière. Je reprends cette mesure dans notre réforme. Mais ce n'est pas tout. À partir d'un certain âge, quand on perd son emploi, on est souvent condamné au chômage. Je veux débloquer les recrutements pour les seniors en créant un bonus emploi senior pour mieux accompagner la reprise d'emploi : un senior au chômage qui reprendra un emploi moins bien rémunéré que son emploi précédent pourra cumuler son nouveau salaire avec son allocation chômage pour atteindre le même salaire qu'il avait avant de tomber au chômage. Par exemple, prenons un demandeur de 57 ans qui était payé 3 000 euros brut et qui est indemnisé 1600 euros mensuels par France Travail. Demain, si on lui propose un emploi à 2 000 euros brut - donc 1 000 euros de moins que son ancienne rémunération -, il pourra cumuler ce nouvel emploi à 2 000 euros avec 1 000 euros versés par l'Assurance chômage. Et il retrouvera ainsi sa rémunération initiale pendant un an.

N'est-ce pas inciter les patrons à payer moins les seniors ?

Non, c'est pour cela qu'il y a un plafonnement. L'idée est de permettre de montrer aux entreprises qu'elles ont tout intérêt à recruter des seniors. Mais j'estime que nous pouvons aller plus loin pour l'emploi des seniors. C'est pourquoi je souhaite que de nouvelles mesures soient prises dans l'acte 2 de la réforme du travail. Je pense par exemple à la création de l'« index seniors », prévu par la réforme des retraites et censuré par le Conseil constitutionnel. Je souhaite aussi que la proposition des partenaires sociaux de créer un CDI senior soit étudiée. Catherine Vautrin lancera des négociations après l'été pour un texte de loi d'ici à la fin de l'année.

Attal

Gabriel Attal hier à Matignon. (© LTD / ELIOT BLONDET/ABACA POUR LA TRIBUNE DIMANCHE)

Quels sont vos objectifs d'un point de vue budgétaire ?

Ce n'est pas une réforme d'économie, mais de prospérité et d'activité. Preuve en est : la précédente réforme, en 2019, nous l'avions faite quand le déficit était à 3%. Le gain se mesurera par un nombre plus important de Français qui travailleront. Et donc plus de financements pour notre système.

Allez-vous généraliser le bonus-malus ?

Tout le monde doit partager l'effort. Il faut continuer à lutter contre la précarité des contrats courts et améliorer la qualité de l'emploi. Je suis attaché au bonus-malus, mis en place en 2021, et dont les études montrent qu'il responsabilise les entreprises. Ce système permet de baisser les cotisations des entreprises qui signent des contrats de plus longue durée. Aujourd'hui, 7 secteurs sont concernés et je souhaite examiner l'opportunité de l'étendre en fonction de l'évaluation à conduire. Comment ? Je charge Catherine Vautrin de mener une concertation pour identifier les secteurs qui auront vocation à entrer dans ce système et à quel rythme.

Je veux débloquer les recrutements pour les seniors, en créant un bonus emploi senior

Le chômage remonte légèrement. Conservez-vous le principe de contracyclicité ?

Quand l'économie va mieux, les règles doivent inciter davantage à la reprise d'emploi. Au contraire, quand le contexte est moins favorable, il faut accompagner sur une plus longue durée les demandeurs d'emploi. Pour préparer le rebond économique de 2025 que nous annoncent les prévisionnistes, je souhaite que les règles soient encore plus incitatives quand la croissance repartira davantage et que le taux de chômage diminuera. C'est pourquoi nous ajouterons un nouveau seuil à 6,5% de taux de chômage. Cela nous permettra d'aller vers le chemin du plein-emploi. À chaque fois que l'on a eu des réformes autour du travail depuis 2017, elles ont rencontré des oppositions : assurance chômage, ordonnances travail, apprentissage, formation professionnelle... mais elles ont porté leurs fruits. Il n'y a pas de fatalité au chômage dans notre pays.

Fin de vie

Le projet de loi sur la fin de vie arrive en discussion demain à l'Assemblée. Les députés de la commission spéciale ont modifié la définition de la maladie mortelle. Vous refusez cette réécriture. Pourquoi ?

Il n'y a pas de sujet plus sensible et plus intime. Les Français attendent une évolution depuis des années. Ce texte est un progrès majeur, je le présente comme tel, et je suis très à l'aise avec sa version initiale. Les conditions sont strictement encadrées : être majeur, français, en capacité d'exprimer son choix avec discernement jusqu'à la dernière étape, être atteint d'une maladie grave et incurable avec un pronostic vital engagé à court ou à moyen terme et des souffrances physiques ou psychologies réfractaires aux traitements. La commission spéciale a modifié la notion de pronostic vital engagé à court ou moyen terme. Or, en évoquant selon ses termes uniquement une « phase avancée ou terminale de la maladie », cela peut conduire à inclure de nombreuses pathologies non mortelles qui sortent de la philosophie du texte. Le gouvernement proposera donc d'y revenir.

Cela veut dire que votre version du texte est intouchable ?

Une loi intouchable, ça n'existe pas. C'est le Parlement qui vote la loi. La responsabilité du gouvernement, c'est de chercher à garantir l'équilibre issu des longs mois de concertation et des travaux de la convention citoyenne.

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Le sujet divise dans chaque camp, le débat traverse tous les partis. Avec quelle majorité ce texte serait-il adopté ?

Ce sujet fait appel à la conscience de chacun et je crois que tous les groupes parlementaires ont prévu la liberté de vote. La majorité présidentielle est très largement rassemblée derrière l'équilibre proposé par le gouvernement.

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À la gauche de Gabriel Attal, son directeur de cabinet, Emmanuel Moulin. (© LTD / ELIOT BLONDET/ABACA POUR LA TRIBUNE DIMANCHE)

C'est un combat entre les modernes progressistes et les conservateurs religieux ?

Je ne caricature pas et je n'instrumentalise pas ce débat. Il est ici question de la conscience philosophique ou spirituelle de chacun, de ses expériences personnelles, je ne stigmatiserai jamais qui ce que soit pour ses positions.

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De nombreux soignants refusent que les médecins administrent une substance létale. Pourraient-ils être totalement tenus à l'écart du processus ?

 Les médecins et personnels soignants sont au cœur du sujet et nous continuerons de construire la loi avec eux. Il est prévu dans le texte du gouvernement que le malade s'administre lui-même le produit létal et que, s'il n'est pas en capacité de le faire, un tiers puisse le faire. Je rappelle qu'il y a aussi dans ce texte une clause de conscience qui protège les médecins.

Dans combien de temps un patient en fin de vie pourra-t-il faire valoir ce nouveau droit ?

Nous avons donné du temps à la discussion, la procédure d'urgence n'a pas été retenue. Il y aura plusieurs passages à l'Assemblée et au Sénat. Dans l'année qui vient, ce texte continuera à mûrir et être précisé par les débats. Il s'appliquera dans la foulée.

Le régalien

En Nouvelle-Calédonie, les premiers appels au calme exprimés par les forces indépendantistes vous semblent-ils à la hauteur de ce qu'a demandé Emmanuel Macron lors de son déplacement sur place jeudi ?

La situation s'améliore progressivement, mais elle reste tendue et un rien peut encore la faire vaciller. Je rappelle qu'il y a eu 400 interpellations d'émeutiers depuis le début de la crise, des dizaines et des dizaines de barrages levés. On a aujourd'hui 3400 policiers et gendarmes qui sont engagés et je veux leur rendre hommage. Certains l'ont payé de leur vie. J'ai eu l'occasion ce vendredi de présider l'hommage national qui a été rendu au major Salou et au maréchal des logis-chef Molinari, qui ont perdu la vie lors de ces émeutes. Aujourd'hui, il reste encore des violences qui sont d'une gravité inacceptable, des barrages, des pillages. Dès le début de cette crise, l'ensemble des forces politiques locales a appelé au calme et à la fin des violences. À l'occasion du déplacement du président de la République, elles ont eu l'occasion, y compris les indépendantistes, de réaffirmer cet appel. Il faut maintenant que celui-ci soit entendu et suivi d'effet. Il ne peut pas y avoir de dialogue serein au milieu des violences. La mission annoncée par le président de la République va permettre d'établir des contacts avec chacune des forces politiques, ainsi qu'entre elles. Je crois profondément qu'une solution politique globale est possible. Je n'étais pas né au moment des premiers accords de Matignon en 1988, mais j'ai appris l'histoire de notre pays et je sais que la Nouvelle-Calédonie a toujours trouvé des forces extraordinaires en elle pour avancer et se construire.

Sur la question du dégel du corps électoral, le chef de l'État a affirmé qu'il ne passerait pas en force. Cela signifie-t-il que le Congrès sera reporté ?

Le président de la République a clairement dit qu'il ne convoquerait pas immédiatement le Congrès. À Nouméa, il a affirmé vouloir donner toutes ses chances au dialogue. Une mission travaille. Un point d'étape sera fait dans un mois sur les avancées du dialogue avec les forces politiques locales. Il nous permettra de prendre une décision.

Attal

Gabriel Attal hier à Matignon. (© LTD / ELIOT BLONDET/ABACA POUR LA TRIBUNE DIMANCHE)

La date de fin juin reste donc sur la table ?

Je n'ai rien à ajouter à ce qu'a dit le président de la République. Il m'a semblé très clair. Nous ferons un point dans un mois pour mesurer l'avancée des discussions et leur impact sur le calendrier.

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Le dossier néo-calédonien va-t-il revenir à Matignon, comme c'était la tradition ?

J'ai vu que ce débat animait beaucoup de commentateurs et même d'acteurs chargés précédemment du dossier. Moi, je suis Premier ministre, donc je considère que mon rôle est d'intervenir sur les dossiers interministériels qui concernent l'ensemble des politiques gouvernementales. La Nouvelle-Calédonie en fait évidemment par essence partie, a fortiori dans un moment de crise comme aujourd'hui. Depuis que celle-ci a commencé, j'ai déjà présidé cinq cellules interministérielles de crise et réuni l'ensemble des forces parlementaires et les présidents de l'Assemblée et du Sénat pour échanger sur ce dossier. Je prendrai toute ma part dans le processus qui s'ouvre.

Et quand vous rendrez-vous sur place ?

On verra en fonction de l'utilité. Un déplacement là-bas de ma part, après celui du président de la République, doit permettre la progression du dialogue et l'atteinte d'un accord global. Le président de la République a eu l'occasion de nous le dire en Conseil des ministres : il souhaite que le Premier ministre s'implique en première ligne dans ce processus de dialogue.

Mon déplacement à Nouméa doit permettre la progression du dialogue et l'atteinte d'un accord global

Cette semaine, les révélations du Parisien et de BFMTV sur les conditions de détention très lâches de Mohamed Amra ont choqué les Français. Quelles conséquences allez-vous en tirer ?

J'ai lu comme vous ces révélations sur la poursuite par Mohamed Amra depuis sa cellule de diverses activités criminelles. Vous savez qu'il y a un principe de séparation des pouvoirs et que seul le parquet peut communiquer sur un dossier en cours. Des investigations se poursuivent sous la direction de trois juges d'instruction. Il faut les laisser travailler sereinement et faire la lumière sur la totalité de cette affaire. Je vais être très clair. D'abord, la République sera implacable et tous les moyens sont déployés pour que ces assassins soient traqués, retrouvés et jugés. L'enquête progresse, même si je ne peux pas en dire davantage. La violence inouïe de ces crimes ne fait que renforcer notre volonté d'adopter des mesures radicales contre le crime organisé. Beaucoup de professionnels des forces de l'ordre nous disent assister parfois à la bascule de délinquants de droit commun dans une très grande violence, voire dans des organisations criminelles très organisées. Cette évolution de la criminologie doit nous conduire à adapter notre réponse et nos procédures. Le garde des Sceaux a déjà fait un certain nombre d'annonces. À la suite du drame d'Incarville et des négociations avec les syndicats pénitentiaires, il fera des propositions complémentaires prochainement.

Vendredi à Valence, vous avez annoncé vouloir mettre en place des séjours
très courts en foyer pour les mineurs délinquants. Que répondez-vous aux syndicats de la magistrature qui critiquent cela vertement, expliquant notamment que les places manquent ?

Ce n'est pas vrai. Nous disposons aujourd'hui d'un certain nombre d'infrastructures et de foyers dans lesquels il y a un taux de vacance important. Cette mesure qui permet d'avoir des courts moments d'éloignement dès les premiers faits de délinquance m'intéresse beaucoup car il faut qu'on arrive à construire un système où on a des sanctions immédiates, légères mais immédiates, plutôt que d'attendre que les faits s'aggravent. Cela me semble plus efficace en termes éducatifs. Aujourd'hui, on assiste en effet à un rajeunissement de la violence. Les 13-17 ans représentent un Français sur 20, mais chez les auteurs de coups et blessures, c'est un sur dix. Chez les trafiquants de drogue, c'est un sur cinq. Chez les auteurs de vol avec arme, c'est un sur trois. Cela donne une idée de la surreprésentation des mineurs dans des actes de délinquance parfois très graves. Face à cette évolution, pour les actes les plus graves, j'ai annoncé à Valence ce vendredi que nous mettrons en place une forme de comparution immédiate pour les mineurs. Aujourd'hui, si vous avez deux mis en cause pour violence aggravée, un de 18 ans, un autre de 17 ans, le premier sera sanctionné tout de suite et le second ne le sera qu'au bout de huit, voire neuf mois. On va mettre un terme à cela. Nous devons nous donner les moyens de mieux prendre en charge les mineurs délinquants. Dès le premier acte, dès l'école primaire, nous allons nous doter d'une échelle des sanctions beaucoup plus claire et ferme pour répondre aux problèmes de comportement. Enfin, j'ai décidé de mettre en place des mesures pour davantage responsabiliser les parents, y compris par des sanctions, et mieux accompagner ceux qui sont en demande de l'être, notamment les familles monoparentales.

Européennes

Comment avez-vous trouvé Jordan Bardella lors de votre débat jeudi sur France 2 ?

Je crois que les masques sont tombés. J'ai vu Jordan Bardella contraint d'admettre que sa proposition de priorité nationale dans le marché unique serait un carnage économique et social pour les Français. On a 150 000 entreprises exportatrices et on a la chance, parce qu'on a les meilleures entreprises avec les meilleurs salariés et entrepreneurs, d'avoir des milliers d'entre elles qui décrochent des contrats publics dans d'autres pays européens. L'application de sa proposition les priverait d'un marché de 450 millions de consommateurs. J'ai vu Jordan Bardella reconnaître qu'il ne lisait pas les textes de loi avant de s'y opposer. C'est quand même ahurissant d'entendre un responsable politique national, chef du premier parti d'opposition, député sortant du Parlement européen, vice-président de son groupe, l'affirmer dans le plus grand des calmes et avec la plus grande assurance. J'ai vu Jordan Bardella échouer à nous expliquer son concept de double frontière, sans qu'on sache toujours à la fin si son projet c'est la transformation de toutes nos frontières terrestres en péage de Saint-Arnoult un week-end de chassé-croisé, en obligeant tous les 400 000 Français qui travaillent dans des pays frontaliers à passer des heures à attendre pour montrer patte blanche ou alors si son projet c'est simplement ce que l'on fait déjà aujourd'hui, c'est-à-dire des contrôles aléatoires. Au vu de la gravité du moment que traverse l'Europe aujourd'hui, les Français ont besoin de sérieux et de crédibilité. Nos retraités seraient la première victime d'une instabilité financière liée à une crise européenne. Les Français de classe moyenne verraient leurs emplois disparaître si on sortait du marché unique.

Le RN vomit tellement l'Europe qu'il ne se préoccupe pas des intérêts de la France

Vous avez vu chez lui de la légèreté, de l'amateurisme...

Je pense plutôt que cela a été la démonstration de la détestation du Rassemblement national pour l'Europe. Ils la vomissent tellement, l'Europe, qu'ils ne se préoccupent pas des conséquences de leurs propositions sur le pouvoir d'achat des Français ou les intérêts de la France.

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Et pourtant, le Rassemblement national est à la veille d'un succès triomphal, si on en croit les sondages...

D'abord, le principe d'une élection, c'est qu'elle se joue dans les urnes, le jour du vote, même si manifestement Jordan Bardella, depuis maintenant plusieurs mois, dans une forme d'ivresse de lui-même, nous annonce déjà quel sera son discours une fois qu'il aura gagné. Je trouve ça très méprisant pour les Français, qui sont les premiers à décider du résultat de l'élection. Partout en Europe, l'extrême droite a progressé. C'est un fait. Ça doit nous pousser d'abord à nous interroger sur l'efficacité de nos politiques. C'est pourquoi pour moi le pacte asile et migration, qui vient d'être adopté, est une avancée majeure, parce que enfin il va faire sortir l'Europe de sa naïveté en la matière en se donnant les moyens de maîtriser effectivement les flux migratoires. Ça doit ensuite ne pas nous inciter à sous-estimer l'enjeu du 9 juin. Ces élections européennes sont les plus décisives depuis qu'elles existent. Alors que la guerre est en Europe, que les puissances américaine et chinoise se réaffirment, que nous avons des défis majeurs à relever comme le dérèglement climatique ou l'intelligence artificielle, l'extrême droite peut être en capacité d'obtenir une minorité de blocage au Parlement européen et donc empêcher tout notre continent d'avancer. Face à cela, j'appelle au sursaut, j'appelle au réveil de tous ceux qui croient que c'est l'union qui fait la force. Car je le dis : si vous ne votez pas le 9 juin, vous prenez le risque d'un effacement de l'Europe et d'un affaiblissement de la France. L'Union européenne, c'est ce qui nous a permis de vivre en paix depuis quatre-vingts ans sur notre continent. C'est ce qui garantit la prospérité de notre économie. Je veux convaincre les Français, y compris ceux qui ont pu douter en raison de telle ou telle réforme, de telle ou telle mesure portée par la majorité au niveau national, que la liste la plus à même de nous défendre dans un tel moment de gravité, c'est celle de Valérie Hayer.

Attal

Gabriel Attal hier à Matignon. (© LTD / ELIOT BLONDET/ABACA POUR LA TRIBUNE DIMANCHE)

Dans un coup de gueule remarqué, François-Xavier Bellamy a estimé que votre débat face à Jordan Bardella était une mise en scène que « rien ne justifiait démocratiquement ». Que lui répondez-vous ?

Ceux qui aiment l'Europe et la démocratie devraient plutôt se réjouir qu'une grande chaîne nationale consacre une soirée aux élections européennes. Par ailleurs, ce n'est pas moi qui fais la programmation des débats. Je suis le chef de la majorité : c'est légitime que je débatte avec le président du premier parti d'opposition. Je pense que la colère de François-Xavier Bellamy est surtout motivée par l'absence de dynamique de sa liste, dont on ne peut qu'être frappé par le manque de clarté. C'est une liste qui n'est ni en soutien de l'Europe ni en opposition à l'Europe. C'est une liste d'isolement au Parlement européen puisque, sur des sujets absolument essentiels, les députés LR se sont opposés au reste de leur groupe, au sein duquel ils n'ont aucun pouvoir.

Quelle est la différence entre votre projet européen et celui de Raphaël Glucksmann ?

Il y a aujourd'hui plusieurs listes issues de la Nupes. Je note d'ailleurs que celles-ci passent plus de temps à parler de ce qui se passera sur la scène politique nationale après les élections européennes que d'Europe. J'ai ainsi encore entendu récemment Raphaël Glucksmann parler d'une union de la Nupes sans Jean-Luc Mélenchon. La belle affaire ! Ça voudrait dire une union avec Mmes Obono, Panot, Hassan ou avec Adrien Quatennens, qui portent des valeurs totalement contraires à celles de la gauche sociale-démocrate, dans laquelle je me suis toujours retrouvé. Sur les sujets essentiels, on a aussi vu que toutes ces listes de la Nupes sont unies au Parlement européen. Quand s'est posée la question de la reconnaissance du nucléaire, Raphaël Glucksmann, Manon Aubry et Marie Toussaint ont voté contre. Sur le pacte asile et migration, ou le plan de relance, cela a été la même alliance !

Sur les sujets essentiels, au Parlement européen, Raphaël Glucksmann, Manon Aubry et Marie Toussaint sont unis

Vous estimerez-vous comptable d'un échec de la majorité présidentielle le 9 juin ? Quelle conséquence en tirerez-vous ?

Je me bats pour que l'enjeu de cette élection soit bien perçu par tous. Si les sondages d'aujourd'hui se concrétisaient, la France, pays fondateur de l'Europe, enverrait le premier bataillon d'extrême droite au Parlement européen. Notre capacité à peser sur l'avenir de l'Europe serait affaiblie. Je crois que le président de la République, garant des institutions, l'a indiqué dans vos colonnes : c'est une élection européenne. Les conséquences seront européennes.

Depuis que vous êtes à Matignon, vous êtes aspiré par les crises et les urgences permanentes. Cela fait de vous un Premier ministre de l'immédiateté. C'est ça, la marque Attal ?

Le défi à Matignon, c'est d'arriver à conjuguer la gestion des crises avec la projection sur le temps long. C'est pourquoi j'ai eu à cœur d'engager des chantiers profonds sur le rapport au travail, la transition écologique et numérique. Ma méthode, c'est d'abord être lucide sur le constat et reconnaître quand il y a des choses qui ne fonctionnent pas. Ensuite, c'est, trancher, prendre des décisions claires et m'assurer qu'elles soient mises en œuvre immédiatement, avancer. Enfin, c'est assumer d'agir pour le quotidien très concret des Français. Quand j'annonce que les pharmaciens pourront désormais prescrire eux-mêmes des antibiotiques contre les cystites ou les angines, c'est très pratico-pratique. Certains diront que ce n'est pas du niveau d'un Premier ministre. Moi, je considère qu'il n'y a ni bon ni mauvais niveau. Le seul qui vaille, c'est celui des Français.

Commentaires 27
à écrit le 30/05/2024 à 10:04
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Quand j'étais jeune étudiant j'avais cru comprendre que trop de liquidités amenait, tendanciellement, de l'inflation. Au jour du plan de relance post covid j'ai prédit l'inflation qui allait suivre ! Mais, on a préféré raconter que c'était la faute ...

à écrit le 27/05/2024 à 15:44
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Je vois bien mal un sursaut du pays en allant toujours plus loin dans une politique consistant à endetter le pays pour acheter le vote d'un électorat ayant un pied à l'EHPAD...

à écrit le 27/05/2024 à 8:49
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Ben sursautez ! Allez tous ensemble avec moi !: " We commence to make you (jump, jump) The Mac Dad'll make you (jump, jump) Daddy Mac'll make you (jump, jump) Kris Kross'll make you (jump, jump )!" ^^

à écrit le 27/05/2024 à 8:39
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Un sursaut de lucidité serait que M Attal demissionne voire qu on ait de nouvelle election legislatives afin d en finir avec cet immobilisme (deficit de 4.5 % prevu l annee prochaine car incapable soit de taxer plus soit de tailler dans les depenses)...

à écrit le 26/05/2024 à 18:27
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l' allocations chômage financées par des contributions prélevées sur les salaires en décembre 1958 l' industrie le commerce secteur privée ( double peine pour les gens modeste les ouvriers

à écrit le 26/05/2024 à 17:26
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[ Gabriel Attal : "J'appelle au sursaut" ] Coucouche panier le roquet de MacRon!

à écrit le 26/05/2024 à 11:55
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Planifier la précarité en organisant l'esclavage nouveau et en soutenant l'inflation planifiée par les voyous de la finance amis intimes du prétentieux sourd aveugle de Bercy, ÇA NE VAS PAS VERS UN SURSAUT , l'enfant de Matignon nous amène à plonger ...

le 26/05/2024 à 12:16
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Ces propos de "minus habens" n'ont jamais remplacé des solutions sérieuses et réfléchies

à écrit le 26/05/2024 à 11:54
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« J'appelle au sursaut », c'est fait, ce matin j'ai sursauté... Et après que proposez-vous?

à écrit le 26/05/2024 à 11:47
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Personne ne veut de votre projet

à écrit le 26/05/2024 à 11:14
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Le "sursaut" ce pourrait être de commencer par interdire Tik Tok.. Instagram...Facebook... Des millions d'heures sont perdues à consulter des "couillonades " qui pourraient être utilisées à des activités productives. Non? Bon tant pis j'aurai ess...

à écrit le 26/05/2024 à 10:23
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Réponse@Unedic L'Unedic est peut être légèrement excédentaire depuis quelques années mais a accumulé une dette de 40 milliards d'euros. Donc si les nouvelles règles accroissent l'excédent de l'Unedic cela permettra de rembourser cette dette pesa...

à écrit le 26/05/2024 à 8:59
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Et les élections sont le 8 juin, oui voilà bien joué ! ^^ Mais bon qu'ils ne nous disent pas vouloir faire reculer le RN svp hein, merci.

le 26/05/2024 à 9:31
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il ne s'agit pas de sursaut mais bien de votre vision de l'europe que les peuples europeens ne souhaite pas revoyer votre europe et non a la mondialisation l'europe commune oui

le 26/05/2024 à 9:55
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Je comprends rien.

à écrit le 26/05/2024 à 8:57
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Sans les médias, on ne se serait même pas aperçu de leur existence, rien de positif n'a été fait !

à écrit le 26/05/2024 à 8:40
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Bonjour personnellement cette appelle au sur saut nationale est dérisoire... je crainds que l'affaire est entendu ... Les résultats économique de votre partis et de la gouvernance de la france ne plainde pas en votre faveur... Attaque a tous les ...

à écrit le 26/05/2024 à 7:47
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15% et la descente est toujours en cours. Pousser au suicide ou à l’assassinat des plus fragiles… waouw, super projet. Appeler au sursaut est le fait des grands hommes, assumer est le fait de ce qui savent de quoi ils parlent, pas de planqués, sorta...

à écrit le 26/05/2024 à 6:39
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Et voilà comment pousser les chômeurs à voter Bardella.

le 26/05/2024 à 9:24
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@Menon Ou bien a la violence incontrôlable , ou bien au désespoir , de la grande politique.

à écrit le 26/05/2024 à 6:32
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Ouaip grosso modo on va faire zéro pour cent de chômeur en cassant le thermomètre. C est facile de radier tout le monde et lamentable.

le 26/05/2024 à 9:27
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Excellente analyse de votre part , dont je partage votre analyse complètement.

à écrit le 26/05/2024 à 0:28
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Taper sur les plus pauvres encore et encore... Rien ne change en Macronie. Go Jordan !

à écrit le 26/05/2024 à 0:05
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Emmanuel C'est pas en fin d'année qu'on commence à travailler ! En plus tu as déjà redoublé, t'as plus qu'a traverser la rue.

à écrit le 25/05/2024 à 23:51
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Enfin il est temps que ce pays prenne conscience que l'assistanat généralisé a un coût qu'il ne peut plus assumer.

le 26/05/2024 à 8:33
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Renseignez-vous, le budget de l'Unedic est excédentaire et l'Etat y pioche déjà pour gaver les cheminots et autres fonctionnaires. Cette réforme devrait s'accompagner d'une forte baisse des cotisations. Autrement, c'est de la spoliation.

à écrit le 25/05/2024 à 23:15
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Désolé mais après 7 ans de pouvoir, difficile de croire encore en ces gens. L'heure est au bilan et pas au programme.

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