Le plan de soutien du gouvernement en faveur de l'aéronautique précise ses premiers contours. Mais il doit encore être finalisé. Il devrait être présenté début juin, en tout cas avant le 15 juin, probablement par Emmanuel Macron. Car le gouvernement a l'ambition de présenter le financement des plans de la filière automobile et celle de l'aéronautique dans le cadre du projet de loi de finances (PLF 3) lors du conseil des ministres du 10 juin, selon nos informations.
Le plan de relance de la filière aéronautique aura au moins trois piliers, selon nos informations : un fort soutien à la Recherche et Développement (R&D) du secteur, les fameux prêts garantis par l'État (PGE) déjà annoncés mais qui seront reconfirmés, et, enfin, un fonds de restructuration spécifique à l'aéronautique, abondé par Bpifrance, des fonds français et, plus modestement, par les "Big four" du secteur (Airbus, Dassault Aviation, Safran et Thales). Le ministère des Armées travaille en parallèle à "un plan de rebond", qui vise essentiellement à sécuriser la trajectoire financière de la loi de programmation militaire. Voire plus s'il y a affinité.
Des hommes clés à la manœuvre
Pour mettre au point ce plan, les discussions se déroulent entre le GIFAS, les Big four et les ministères de l'Économie et des Transports. La chaine d'approvisionnement (supply chain) de l'aéronautique (ETI et PME) est également associée, via Patrick Daher (Daher) et Christophe Cador (Satys). Selon nos informations, deux hommes clés, qui ont la totale confiance du secteur - Didier Evrard, qui a été responsable des programmes du missilier MBDA, puis d'Airbus, et Jean-Brice Dumont (Airbus) - sont à la manœuvre pour le compte de la filière aéronautique durement éprouvée par la crise sanitaire, puis la crise économique : Didier Evrard en tant que "patron" de la Task force (Airbus, Dassault, Safran et Thales) et Jean-Brice Dumont en tant que président du Corac (Conseil pour la recherche aéronautique civile) sur le volet innovation.
"Il nous faut absolument un plan qui soutient la R&D pour que la filière reste compétitive face aux industriels américains et aux Chinois. La Chine met les bouchées doubles pour nous passer devant", explique-t-on à La Tribune.
Sécuriser la loi de programmation militaire
La préparation du budget 2021 va se révéler être très sportive, comme l'a indiqué le 12 mai dernier à l'Assemblée nationale, le Premier ministre, Édouard Philippe. "Comment allons-nous construire le budget 2021 ? s'est-il interrogé. Quelque chose me dit que cela va être un exercice intéressant. Intéressant parce que la situation financière, les enjeux collectifs, pas simplement en matière de défense, mais aussi en matière de santé, en matière d'éducation, en matière d'infrastructures, la nécessité de faire repartir notre économie, notre industrie, nos services, la nécessité de construire notre sécurité demain, tout cela va devoir être tranché dans un cadre profondément impacté par l'absence de recettes d'un côté, et l'augmentation des dépenses de l'autre. C'est une équation qui ne va pas être exactement facile à résoudre et pourtant il va falloir le faire. Et nous allons le faire collectivement dans le cadre de choix politiques".
De son côté, la ministre des Armées se bat pour sécuriser la trajectoire financière de la LPM. Combattive, elle peut s'accrocher aux propos du Premier ministre, qui a rappelé que "l'impératif de défense reste un impératif de premier rang et que tous ceux qui penseraient le contraire se verraient le moment venu exposé à des risques qu'aucun d'entre nous a envie de voir se réaliser". C'est dans ce cadre que le ministère des Armées réfléchit à "un plan de rebond" pour sécuriser la LPM, voire accélérer certaines dépenses prévues dans les futures années afin de dépenser la totalité de son budget 2020. Certaines livraisons de matériels risquant de glisser d'une année sur l'autre en raison du confinement, Florence Parly pourrait avoir des crédits restants sur les bras en fin d'année. Sur ce point, la Direction générale de l'armement (DGA) travaille déjà pour trouver des programmes ayant l'effet levier le plus important pour soutenir les PME de la filière.
Dans les milieux des industriels, on rappelle que "cela ne sert à rien de casser ce qui marche bien c'est-à-dire de piquer l'argent de la défense pour le donner au civil". Car, explique-t-on dans une filière très duale, "l'aéronautique militaire reste un soutien à l'aéronautique civile". Le président du GIFAS Eric Trappier, l'a très bien résumé lors de son audition devant la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat : "La défense est un amortisseur de problèmes".
Sujets les + commentés