
Cérémonie au Capitole et dîner au Palais du Quirinal : pour le 60ème anniversaire de leur Union, les Européens ont soigné les symboles. Le retour dans la capitale italienne, où fut signé le traité fondateur, est une manière de montrer que quelque chose, sur ce continent, continue de se construire. Mais comme il y a 10 ans à Berlin, cette célébration se lit aussi comme la tentative de surmonter, non pas un échec, sinon elle n'aurait pas lieu, mais un revers.
En 2007, il fallait oublier le rejet, par référendum, d'un traité constitutionnel patiemment élaboré pendant 18 mois par les 105 membres de la Convention. A présent, il faut tourner la page du Brexit, la sortie, elle aussi décidée suite à un vote populaire, du Royaume-Uni auquel il avait fallu 12 années d'hésitations et d'efforts diplomatiques pour rejoindre le « club » en 1973. Les manifestants venus participer à la célébration auront beau être nombreux à marcher sur le Capitole, il sera difficile d'oublier à quel point cette tentative de faire exister une communauté d'Etats pacifique et prospère, sans cesse en train d'inventer sa méthode, entretient un rapport compliqué à ses propres peuples.
Une courte déclaration laborieusement négociée
A Rome, les chefs d'Etat et de gouvernement n'auront d'autre message que leur propre volonté d'unité. La courte déclaration en deux pages que leurs aides ont laborieusement négocié, arrondissant tous les angles jusqu'au dernier moment, se conclut comme celle de Berlin par : « L'Europe est notre avenir commun ». A la question : comment peut-elle le rester ?, elle n'apporte pas de réponse. « La déclaration de Rome ne va pas changer le fonctionnement de l'Union européenne. Rome est utile pour rassembler après le traumatisme du Brexit », explique le député social-démocrate allemand Jo Leinen. La fête passée, il faudra revenir au labeur quotidien.
A commencer par la gestion d'un divorce dont la demande sera envoyée le 29 mars par la première ministre britannique Theresa May, absente à Rome. Un mois plus tard, les Vingt-Sept se reverront pour donner un mandat de négociation à leur négociateur en chef, Michel Barnier. Ce mandat sera crucial. Le référendum du 23 juin puis le Brexit crée un précédent. Les conditions faites au Royaume-Uni sont aussi importante pour ses relations futures avec le Continent, que pour l'unité du Continent lui-même. Des « Exit » en chaîne signifieraient la fin de l'Union européenne. Pour l'instant, il n'y a pas d'autre candidat. Et il n'y en aura sans doute à court terme.
La menace de sortie formulée par le prédécesseur de Theresa May a d'ores et déjà rendu plus légitimes celles des dirigeants qui aimeraient jouir d'une plus grande liberté au sein de la communauté. Il avait été répondu à David Cameron en février 2016 par une offre de nouveau « deal » destiné à l'aider à convaincre ses concitoyens de voter pour « rester ». D'autres pourraient en demander le bénéfice, sous la menace d'un référendum chez eux ou même d'un veto à l'accord final avec le Royaume-Uni, lequel devra être ratifié par chacun des Vingt-Sept. La négociation va donc se dérouler sous une pression sans précédent des gouvernements, des parlements et des opinions nationales, voire régionales (puisque les traités commerciaux doivent désormais être ratifiés par les régions), leur donnant un formidable levier.
Comme l'a bien compris le président de la Commission européenne en mettant sur la table ses « cinq options » pour l'avenir de l'Union début mars, l'enjeu de la négociation qui va commencer va bien au-delà du Brexit. C'est une révision en grand des relations entre tous les autres membres de l'Union qui se prépare.
L'Europe "à plusieurs vitesses" écartée
L'expression d' « Europe à plusieurs vitesses » a été écartée du texte de la déclaration de Rome, de même qu'elle ne figure pas dans le Livre blanc de la Commission : les pays d'Europe centrale, à commencer par la Pologne y verraient le signe d'une volonté de relégation en seconde zone. Le ministre-président wallon Paul Magnette, se qualifiant lui-même de « fédéraliste meurtri », n'avait-il pas appelé à « un Polxit, un Hongrexit, un Roumaxit, un Bulgxit » pendant sa bataille contre le CETA, au seul motif que les dirigeants de ces pays n'étaient pas alignés sur ses propres choix politiques ?
La Commission européenne elle-même ne veut pas en entendre parler. Il y a une bonne raison à cela. De tous les « cercles » différents que la construction européenne a tracés, la zone euro est sans conteste celui dont le trait s'est le plus épaissi au cours des dernières années. Or le fonds de 500 milliards basé à Luxembourg qui a finalement permis le sauvetage de la monnaie unique a bien été créé en conformité avec les traités mais à l'écart des institutions communes. Sans que cela ne soit jamais dit, une nouvelle union européenne existe déjà, placée uniquement sous le contrôle des gouvernements nationaux (dont les ministres des Finances siègent au conseil d'administration du fonds) et, à travers eux, des parlements nationaux.
Un autre système institutionnel
Berlin ne veut pas pour l'instant entendre parler pour l'instant de son retour dans le giron « communautaire », c'est-à-dire sous un contrôle quelconque de la Commission et du Parlement européen. Et rien ne dit que l'arrivée du social-démocrate Martin Schulz à la chancellerie y change quoique ce soit. C'est donc un autre système institutionnel, associé mais différent de l' « Europe de Bruxelles », qui est déjà en train de se construire. Un système dont la réforme et le renforcement, rendus nécessaires par la faiblesse des économies du Sud et de l'Italie en particulier, passera forcément par un autre « deal », entre Paris et Berlin cette fois-ci, une fois les élections allemandes de septembre passées.
La déclaration de Berlin annonçait le Traité de Lisbonne. Celle de Rome n'a pour l'instant pas d'issue évidente.
Quelques quotidiens nationaux persistent à refuser systématiquement de parler d'un disparu nommé Charles De Gaulle qui a sans doute été le Président le plus démocrate de tous les Présidents qui lui on succédé au grand dam de François Mitterrand qui a trouvé moyen de faire tirer sur une foule de civils et plus tard d'accuser le libérateur du pays de dictateur putschiste.
Ces quotidiens, tellement ensuqués de la forme fédérale supra-nationale de l'UE d'aujourd'hui, refusent nettement toute allusion à la vision européenne du disparu, la vision d'une Europe confédérale des peuples de l'Atlantique à l'Oural.
Ils se conforment à l'exemple donné par les deux derniers Présidents. Ces journalismes, qui se targuent et se gobergent comme les premiers de valeurs démocratiques, s'imaginent constituer des exemples de haute honnêteté intellectuelle et de fervent démocrate.
Il faudrait pourtant leur rappeler toute la souveraineté que le soit disant dictateur putschiste qui nous regarde du fond de son tombeau a donné au peuple ; ce que ces tristes prétentieux lui refusent.
Voici les exemples les plus marquants :
Par ordonnance du 21 avril 1944, il donne le droit de vote et d'éligibilité aux femmes ;
1° référendum : 28.09.1958 :approbation de la constitution de la V° République : oui ;
2° référendum : 08.01.1961 : autodétermination de l'Algérie : oui ;
3° référendum : 18.03.1962 : indépendance de l'Algérie : oui ;
4° référendum :28.10.1962 : élection du Président de la République au suffrage universel : oui ;
5° référendum : 28.04.1969 : régionalisation et réorganisation du Sénat : non.
Phénoménal exemple d'honnêteté, ce non est suivi de sa démission.
Que d'occasions manquées pour les deux derniers « derniers de la classe » !
Suivant une célèbre mise en garde de Dumas, vouloir faire oublier la vision des fondateurs de l'Europe va avoir l'effet contraire et nous la rappeler tant la forme supra-nationale actuelle nous sort des yeux. Voici ce que disait Dumas :
« Ceux là même qui règnent avouent en montant sur le trône qu'ils ne sont que les mandataires de la nation. Il est vrai qu'une fois sur le trône ils l'oublient presque aussitôt. Mais oublier un principe n'est pas le détruire, c'est forcer les autres de s'en souvenir. »
Notre pays n'est pas peuplé que d'oublieux. Il se souvient de ce que disait Charles De Gaulle.
Voici ce qu'il disait en 1953 :
« La réalité est que l'Europe se compose de nations. C'est à partir de ces nations qu'il faut organiser l'Europe.
Sur la base de cette alliance, il faut bâtir une Confédération, c'est à dire un organisme commun auquel les divers Etats, sans perdre leur corps, leur âme, leur figure, délèguent une part de leur souveraineté en matière stratégique, économique, culturelle. »
Il complétait en 1963 avec ceci :
« Tout système qui consisterait à transmettre notre souveraineté à des aréopages internationaux serait incompatible avec les droits et les devoirs de la République française. Mais aussi, un pareil système se trouverait, à coup sûr, impuissant à entraîner et à diriger les peuples et, pour commencer, le nôtre, dans des domaines où leur âme et leur chair sont en cause. Cette abdication des Etats européens, en particulier de la France, aboutirait inévitablement à une sujétion extérieure. C'est, d'ailleurs, pour éviter une telle inconsistance et, de ce fait, une telle dépendance, que nous tenons à voir l'union de l'Europe constituée par des nations qui puissent et veuillent réellement lui appartenir. »
Tous les échecs sont donc de leur responsabilité.
Par ailleurs, personne ne peut imaginer sérieusement que l'Europe va rester éternellement cette constellation d'Etats minuscules se concurrençant les uns les autres.
Une europe du sud et une europe du nord seraient en effet une bonne solution et permettrait en plus de mettre en oeuvre la bonne idée de sarkozy, qu'il a saccagé comme tout ce qu'il a fait d'ailleurs, à savoir de former une union méditerranéenne permettant de prendre pied tranquillement dans le continent africain et d'y accélérer les mouvements démocratiques que l'on peut voir émerger ici ou là mais tellement difficilement à l'heure actuelle.
Mais comment les financiers pourraient continuer de piller aussi facilement les états européens si on la scindait en deux du coup. Aucune chance que cette option intelligente ne voit le rouge au sein de notre UE en mort cérébrale.
Le plus grave, c'est la montée des populismes débridés et des extrêmes, eux mêmes engendrés par un libéralisme débridé.
La Grande Bretagne n'est elle pas une simple victime unilatérale de cet état d'esprit ?
Si on analyse la situation d'un point de vue rationnel et avec un minimum d’honnêteté intellectuelle, même si tout ne va pas pour le mieux, la situation économique des pays Européens reste plus qu'enviable, y compris pour l’Angleterre.
Le problème c'est le prix payé par les populations, qui ont fait et qui font encore des sacrifices, sans grands retours, autres que l'incertitude pour leur avenir.
Alors ils vont chercher l'espoir dans le désespoir.
Cette commémoraison revêt en effet un aspect symbolique.
Une construction qui a tout de même été conçue à l'origine, juste après la 2e guerre mondiale, pour éviter d'autres dérives nationalistes et fascistes. Et on obtient actuellement quasiment le contraire. Pas majoritairement, mais il suffit de quelques médias opportunistes ou propagandistes, ou de quelques leaders arrivistes et nous voilà fort démunis.
A ce propos, la rencontre Poutine / Le Pen va certainement rentrer dans l'histoire, comme une erreur. Si je me rappelle bien de l'histoire, le peuple Russe a mené "la grande guerre patriotique" de 1941-1945 contre le nazisme ? Ou j'ai mal lu.
C'est à la puissance européenne d’établir le dialogue avec Poutine et avec la Russie.
Il faut redonner l'espoir dans l'Europe, avec des ambitions et des projets. Autrement qu'avec des règlementations sur le diamètre des boulons et des écrous (au hasard, je ne sais pas si une telle directive existe).
Pour cela il faut définir ou rappeler des objectifs communs et les mettre en application. Simplement et sans laisser place à des tergiversations interminables ou à des parasitages.
Sachant que l'on ne pourra jamais obtenir l'unanimité, cela passera certainement par plusieurs périmètres et plusieurs niveaux d’alliances.
Souvenons nous : une Europe des peuples de l'Atlantique à l'Oural ! Relisons les déclarations de son plus éminent fondateur Charles De Gaulle qui parlait non pas d'une UE fédérale, mais d'une Europe confédérale des peuples.
Celle d'aujourd'hui est une bouillie fédérale ultra-libérale construite par et pour les affairistes et les financiers qui, sans protéger
son territoire des agressions extérieures, par la mondialisation et l'ultra libre échange a donné les mêmes droits aux lobbys extérieurs qu'à ses propres membres.
Il y a quelque chose de suprêmement vicieux et malhonnête dans le discours des partis politiques traditionnels de droite, du centre et de gauche.
C'est ce discours répétitif qui nous promet l'effondrement du pays en cas de sortie de l'UE et de sa monnaie unique.
Et si c'était exactement l'inverse qui nous attendait ?
Ces partis qui ont construit un édifice bancal sur une base marécageuse en ajoutant des étages sans consolidation des ajouts précédents n'arrivent pas à admettre que des peuples ne veulent plus y loger.
Ainsi, au lieu de faire l'effort de réviser entièrement leur copie, ils préfèrent agiter des sorcières et attiser des peurs de lendemains désenchanteurs et pénibles.
Ce qui est décourageant est de s'apercevoir que ces discours arrivent à convaincre un grand nombre d'égarés qu'il n'y a pas de lendemains heureux possibles sans le fédéralisme supranational de cette UE mortifère.
Mais que diable, la planète ne se compose pas seulement de 28 pays et de nombreux autres ont réussi à acquérir un niveau socio-économique et structurel des plus enviable. Par exemple, tout près de nous la Suisse connaît un niveau de vie très élevé avec un taux de chômage inférieur au notre.
De plus nous n'avions pas besoin des diktats de Julius Cauïs Bruxellus avant le traité de Maastricht pour vivre parfaitement bien avec notre souveraineté dans une économie de marché basée sur la réciprocité.
Que cherchent donc ces inconditionnels de la chaîne aux pieds et du renoncement ?
Revoir l'édifice européen et le refonder ne signifie absolument pas revenir à l'isolement nationaliste que ces tribuns malhonnêtes clament à tout va.
Rejeter la conception fédéraliste n'est pas rejeter l'idée d'une Europe unie.
Charles de Gaulle l'avait prédit. C'est une Europe confédérale des peuples qu'il faut construire.
Voici ce qu'il disait en 1953 :
« La réalité est que l'Europe se compose de nations. C'est à partir de ces nations qu'il faut organiser l'Europe.
Sur la base de cette alliance, il faut bâtir une Confédération, c'est à dire un organisme commun auquel les divers Etats, sans perdre leur corps, leur âme, leur figure, délèguent une part de leur souveraineté en matière stratégique, économique, culturelle. »
Il complétait en 1963 avec ceci :
« Tout système qui consisterait à transmettre notre souveraineté à des aréopages internationaux serait incompatible avec les droits et les devoirs de la République française. Mais aussi, un pareil système se trouverait, à coup sûr, impuissant à entraîner et à diriger les peuples et, pour commencer, le nôtre, dans des domaines où leur âme et leur chair sont en cause. Cette abdication des Etats européens, en particulier de la France, aboutirait inévitablement à une sujétion extérieure. C'est, d'ailleurs, pour éviter une telle inconsistance et, de ce fait, une telle dépendance, que nous tenons à voir l'union de l'Europe constituée par des nations qui puissent et veuillent réellement lui appartenir. »
Certe l'union existe, mais elle s'est surtous construire pour le capitalisme, pour que les puissant continue à s'enrichir .... Pour le reste nous attendons depuis 60 ans.