Zone euro : la hausse des taux freine encore les crédits au secteur privé

La croissance des crédits accordés au secteur privé en zone euro a poursuivi son repli en avril, de -3,8%. En raison des hausses successives de taux d'intérêt pour combattre l'inflation désormais structurelle, les entreprises et les ménages ont toujours plus de mal à obtenir des prêts de la part des banques. Une situation vouée à perdurer puisque la Banque centrale européenne devrait continuer sa politique de resserrement monétaire.
Pour réduire l'inflation, la BCE a amorcé un relèvement de ses taux directeurs en juillet 2022, qui agit nettement sur le crédit bancaire.
Pour réduire l'inflation, la BCE a amorcé un relèvement de ses taux directeurs en juillet 2022, qui agit nettement sur le crédit bancaire. (Crédits : Reuters)

Pour le sixième mois d'affilée, les prêts au secteur privé, ajustés de certaines opérations strictement financières, ralentissent. Ils ont progressé de 3,8% sur un an en avril, a indiqué la Banque centrale européenne (BCE) ce mardi 30 mai, contre 4,3% en février, derniers chiffres en date.

Ce repli est une conséquence directe de la politique de resserrement monétaire menée par l'institution depuis près d'un an. « Notre priorité immédiate et absolue est d'assurer un retour au plus tôt de l'inflation vers notre objectif », fixé à 2%, a rappelé la présidente de l'institution Christine Lagarde la semaine dernière lors des célébrations de l'anniversaire des 25 ans de la BCE. On en est encore loin puisque le niveau d'inflation s'est élevé à +7% en avril.

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Pour le réduire, la BCE a amorcé un relèvement de ses taux directeurs en juillet 2022, qui conduit à tarir les flux de crédit et transférer les dépôts bancaires sur des comptes rémunérés. Ce tassement du crédit devrait d'ailleurs se poursuivre puisque la BCE a continué de relever ses taux en mai, de 0,25 point de pourcentage, portant à 3,75 points la hausse cumulée. Et les marchés prévoient une nouvelle augmentation en juin.

Moins de prêts pour les entreprises et les ménages

Ce resserrement monétaire agit nettement sur le crédit bancaire. Les prêts accordés aux entreprises ont ainsi ralenti leur progression en mai à 4,6% sur un an, contre une progression de près de 9% observée six mois plus tôt.

La croissance des crédits accordés aux ménages a également ralenti, à 2,5%, soit le score le plus bas depuis avril 2017.

La Banque centrale européenne avait d'ailleurs indiqué début mai que les banques de la zone euro ont procédé à un durcissement des conditions d'octroi des prêts à l'économie au premier trimestre 2023. De janvier à mars, « les critères d'approbation des prêts et lignes de crédit aux entreprises ont encore été sensiblement resserrés » en net, selon l'institution. Les critères de prêts au logement consentis aux ménages ont également été fortement resserrés en net, et dans une moindre mesure ceux du crédit à la consommation.

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La masse monétaire recule encore

Autre phénomène marquant, l'évolution de la masse monétaire au sens étroit (M1). L'Eurosystème, qui regroupe la BCE et les banques centrales nationales de la zone euro, possède trois agrégats (M1, M2 et M3). Le premier comprend les pièces et les billets en circulation et les dépôts à vue (dépôt fait dans un organisme bancaire et que l'on peut retirer à tout moment). Cet indicateur avancé de la croissance a reculé pour le quatrième mois de suite. Surtout, à un rythme accéléré de -5,2% sur un an selon la BCE, contre -2,7% en février.

Cela montre que les ménages et entreprises continuent de transférer leurs dépôts à vue vers une épargne moins liquide et portant intérêt, comme en France le Livret A. Ces sommes ne sont généralement pas dirigées vers la consommation, ce qui devrait peser sur la croissance.

Reste que la Commission européenne a revu à la hausse mi-mai ses prévisions de croissance. Bruxelles mise désormais sur une croissance du Produit intérieur brut (PIB) de 1,1% en 2023 (soit +0,2 point par rapport à la précédente prévision de mi-février), puis de 1,6% en 2024 (+0,1 point), dans les 20 pays de la zone euro. Même tendance pour l'ensemble de l'UE, dont la croissance est désormais annoncée à 1% (+0,2 point) en 2023, puis 1,7% (+0,1 point).

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(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 30/05/2023 à 14:49
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L'incohérence de la BCE est de hausser les taux mais de ne pas interrompre complètement ses achats de dette (surtout publique). Il fallait terminer le QE bien plus rapidement. On a de cette façon crée un biais en faveur de l'endettement public et la ...

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