SCAF : Comment Dassault Aviation et Airbus se sont répartis le développement du NGF

Dassault Aviation obtient environ 38 % de la charge de travail du NGF (Next Generation Fighter) sur l’ensemble des lots stratégiques et secondaires dans le cadre de la phase 1B du programme SCAF, selon un document de l’organisation patronale allemande dans l'aéronautique, le BDLI. Pour sa part, Airbus aura 62%, répartis entre l'Allemagne (32%) et l'Espagne (30%).
Michel Cabirol
Pour cette phase 1B, l'Allemagne, l'Espagne et la France ont prévu de financer le NGF (Next Generation Fighter) durant la phase 1B à hauteur d'environ 700 millions d'euros (hors développements nationaux).
Pour cette phase 1B, l'Allemagne, l'Espagne et la France ont prévu de financer le NGF (Next Generation Fighter) durant la phase 1B à hauteur d'environ 700 millions d'euros (hors développements nationaux). (Crédits : Dassault Aviation / Eridia Studio / V. Almansa)

Le futur avion de combat européen (NGF, Next Generation Fighter) est le pilier le plus emblématique du programme SCAF (Système de combat aérien du futur), qui a été partagé en sept piliers dans le cadre de cette coopération (2,5 milliards d'euros pour 18 démonstrateurs, selon le BDLI, équivalent allemand du GIFAS). Au total cette phase coûtera aux Etats participants au SCAF 3,5 milliards d'euros, le delta (1 milliard) représentant la part des développements nationaux de Berlin, Madrid et Paris. Cela a été également le pilier, qui a généré le plus de tensions entre d'une part, les deux industriels Dassault Aviation, qui assure la maîtrise d'oeuvre du NGF, et Airbus (Airbus Allemagne et Airbus Espagne en tant que partenaires principaux), et d'autre part, entre la France et l'Allemagne.

Après s'être écharpés sur la place publique, comment les deux industriels se sont finalement répartis la charge de travail sur le NGF, qui a l'ambition d'être l'un des tous premiers avions de combat de 6e génération, dans le cadre de la phase 1B (2021-2024) et également dans une approche de travail collaboratif. Comment se sont-il également entendus pour faire vivre les mécanismes de décisions (gouvernance) ? Pour cette phase 1B, l'Allemagne, l'Espagne et la France ont prévu de financer à hauteur d'environ 700 millions d'euros (hors développements nationaux) le NGF durant la phase 1B, selon un document du BDLI rédigé à l'issue des négociations en mai dernier. Par ailleurs, la phase 2 du démonstrateur (2024 à 2027), qui sera équipé du M88 (moteur du Rafale), devrait être négociée à partir de 2023 et sera donc soumise au Parlement allemand.

80% du programme exécutés conjointement

Après des mois de négociations tendues et difficiles, le résultat assure, estime-t-on en Allemagne, "un développement conjoint de l'avion grâce à une répartition équitable des tâches". Il permet notamment à l'Allemagne de participer à tous les lots de travaux d'importance stratégique et technologique (31 au total). Il permet à Airbus "de maintenir les capacités existantes en Allemagne et de développer des compétences pertinentes pour l'avenir", assure-t-on au BDLI. Selon les termes de l'accord, 25 des 31 principaux lots, soit 80% de ce pilier, sont exécutés conjointement, y compris celui sur le cockpit, précise le BDLI.

En outre, Dassault Aviation prend la direction industrielle de quatre lots (commande de vol, architecture système, méthodes & outils et capacité de camouflage). De son côté, Airbus Deutschland dirigera les travaux d'un lot (capteur de mission) et Airbus Espagne un autre (avionique). C'était un des points de blocage extrêmement durs de la négociation. Alors qu'Airbus souhaitait récupérer la maîtrise d'oeuvre de deux lots stratégiques sur le NGF, l'un pour Airbus Allemagne, l'autre pour Airbus Espagne, Dassault Aviation s'y était alors refusé.

Sur ce pilier, Dassault Aviation obtient environ 38 % de la charge de travail sur l'ensemble des lots stratégiques et secondaires dans le cadre de la phase 1B. La part d'Airbus Deutschland s'élève à 32 % et celle d'Airbus Espagne à 30 %, selon le BDLI. En Allemagne, l'organisation patronale de la filière aéronautique considère que les négociations ont garanti "la présence des entreprises dans tous les work packages, évitant ainsi l'émergence de silos nationaux et de boîtes noires technologiques. Ceci est conforme à l'esprit européen du SCAF : le travail ne se fait pas au niveau national, mais en collaboration".

Décisions conjointes

En principe, toutes les décisions sur ce pilier seront prises de façon conjointe. En outre, les industriels ont mis en place un mécanisme de réduction des risques dans la gouvernance du pilier. Ainsi afin d'assurer le bon déroulement du pilier, il a été convenu qu'en cas de blocage et de différends, Dassault Aviation puisse prendre une décision provisoire (vote prépondérant) pour éviter toute perturbation dans la poursuite du NGF. Mais ces décisions pourront toutefois être annulées si nécessaire une fois la crise résolue.

En outre, par rapport aux autres piliers, un organe technique consultatif supplémentaire a été créé pour le pilier NGF sous la forme d'un « Senior Technical Board » impliquant Airbus Deutschland, Airbus Espagne et Dassault Aviation. Cet organe est destiné à assurer un fonctionnement efficace au niveau opérationnel et à garantir l'obtention d'un consensus sur une base technique et programmatique.

Michel Cabirol

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Commentaires 10
à écrit le 25/04/2023 à 19:29
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A tout ceux qui veulent savoir comment fonctionne une coopération avec les Allemands: Voir L'EPR , lancé en 1989 après avoir évincé Alsthom et EDF pour prendre Siemens.

à écrit le 08/09/2021 à 13:38
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Un beau bazar en perspective en effet. Connaissant les performances technologies des Espagnols (lol) et la rigidité des Allemands en ingénierie ça va être qq chose

à écrit le 01/09/2021 à 10:54
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de beaux surcouts et retards en perspective en mode retours géographiques de l'ESA pour le spatial ..!

à écrit le 30/08/2021 à 20:48
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Dommage que ce soit Airbus le chef de file. Sa seule et unique réalisation dans le domaine des avions d'armes, l'Eurofighter, n'est pas une réussite éclatante. Dassault a largement plus de légitimité dans ce domaine.

le 17/03/2022 à 15:59
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Le chef de file est AIRBUS car c'est une exigence Allemande et accepter par les Français qui courts après l'utopie de la défense Européenne. Les Allemands se frottent les mains ils vont pouvoir pomper toute la technologie Française payée en partie pa...

à écrit le 30/08/2021 à 18:13
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Bref : après un fantastique tir de barrage médiatique, dans ces colonnes et dans bien d'autres, qui annonçait un échec pour toutes sortes de très bonnes raisons émises par les experts des salons parisiens, le projet a l'air de vouloir fonctionner. U...

le 31/08/2021 à 22:22
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Sacrifier notre industrie de défense au nom de l'Europe je n'appelle pas cela une victoire. Nos voisins ne le font pas, on doit sabrer le champagne outre-Rhin car Berlin sait défendre les intérêts de ses industriels. Thalès et Safran notamment sont b...

à écrit le 30/08/2021 à 16:01
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@ M. Cabriol, ou si quelqu'un sait : comme je pense qu'il manque un mot je ne suis pas sûr de bien comprendre: [Citation]"De son côté, Airbus Deutschland dirigera les travaux d'un lot (capteur de mission) et Airbus Espagne (avionique). C'é...

à écrit le 30/08/2021 à 15:34
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Cela va dire quoi décision conjointe ? Cela ressemble à la responsabilité collective ça.

le 31/08/2021 à 7:08
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Cela veut dire, que lorsqu'on vend quelques Rafales, de temps en temps et quelques Falcons, devant le poids d'Airbus, on accepte le deal....

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