Le fonds stratégique de Bpifrance revoit ses ambitions à la baisse

Le « lac d’argent » de Bpifrance divise par deux son objectif de levée de fonds, de dix milliards d’euros à cinq ou six milliards d’euros. La crise sanitaire est passée par là et le fonds n’a pas pu faire ses tournées de présentation auprès des investisseurs comme prévu, estime l'institution financière. Cette annonce jette une ombre sur les ambitions des pouvoirs publics pour mieux protéger le capital des entreprises françaises cotées.
Selon Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance, l’institution a injecté près de 28 milliards d'euros dans l'économie au premier semestre.
Selon Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance, l’institution a injecté près de 28 milliards d'euros dans l'économie au premier semestre. (Crédits : BENOIT TESSIER)

L'objectif est drastiquement revu à la baisse. Au lieu des dix milliards d'euros initialement prévus lors de son lancement, le fonds d'investissement Lac 1 ne devrait finalement lever que cinq ou six milliards d'euros, a indiqué ce mardi, Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance, lors d'une présentation des activités au premier semestre de l'institution parapublique. En cause, selon le dirigeant, la crise sanitaire et les périodes de confinement qui ont considérablement gêné l'organisation des road shows auprès des investisseurs institutionnels.

Le fonds « lac d'argent » avait été officiellement lancé en mai 2020, en plein confinement, avec un premier closing de 4,2 milliards d'euros (dont un milliard de dettes), levés auprès de Bpifrance, dont la participation est minoritaire, et de grands institutionnels, comme le fonds souverain d'Abou Dhabi, Mubadala, les principaux assureurs de la place et quelques family offices.

Pallier l'absence de fonds de pension

L'idée de ce fonds d'investissement, dit stratégique, est de prendre des participations dans les fleurons français de la Bourse, des références mondiales dans leur domaine, et de les aider à muscler leurs fonds propres. Jusqu'ici, les principales participations concernent le chimiste Arkema, pour notamment accompagner le groupe dans son changement stratégique vers la chimie de spécialités, et le lunetier EssilorLuxottica.

Généralement, ce sont les managements des sociétés qui sollicitent le fonds pour consolider leur capital, et éventuellement, les protéger contre les offres hostiles, surtout venant de l'étranger.

C'est pourquoi ce fonds Lac 1 est parfois considéré comme l'héritier des noyaux durs mis en place par Edouard Balladur, lors des grandes privatisations de 1986-1988.

Le fonds Lac 1 se montre d'autant plus stratégique aujourd'hui que leurs initiateurs estiment que les entreprises françaises sont confrontées à des changements majeurs de modèle économique avec la transition énergétique, susceptibles de les fragiliser à court et moyen terme. Finalement, ce fonds a vocation de palier l'absence de fonds de pension en France et d'épauler les assureurs, notamment les assureurs-vie, dans leur vocation d'investisseur de long terme.

Incitation de la Commission européenne

D'ailleurs, les pouvoirs publics ne cessent d'encourager les assureurs à jouer ce rôle de protecteur du capital des groupes français et d'investisseur en fonds propres. Même la Commission européenne vient de proposer un assouplissement des règles prudentielles (Solvabilité 2) pour inciter les assureurs européens à investir dans les entreprises et accompagner la relance, notamment dans les infrastructures.

Mais cette révision à la baisse des montants levés pour le fonds Lac 1 sonne comme un rappel à la réalité. D'autant que le fonds Lac 1 devait susciter la naissance d'autres fonds similaires, avec plusieurs fonds de 5 à 10 milliards sur la seule place de Paris. Ce n'est pas gagné. Loin de là.

La France reste toujours le parent pauvre en Europe du financement des fonds propres des entreprises. Dommage pour nos champions nationaux qui sont aussi, le plus souvent, des géants internationaux.

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