Le futur avion de combat européen (NGF, Next Generation Fighter) est le pilier le plus emblématique du programme SCAF (Système de combat aérien du futur), qui a été partagé en sept piliers dans le cadre de cette coopération (2,5 milliards d'euros pour 18 démonstrateurs, selon le BDLI, équivalent allemand du GIFAS). Au total cette phase coûtera aux Etats participants au SCAF 3,5 milliards d'euros, le delta (1 milliard) représentant la part des développements nationaux de Berlin, Madrid et Paris. Cela a été également le pilier, qui a généré le plus de tensions entre d'une part, les deux industriels Dassault Aviation, qui assure la maîtrise d'oeuvre du NGF, et Airbus (Airbus Allemagne et Airbus Espagne en tant que partenaires principaux), et d'autre part, entre la France et l'Allemagne.
Après s'être écharpés sur la place publique, comment les deux industriels se sont finalement répartis la charge de travail sur le NGF, qui a l'ambition d'être l'un des tous premiers avions de combat de 6e génération, dans le cadre de la phase 1B (2021-2024) et également dans une approche de travail collaboratif. Comment se sont-il également entendus pour faire vivre les mécanismes de décisions (gouvernance) ? Pour cette phase 1B, l'Allemagne, l'Espagne et la France ont prévu de financer à hauteur d'environ 700 millions d'euros (hors développements nationaux) le NGF durant la phase 1B, selon un document du BDLI rédigé à l'issue des négociations en mai dernier. Par ailleurs, la phase 2 du démonstrateur (2024 à 2027), qui sera équipé du M88 (moteur du Rafale), devrait être négociée à partir de 2023 et sera donc soumise au Parlement allemand.
80% du programme exécutés conjointement
Après des mois de négociations tendues et difficiles, le résultat assure, estime-t-on en Allemagne, "un développement conjoint de l'avion grâce à une répartition équitable des tâches". Il permet notamment à l'Allemagne de participer à tous les lots de travaux d'importance stratégique et technologique (31 au total). Il permet à Airbus "de maintenir les capacités existantes en Allemagne et de développer des compétences pertinentes pour l'avenir", assure-t-on au BDLI. Selon les termes de l'accord, 25 des 31 principaux lots, soit 80% de ce pilier, sont exécutés conjointement, y compris celui sur le cockpit, précise le BDLI.
En outre, Dassault Aviation prend la direction industrielle de quatre lots (commande de vol, architecture système, méthodes & outils et capacité de camouflage). De son côté, Airbus Deutschland dirigera les travaux d'un lot (capteur de mission) et Airbus Espagne un autre (avionique). C'était un des points de blocage extrêmement durs de la négociation. Alors qu'Airbus souhaitait récupérer la maîtrise d'oeuvre de deux lots stratégiques sur le NGF, l'un pour Airbus Allemagne, l'autre pour Airbus Espagne, Dassault Aviation s'y était alors refusé.
Sur ce pilier, Dassault Aviation obtient environ 38 % de la charge de travail sur l'ensemble des lots stratégiques et secondaires dans le cadre de la phase 1B. La part d'Airbus Deutschland s'élève à 32 % et celle d'Airbus Espagne à 30 %, selon le BDLI. En Allemagne, l'organisation patronale de la filière aéronautique considère que les négociations ont garanti "la présence des entreprises dans tous les work packages, évitant ainsi l'émergence de silos nationaux et de boîtes noires technologiques. Ceci est conforme à l'esprit européen du SCAF : le travail ne se fait pas au niveau national, mais en collaboration".
Décisions conjointes
En principe, toutes les décisions sur ce pilier seront prises de façon conjointe. En outre, les industriels ont mis en place un mécanisme de réduction des risques dans la gouvernance du pilier. Ainsi afin d'assurer le bon déroulement du pilier, il a été convenu qu'en cas de blocage et de différends, Dassault Aviation puisse prendre une décision provisoire (vote prépondérant) pour éviter toute perturbation dans la poursuite du NGF. Mais ces décisions pourront toutefois être annulées si nécessaire une fois la crise résolue.
En outre, par rapport aux autres piliers, un organe technique consultatif supplémentaire a été créé pour le pilier NGF sous la forme d'un « Senior Technical Board » impliquant Airbus Deutschland, Airbus Espagne et Dassault Aviation. Cet organe est destiné à assurer un fonctionnement efficace au niveau opérationnel et à garantir l'obtention d'un consensus sur une base technique et programmatique.
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