L'Allemagne devient le premier contributeur de l'Agence spatiale européenne (ESA)

Berlin a affirmé son ambition spatiale en devenant le premier contributeur au budget de l'ESA (3,29 milliards d'euros). Loin, très loin devant la France (2,6 milliards).
Michel Cabirol
A Séville, l'Allemagne triomphe à l'issue de la conférence ministérielle de l'Agence spatiale européenne (ESA)
A Séville, l'Allemagne triomphe à l'issue de la conférence ministérielle de l'Agence spatiale européenne (ESA) (Crédits : ESA)

Un drapeau allemand flotte sur Séville... Celui du triomphe de l'Allemagne. Berlin avait caché la copie sur le montant de sa contribution avant la conférence ministérielle de l'Agence spatiale européenne (ESA), qui s'est déroulée les 27 et 28 novembre à Séville (Space19+). Et pour cause : elle devient, loin devant la France, la première nation contributrice au budget de l'ESA sur cinq ans : 3,29 milliards d'euros, soit 22,9% du budget de l'Agence spatiale européenne (14,38 milliards d'euros au total accordés à des programmes spatiaux européens). Soit 630 millions d'euros de plus que la France, qui a très largement perdu sa place historique de leader européen avec 2,664 milliards (18,5% du budget de l'ESA) même si elle a pu rajouter 160 millions d'euros au 2,5 milliards d'euros prévus avant la conférence ministérielle.

Aujourd'hui, la France est même talonnée par l'Italie, qui a réalisé un très gros effort financier en mettant sur la table de l'Europe spatiale 2,282 milliards (15,9%). Suivent dans le top cinq des contributeurs de l'ESA, le Royaume Uni avec 1,655 milliard (11,5%) et, enfin, l'Espagne avec 852 millions d'euros (5,9%).

Mais la France reste en tête sur les trois prochaines années...

Face au bulldozer allemand, la France a tenté de minimiser l'effort financier de Berlin. "Facialement, les Allemands ont mis plus, a admis le président du CNES, Jean-Yves Le Gall interrogé par La Tribune. Mais, explique-t-il pour tempérer le triomphe allemand de Séville, "nos contributions annuelles sont supérieures". Ce que confirme le ministère de la Recherche : "sur les trois prochaines années, la France reste en tête".  Mais les effets de ce leadership allemand se verront beaucoup plus sur le long terme...Si pour l'Europe spatiale cette manne financière est une bénédiction, les industriels français vont quant à eux devoir apprendre à passer après leurs partenaires allemands en raison du fameux juste retour géographique qui, certes, doit évoluer mais qui est encore en vigueur au sein de l'ESA. Une réflexion doit être lancée pour améliorer ce principe, a d'ailleurs précisé Jean-Yves Le Gall à La Tribune.

En dépit de cette désillusion, la France a obtenu pour la filière lanceurs, l'une de ses priorités, ce qu'elle voulait : soit 2,23 milliards plus 512 millions d'euros pour le port spatial de l'Europe basé à Kourou (Centre spatial guyanais). Une satisfaction pour les Français, qui ont mis sur le pas de tir plusieurs démonstrateurs comme le futur moteur bas coût Prometheus, qui a déjà engrangé plusieurs dizaines de millions d'euros, l'étage supérieur ultraléger en carbone Icarus et l'étage réutilisable Thémis. C'est le cas également de Callisto.

Record d'engagements financiers

"On a battu tous les records en termes d'engagements financiers", s'est félicité Jean-Yves Le Gall. Ce budget de 14,38 milliards d'euros, en hausse de 40% par rapport au précédent conseil ministériel, atteint une somme inégalée depuis la fondation de l'organisation intergouvernementale, en 1975. Il va permettre de financer les nouveaux programmes spatiaux sur une durée de trois à cinq ans. "C'est un pas de géant pour l'Europe parce que ce n'était pas évident de parvenir à tels engagements dans le contexte économique que l'on connait des Etats membres de mettre autant d'argent et de sursouscrire finalement aux propositions que l'ESA avaient faites", a-t-il expliqué à La Tribune.

Les États membres de l'ESA ont donc entériné une série de programmes qui vont permettre de garantir, pour les années 2020, l'autonomie de l'Europe en matière d'accès à l'espace et d'utilisation de ce dernier, de stimuler la croissance de l'économie spatiale européenne, et de réaliser des découvertes décisives pour la connaissance de la Terre, du Système solaire et de l'Univers. Sans oublier un enjeu essentiel : intensifier les efforts déjà entrepris pour assurer la sécurité et la protection de notre planète.

Un effort sans précédent pour le programme scientifique

Pour la première fois depuis 25 ans, une augmentation budgétaire significative a été accordée au Programme scientifique (2,82 milliards). L'ESA pourra ainsi mettre en orbite LISA, le premier observatoire spatial d'ondes gravitationnelles, mener à bien la mission Athena , qui consistera notamment à étudier les trous noirs, et faire avancer de façon considérable la compréhension des phénomènes physiques fondamentaux de l'Univers. Les États ont également investi dans la préparation des missions à venir, en allouant des financements supplémentaires conséquents aux activités de recherche et développement, ainsi qu'aux laboratoires de l'ESA.

Sur l'exploration spatiale, l'Europe, aux côtés de ses partenaires internationaux, continuera à repousser les frontières : poursuite de sa participation aux activités de la Station spatiale internationale jusqu'en 2030 et mise au point des modules de transport et d'habitation cruciaux pour le Gateway, un projet inédit de station orbitale lunaire. Les astronautes de l'ESA recrutés en 2009 continueront à être affectés à des missions jusqu'à ce qu'ils aient tous effectué un deuxième séjour dans l'espace. Des astronautes européens s'envoleront à destination de la Lune pour la première fois. Ainsi les ministres ont confirmé la participation de l'Europe à une mission pionnière de retour d'échantillons martiens, en coopération avec la NASA.

Soutien à la compétitivité européenne

L'ESA permettra aux entreprises innovantes et aux gouvernements des États membres de tirer parti de l'exploitation commerciale de l'espace. Pour ce faire, elle favorisera ainsi la compétitivité de l'Europe dans le contexte du NewSpace : développement des premiers systèmes satellitaires entièrement flexibles, conçus pour être intégrés dans les réseaux 5G, ainsi que des technologies optiques de prochaine génération, destinées au réseau communément appelé fibre optique de l'espace. Ces innovations devraient marquer un tournant dans le secteur des télécoms par satellite. En mettant ces technologies au service de la navigation, l'ESA commencera à mettre au point des systèmes de navigation destinés à l'exploration de la Lune.

Dans le domaine du transport spatial, les ministres ont veillé à ce que la transition avec la prochaine génération de lanceurs - Ariane 6 et Vega C - se fasse sans heurts, et ont donné leur feu vert à la poursuite du projet Space Rider, qui dotera l'Europe d'un véhicule spatial réutilisable. Enfin, les États membres de l'ESA se sont engagés en faveur d'une utilisation responsable de l'environnement, sur notre planète comme dans l'espace. Dans le domaine de l'observation de la Terre, l'ESA confortera sa position de chef de file mondial en mettant en œuvre 11 nouvelles missions, portant notamment sur des thèmes liés au changement climatique, à l'Arctique et à l'Afrique.

Michel Cabirol

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Commentaires 24
à écrit le 02/12/2019 à 22:02
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Soyons pragmatique pour une fois. Ne faisons pas la fine bouche face à la participation en hausse et massive de la riche Allemagne. On a aussi le droit de passer de tps en tps la main en matière de leadership, ça permet de prendre du recul et d'alle...

le 10/12/2019 à 18:50
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Galileo est un programme de l'Union européenne et non de l'ESA, qui en a la maîtrise d'ouvrage.

à écrit le 01/12/2019 à 9:08
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Pour se qui est de la françe est s,est probleme dè fonction publique , cela ne peux plus durer , la réforme est obligatoire , remise au travail du personnel , que les 35 heures soit effectivement du travail et non des pose café, des palabres dans les...

à écrit le 30/11/2019 à 18:43
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Vous ne pouvez pas en même temps donner 3 milliards par an pour permettre à une poignée de cheminots d'avoir une retraite en or, 4 milliards avec la RATP pour le même motif, et en même temps rivaliser avec l'Allemagne où tout a DÉJÀ été réformé depui...

à écrit le 29/11/2019 à 15:22
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L’Allemagne première contributrice à l'ESA ok. Mais sans la base de lancement à Kourou, l'ESA ferait beaucoup, beaucoup moins de choses.. C'est la France qui finance la base à 80% en plus d'être le 2ème pays en terme de contribution pour l'ESA Don...

le 01/12/2019 à 14:44
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Ce qui compte ce sont les retombées industrielles et après trois ans les allemands en auront beaucoup plus que nous. Il y a rien de grave en absolu si dans un seul autre secteur la France etait au niveau, mais l'Allemagne va dominer au niveau indust...

le 02/12/2019 à 23:41
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Ds ce domaine comme ds bcp d'autres, l'Allemagne n'est pas notre ennemie. C'est notre 1er client en matière d'exportation de bien industriels et les composants et biens de hte technologie aéronautique, spatial, militaire, robotique, informatique en f...

le 10/12/2019 à 18:54
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@Réponse de Reponse à Adieu BCE : l'Allemagne n'est pas notre ennemie mais notre rivale sur le plan économique et de leadership sur l'Europe. Donc cela reste une compétition. Et nous commençons à baisser pavillon dans le domaine spatial.

à écrit le 29/11/2019 à 14:46
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Si vous voulez avoir des informations sur l'actualité spatiale ,allez sur Youtube et tapez Hugo Lisoir ,il fait 2 chroniques par semaine ,le mardi et le jeudi.

à écrit le 29/11/2019 à 13:08
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Après tout, Von Braun est le père de la conquête spatiale! L'Afrique, je vois pas trop l'intérêt de dépenser encore de l'argent pour ce continent? Doz ne parle que de technologies, mais il est à coté de la plaque, la technologie n'a pas de sens si ...

le 29/11/2019 à 19:32
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Fon Braun qui a bien voler la fusee de monsieur Gottard.

le 03/12/2019 à 0:30
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Bruno, expliquez nous comment" la republique des soviets qui nous administre" a raflé pdt 20 ans à partir des années 2000, et c'est pas fini, plus de 50% du marché de lancement des satellites à travers Arianespace, à la barbe d'une industrie US ultra...

à écrit le 29/11/2019 à 11:13
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C'est normal puisque la grande Allemagne domine l'europe

à écrit le 29/11/2019 à 9:03
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Quand une organisation dépensière renfloue une organisation dépensière avec un argent qui ne lui appartient pas. J'ai souvenir d'articles de presse il y a quelques mois qui montraient combien ce secteur européen croulait sous les frais fixes et les c...

le 29/11/2019 à 11:07
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Frank; vous en avez de la chance d'avoir "bossé" dans une planque bien rémunérée, peut-être parce-que les générations d'avant avaient bien fait leur boulot. Mais de mon temps, être "planqué" ce n'était vraiment pas une référence et on ne s'en serait ...

le 29/11/2019 à 12:29
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@didier bernadet J'ai oublié de préciser que je n'étais pas candidat à la BMW série 5 dès mon premier poste. Je me suis contenté de regarder les étoiles et de cotiser à l'Europe spatiale comme tout le monde.

à écrit le 28/11/2019 à 23:07
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Comment ça très loin devant la contribution française ? la différence entre les deux contributions ne représente que 5% du montant global, soit 700 millions d'euros, une différence qui me semble pas si énorme que ça pour le budget d'un état. ça ne...

à écrit le 28/11/2019 à 21:51
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Arrêtez de raconter des âneries sur les allemands , il y a 1000 soldats allemands au mali avec hélicoptères et blindés légers .L'émission TV , C dans l'air a parlé du Mali cette semaine , on a cité la présence d'Anglais , d'unités nordique et balte...

le 28/11/2019 à 22:40
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laissez tomber, un complexe d'infériorité tout a fait justifié, tous les cadres et dirigeant francais roulent en berline allemande tout en ce moquant de leur industrie... qui fume ! En attendant sans les machines allemandes point de voitures franç...

à écrit le 28/11/2019 à 20:45
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Les allemands préfèrent investir dans le spatial mais refusent de nous aider au Mali. Nous sommes obligés de dépenser beaucoup d'argent pour la défense de l'UE. Normal que nous n'ayons plus les moyens d'investir dans des secteurs d'avenir.

le 28/11/2019 à 22:35
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Faut oser, il y en a qui n'ont pas peur du ridicule. Si on est embourbé au Mali c'est par ce que notre armée répond aux ordre de BHL et a détruit la lybie, libérant les méchants et leur offrant des tonnes d'armes et de munition...

le 29/11/2019 à 13:04
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Daech n'a pas grand chose à voir avec DHL , notre armée défend l'UE et l’Allemagne participe peu financièrement pour lutter contre le terrorisme. Pour la Libye, vous avez raison , même raisonnement pour l'intervention américaine en Syrie et Irak.. L...

le 02/12/2019 à 0:01
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@BA: il ne faut pas oublier que la France s‘est engagée au Mali sans se coordonner avec personne, François Hollande invoquant la souveraineté nationale (le terme „souveraineté européenne“ n‘était pas encore en vogue). Les Allemands comme bien d‘autre...

à écrit le 28/11/2019 à 18:55
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Ah parce que c'est la première fois qu'ils dépensent plus que les autres !? Mais enfin ça fait combien de temps que l'Allemagne est la première puissance économique de l'UE ??? L'UE, ce gros machin incompréhensible...

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