Europe : un déficit d'investissement encore marqué

Le sous-investissement dans l'Union européenne a concerné une très grande majorité de pays pendant la période 2007-2017, selon les derniers résultats de la Commission européenne.
Grégoire Normand
La moitié des investissements en Europe sont destinés à la construction, selon les chiffres de la Commission européenne.
La moitié des investissements en Europe sont destinés à la construction, selon les chiffres de la Commission européenne. (Crédits : Benoit Tessier)

La crise a lourdement pesé sur les investissements en Europe. Selon les derniers chiffres diffusés par Eurostat ce lundi 14 mai, les investissements (formation brute de capital fixe, FCBF) ont reculé dans 24 pays sur 28 sur la période 2007/2017. Les politiques d'austérité menées dans le contexte de la crise économique ont ainsi eu des conséquences sur la croissance du Vieux continent.

Face à ce constat, le Fonds monétaire international (FMI) a exhorté lundi Berlin à stimuler de manière "plus énergique" la dépense publique dans un pays économiquement très performant mais qui reste sourd aux critiques récurrentes concernant son sous-investissement. "Plus de volonté politique est nécessaire pour améliorer de manière décisive l'investissement intérieur, ce qui pourrait aussi aider à rééquilibrer la balance extérieure", formule l'institution dans son rapport annuel sur l'Allemagne.

Lire aussi : Le manque d'investissement pourrait ralentir la croissance mondiale (OCDE)

La Grèce en net recul

Les investissements ont décliné en moyenne à l'échelle de l'UE de 2,3 points et de 2,7 points dans la zone euro. Ils représentaient 20,1% du PIB européen en 2017 contre 22,4% il y a 10 ans. Ces chiffres masquent évidemment des divergences sensibles entre les différents pays. Sur la dernière décennie, les plus grandes baisses ont été enregistrées en Lettonie (19,9% en 2017 contre 36,4% en 2007 ou 16,5 points), Grèce (13,4 points), Estonie (12,9 points), Roumanie (12,5 points ) ou l'Espagne (10,4 points).

À l'inverse, des variations à la hausse ont été recensées dans seulement trois pays. Il s'agit de la Suède (de 23,9% du PIB en 2007 à 24,9%), de l'Autriche (+0,6 point) et de l'Allemagne (+0,2 point). En Belgique, les investissements ont été relativement stables (0,1 point). Quant à la France, elle a connu une baisse de 0,7 point sur cette période.

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Ces résultats dessinent une Europe à plusieurs vitesses où seulement quelques pays ont réussi à investir durant ces années tandis que la très grande majorité continuaient de s'enfoncer dans la crise économique qui a frappé l'ensemble des pays européens avec des niveaux d'intensité disparates. Les pays du Sud et de l'Est de l'Europe, plus vulnérables, ont clairement connu des baisses importantes de leurs dépenses d'investissement dans les années qui ont suivi la crise.

3.100 milliards d'euros

L'année dernière, l'ensemble des pays de l'UE (en prenant en compte l'investissement public et l'investissement privé) ont investi près de 3.100 milliards de d'euros. Le secteur de la construction représente près de la moitié des investissements selon le bureau de statistiques européen. Les machines, l'équipement et les systèmes d'armement comptent pour 31% des sommes investies. Enfin, les actifs liés à la propriété intellectuelle représentent 19% des investissements.

Parmi les pays membres de l'Union européenne, la République Tchèque est l'État qui consacre le plus de dépenses à l'investissement (25% du PIB), suivi de la Suède (24,9%), de l'Estonie (23,7%). À l'inverse, la Grèce (12,6%) est le pays qui connaît le plus faible taux d'investissement, suivi du Portugal (16,2%) et du Royaume-Uni (16,9%). La France est au dessus de la moyenne de l'UE avec 22,4%.

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[Cliquez sur le graphique pour l'agrandir. Crédit : Statista*]

Le paradoxe de la France

Les entreprises françaises ont continué d'investir comme en témoignent les récentes données de l'Insee. En 2016, le taux d'investissement des sociétés non financières a atteint 23,3% de la valeur ajoutée en 2016, soit un niveau similaire à 2008. Malgré ces niveaux relativement élevés, la compétitivité notamment hors-prix des entreprises françaises à continué de se dégrader pesant ainsi sur les performances commerciales de la France à l'étranger.

Lors d'un séminaire organisé dans les locaux de France Stratégie en février dernier, plusieurs pistes d'explication ont été avancées. L'institut COE-Rexecode avait par exemple pointé un rapport qualité/prix insuffisant des produits français (pour les biens intermédiaires, les biens d'équipement mécaniques et les biens d'équipement électronique), avec "pour points faibles le design et l'innovation." Si la France est légèrement au dessus de la moyenne de l'Union européenne en termes de dépenses en recherche et développement (2,22% du PIB selon des données pour 2015 contre 2,03% pour l'Europe), l'économie tricolore reste encore loin de l'objectif européen qui est d'atteindre 3% du PIB à l'horizon 2020.

Lire aussi : Recherche et développement : l'Europe encore loin de ses objectifs

Un plan d'investissement pour rien ?

Pour tenter de combler ce déficit européen, la Commission Juncker a mis en place un fonds européen pour les investissements stratégiques. Selon le site de la Banque européenne d'investissement, "il vise à mobiliser des investissements privés en faveur de projets qui revêtent une importance stratégique pour l'UE." Pour l'instant, le montant des investissements s'est élevé à 284 milliards d'euros pour un objectif de 500 milliards pour 2020. Malgré le succès du fonds revendiqué par la présidence Juncker, des réserves sont régulièrement exprimées sur l'efficacité et l'usage de ces sommes.

Lire aussi : Le Plan Juncker a-t-il relancé l'investissement européen ?

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(*) Un graphique de notre partenaire Statista.

Grégoire Normand
Commentaires 9
à écrit le 16/05/2018 à 9:06
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Bon donc je n'ai pas le droit de commenter sous vos articles ? Au moins c'est clair comme ça même si c'est vraiment moche... -_-

à écrit le 15/05/2018 à 11:10
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heureusement le prive n'investit que selon ses moyens si les politiques en faisait autant la France irait bien sans sa dette colossale chose aberrante bruxelles doit lever le 23 la contrôle de surendettement de la france et le 24 Philippe doit annon...

le 15/05/2018 à 11:41
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Le privé, comme le public, investit suivant les intérêts futurs, non pas selon les moyens! Mais, vu que le domaine du public est détruit, ce qui handicape le secteur privé, l'investissement est ralentit!

à écrit le 15/05/2018 à 9:59
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la France investit très largement, avec de bons résultats (investissement public, R&D/connaissance, investissement/création d'entreprises, qualité de l'emploi, logement, famille/fécondité, culture/patrimoine, défense, environnement, etc...). COE Rex...

le 15/05/2018 à 10:59
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Deficit de 2.200.000.000,00 euros etc.....

le 15/05/2018 à 11:01
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Deficit de 2.200.000.000.000,00 euros etc.....

le 15/05/2018 à 13:26
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Vous etes apparement adepte de la Methode coué. repeter que tout va bien pour ne pas voir les problemes... L investissement en France est surtout dirige vers l immobilier (cf l illustration de l article). Par ex, une entreprise va acheter des locaux...

le 15/05/2018 à 14:32
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@Revu... On ne voit que ce qu'on veut voir. Et le déficit des Etats-Unis (public mais aussi privé (!), celui du Japon, celui de l'Italie ? L'autoflagellation ça va 5 mn hein.

le 15/05/2018 à 22:51
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Il reste néanmoins un point noir, c'est l'important déficit de notre balance commerciale qui se creuse encore et encore.

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