Comment la Commission européenne et l'ESA veulent booster les startups du spatial

Des contrats à l'échelle des startups et une culture du risque assumée sont deux clés pour soutenir les jeunes pousses européennes du spatial. Avec comme corollaire que le risque dans un domaine aussi innovant peut parfois être celui de ne pas faire confiance à un acteur du New Space. "Comment booster les startups du spatial ?" était l'un des thèmes du Paris Air Forum, organisé par La Tribune et qui s'est tenu lundi au Musée de l'air et de l'espace.
« Vous pouvez perdre de l'argent en prenant un risque. Vous pouvez en perdre encore plus en n'en prenant pas », résume Jean-Jacques Dordain, ancien directeur général de l'Agence spatiale européenne, aujourd'hui conseiller auprès de startups spatiales européennes.

« Nous sommes là pour faire partie de l'industrie spatiale », assure à l'occasion du Paris Air Forum organisé lundi par La Tribune, Nicolas Capet, fondateur d'Anywaves, une startup qui développe des antennes pour les satellites de constellations. « Si nous voulons avoir une chance de devenir de grandes compagnies, nous avons besoin de contrats de taille intermédiaire, qui nous offrent la possibilité de faire nos preuves », explique-t-il. « La question du risque devrait être : combien cela pourrait vous faire gagner plutôt que combien cela vous coûte », prolonge David Henri, dont la startup Exotrail a développé un moteur pour mini-satellite pour un guidage précis dans les constellations spatiales.

En Europe, contrairement aux Etats-Unis, la question de la prise de risque « est culturellement un problème », reconnait Paul Verhoef, directeur du programme Galileo et de la navigation à l'Agence spatiale européenne (ESA). « Seront nous capables en Europe d'accepter qu'une partie de l'argent soit peut-être perdu ? Si la réponse est oui, nous pouvons avancer », poursuit-il. « Vous pouvez perdre de l'argent en prenant un risque. Vous pouvez en perdre encore plus en n'en prenant pas », résume Jean-Jacques Dordain, ancien directeur général de l'Agence spatiale européenne, aujourd'hui conseiller auprès de startups spatiales européennes.

Un fonds de 1 milliard d'euros

L'autre difficulté est qu'en raison de la taille des startups, elles n'ont pas accès à nombre de contrats attribués à de grands groupes, qu'il faut ensuite convaincre de les faire monter à bord sur des segments spécifiques, souligne Paul Verhoef. « Quel est le problème pour avoir vos produits sur nos satellites ? L'une des choses est qu'il y a un certain nombre de personnes entre nous, et comment les convaincre qu'elles devraient travailler avec vous? »

Pour y répondre, la Commission et les agences européennes ont mis en place un volet de mesures et programmes destinés à soutenir les startups, explique Catherine Kavvada, directrice du développement spatial et de l'innovation à la Commission. Le commissaire européen en charge notamment de la politique industrielle Thierry Breton veut de faire de l'Europe le centre mondial de l'entrepreneuriat spatial, autour d'une approche « New Space à l'Européenne ». Pour cela, il va lancer un Fonds spatial de 1 milliard d'euros (baptisé Cassini), accompagné d'une stratégie de participation des startups dans nos marché publics et d'un programme de validation en orbite des technologies les plus innovantes.

"Il y a énormément de jeunes qui créent des startups. Il faut les accompagner. Le fonds Cassini est destiné à soutenir les entreprises innovantes du secteur spatial. Il faut aussi leur permettre d'avoir accès à l'espace pour tester leurs idées ainsi que leurs services. Il faut également mettre en place une stratégie de participation des startups dans les marchés publics et d'un programme de validation en orbite des technologies les plus innovantes", assure le commissaire européen en charge notamment de la politique industrielle Thierry Breton lors de sa venue au Paris Air Forum.

Faire monter les startups à bord de Galileo et Copernicus

L'objectif est d'aider ces compagnies à être commercialement viables, leur permettre d'avoir accès à différents marchés pas uniquement en Europe mais également dans le monde, et de les faire grandir. Pour les programmes Galileo et Copernicus, il y a des clauses dédiées qui obligeront à avoir dans chaque achat une part de marché dédiée aux startups, indique-t-elle. L'attente des startups « est que nous les traitions comme des adultes, de leur réserver une part du marché institutionnel et de leur faire confiance », souligne-t-elle, en insistant sur la nécessité de ne pas créer d'antagonisme entre l'industrie établie et le New Space. « Nous pouvons combiner les meilleures idées », estime-t-elle.

Un point de vue partagé par les responsables de ces startups, qui préfèreraient avoir des contrats plutôt que des subventions ou des investissement directs. Le problème en Europe « n'est pas le manque d'argent mais le manque de contrats sur le marché institutionnel », souligne David Henri. « Nous acceptons de prendre le risque. Et si nous ne livrons pas, nous ne sommes pas payés », rappelle Nicolas Capet. « Nous sommes là pour développer de nouvelles solutions. Si nous n'avons pas la possibilité de démontrer que nous pouvons le faire, nous échoueront à coup sûr ». Pour Jürgen Ackermann, délégué du pôle Europe de Prométhée, une startup dédiée à l'observation de la Terre, l'Europe gagnera à soutenir les jeunes pousses puisqu'elle pourra « s'appuyer sur les services à valeur ajoutée des nouveaux acteurs spatiaux européens ».

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Commentaire 1
à écrit le 09/07/2021 à 13:04
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Jean Jacques Dordain, payé 20000€/mois et exempté de taxes en tant que DG d'une institution internationale, est il le mieux placé pour donner des conseils en "prise de risque"? Pareil pour toutes ces initiatives publiques qui proposent de générer des...

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