Attractivité des armées : Florence Parly tente de séduire les militaires avec un plan famille

Le ministère des Armées va mobiliser 300 millions d'euros sur cinq ans afin d'améliorer le quotidien des militaires et de leurs familles. Un plan famille pour apaiser le malaise dans les armées et pour attirer les jeunes vers les métiers d'armes.
Michel Cabirol
Les forces armées rencontrent des difficultés structurelles de recrutement dans certaines spécialités

Le ministère des Armées va mobiliser 300 millions d'euros sur cinq ans afin d'améliorer le quotidien des militaires et de leurs familles, a annoncé mardi la ministre des Armées, Florence Parly. Ce plan famille fera "l'objet d'un pilotage et d'un suivi à la fois strict et régulier", a assuré la ministre. Ainsi, un responsable dédié doit être "rapidement nommé pour exercer ce suivi et tous ceux qui ont participé à la conception du plan pourront continuer à être consultés et à le faire évoluer en fonction des besoins", a-t-elle précisé. Ce plan répond également au malaise prégnant dans les armées et à la perte d'attractivité du métier des armes, qui a été récemment pointé du doigt par le Haut comité d'évaluation de la condition militaire.

"Ce plan famille est ambitieux, moderne, concerté, a affirmé Florence Parly. (...) C'est un plan ambitieux, aussi, par les moyens qui lui sont affectés. Sur 5 ans, 300 millions d'euros de crédits nouveaux sont destinés à donner vie à ces mesures et à changer le quotidien de nos forces et de leurs familles".

Selon la ministre, ce plan répond directement aux attentes de nos militaires et de leurs familles. "Il y répond concrètement et il y répond vite : dès 2018, 70% des mesures du plan famille seront appliquées", a-t-elle souligné. Ce plan permet de mieux prendre en compte les absences opérationnelles, notamment en offrant des places supplémentaires en crèche (création de 240 places dès 2018), en déployant le wifi partout et tout le temps en garnison comme en opérations, ou encore en garantissant aux familles de n'avoir à avancer aucun fonds lors des déplacements en mission.

660 logements supplémentaires

S'agissant de la question de l'hébergement et du logement, le plan famille apporte "des réponses concrètes en augmentant et en améliorant l'offre de logement", a estimé Florence Parly. Ainsi, l'offre augmentera de 660 logements entre 2018 et 2020 tandis que les dispositifs de déménagement seront améliorés. Pour mémoire, le ministère des Armées compte 323.000 personnels civils et militaires, dont 97.000 gendarmes.

Le plan famille s'est également emparé du défi de la mobilité en garantissant une meilleure visibilité sur les mutations des militaires. Les ordres de mutation seront annoncés cinq mois avant le début de l'affectation dans 80% des cas. "C'est une avancée considérable et elle fera l'objet d'un suivi très strict", a assuré la ministre.

Une attractivité des armées fragilisée

Au regard des fortes contraintes, "l'attractivité au recrutement s'avère globalement satisfaisante même s'il existe d'indéniables fragilités", a estimé dans son dernier rapport le Haut comité. Ce qui réjouit la ministre : "Beaucoup de Cassandre avaient annoncé la fin de la vocation militaire, il n'en est rien. Les armées sont toujours attractives et le ministère offre des expériences riches, des parcours pour toutes les aspirations et tous les profils".

Quelles sont ces contraintes? "Pour une large partie des forces, l'impératif de jeunesse impose un important turn-over et une ressource à conquérir année après année. Dans le même temps, les armées et la gendarmerie ont besoin d'un large spectre de métiers et de compétences. Certains requièrent de combiner aptitude au combat et capacités techniques, d'autres, de haute qualification (aéronautique, numérique...), qui sont très exposés à la concurrence. Enfin, d'autres répondent à la nécessité pour les forces de pouvoir agir en autonomie et de disposer, à cet effet, de leurs propres services et de leur propre soutien".

Pour autant, le Haut comité relève des fragilités dans l'attractivité des armées qu'une enquête réalisée par la délégation à l'information et à la communication de la défense (DICoD) a révélé. Ainsi, la perception de leur carrière par les militaires eux-mêmes semble affectée par la conjonction de plusieurs facteurs négatifs : difficulté à concilier vie militaire et vie personnelle, manque de moyens, crainte d'une perte de compétences techniques et tactiques, lassitude face aux difficultés rencontrées en matière de soutien et d'environnement (infrastructure et hébergement)... Ces facteurs négatifs peuvent peser lourdement et entamer le lien à l'institution militaire. Ainsi, 62% des militaires sondés pourraient envisager de quitter l'armée pour changer d'activité. En outre, 53% d'entre eux estiment que leur engagement n'est pas suffisamment rémunéré.

Tensions dans le recrutement

Les forces armées rencontrent des difficultés structurelles de recrutement dans certaines spécialités en dépit de la mise en place d'outils indemnitaires particuliers. C'est le cas notamment de celles relevant des systèmes d'information (SI) et de la cyberdéfense. Des métiers très  exposés à ces difficultés. Le marché de l'emploi est très concurrentiel dans ces domaines et se caractérise, d'une part, par la raréfaction de la ressource, d'autre part, par l'importance de la rémunération comme critère de choix. Le cabinet de recrutement Michael Page estime que 52 % des spécialistes des SI sont, compte tenu de l'offre, d'abord motivés par le niveau de rémunération selon son Étude de rémunérations 2017. La hausse des besoins des forces armées pour développer la cyberdéfense accroît encore les difficultés rencontrées.

Certains métiers de l'aéronautique, notamment ceux de la maintenance, sont également exposés à une forte concurrence en raison des rémunérations supérieures offertes par l'industrie aéronautique. Le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales évalue que l'industrie aéronautique en France a recruté 11.000 personnes en 2015, 10.000 en 2016 et qu'elle prévoit d'en recruter 8.000 autres en 2017 selon sa publication Situation de l'emploi 2017. Conséquence, les trois armées peinent à recruter des spécialistes en maintenance aéronautique.

Les polytechniciens de moins en moins attirés par l'armée

Les tensions au recrutement dans certaines spécialités se traduisent par des sélectivités au niveau du recrutement particulièrement faibles ou par des sous-effectifs qui limitent les capacités des forces, a relevé le Haut comité. Par exemple, l'armée de terre ne parvient à recruter que 70 % des techniciens en systèmes d'information et de communication dont elle a besoin. La marine, ressent des difficultés à recruter dans les spécialités nécessitant des formations longues et exigeant un fort prérequis académique (avionique, contrôleur aérien, énergie nucléaire...), tout comme l'armée de l'air. Plus généralement, les forces armées notent la difficulté du recrutement dans les métiers techniques en raison de la faible valorisation dont ils font l'objet en France.

Enfin, les difficultés que la fonction militaire peut rencontrer concernent également les polytechniciens, qui ont vocation à occuper des postes dans les filières techniques et les fonctions de direction. À l'instar des autres emplois publics, l'offre du ministère des Armées a "tendance à être de moins en moins attractive", constate le Haut comité. Bien que le statut militaire des élèves polytechniciens ait été réaffirmé depuis la remise au Premier ministre du rapport de Bernard Attali en juin 2015, la fonction militaire demeure relativement peu attractive à leurs yeux. Depuis 2002, le nombre des élèves entrant dans le corps des ingénieurs de l'armement s'est réduit (entre 10 et 18 polytechniciens ont rejoint la DGA par année) tandis que les admissions dans des corps particuliers des armées ou de la gendarmerie nationale s'avèrent très marginales. Entre 2000 et 2013, une promotion de l'école polytechnique voit 2,5 de ses membres rejoindre une armée ou la gendarmerie. Tout fout le camp...

Michel Cabirol

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Commentaires 4
à écrit le 01/11/2017 à 20:01
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je ne sais pas si tout fout le camp à l'X , mais les anciens ont obtenu au forceps de garder leurs vieux privilèges .. Et si on supprimait le statut d'école militaire de l'X et les fusionnait avec Centralesupélec ?

à écrit le 01/11/2017 à 18:33
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Cela fait en moyenne € 185,75 par tête de pipe, par an. Une gouute d'eau. Finalement peu pourront bénéficier de ce projet.

à écrit le 01/11/2017 à 9:40
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Quand va t on constituer une légion européenne en France pour un début de base d'armée européenne !

le 01/11/2017 à 18:11
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Jamais parce les politiques ne le veulent pas. De plus garder son indépendance militaire est de loin la meilleure solution dans ce pays qui s appelle :LA FRANCE !

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