Stratobus, le "game changer" de Thales toujours en salle d'attente

Le dirigeable stratosphérique attend toujours son financement. Et sa commercialisation attendra. "Pas avant fin 2021", indique à La Tribune le PDG de Thales Alenia Space, Hervé Derrey.
Michel Cabirol
Le temps d'observation très prolongé, permis par Stratobus, et ses fonctions de relais de transmissions devraient être de véritables atouts, entre autres, dans la conduite des opérations militaires.

Avec Stratobus, Thales Alenia Space (TAS) avance prudemment. Peut-être trop. Alors que ce dirigeable stratosphérique de la famille des HAPS (High Altitude Platform System) semble être un véritable "game changer" sur certains théâtres d'opération comme la bande sahélo-saharienne (BSS) pour l'armée française, la filiale spatiale de Thales (67%) et de Leonardo (33%) prend tout son temps. Tout comme le ministère des Armées d'ailleurs. Il devait être mis en service à l'horizon 2020. Il ne l'a finalement pas été. Quand sera-t-il commercialisé ? "On va être prudent tant qu'on n'a pas une bonne visibilité sur le financement complet. Cela viendra effectivement un peu plus tard, répond à La Tribune le PDG de TAS, Hervé Derrey. Mais clairement pas avant fin 2021". Pour se lancer, TAS compte sur un financement du Fonds européen de défense pour développer Stratobus, dont le coût de développement est estimé entre 100 et 150 millions d'euros.

"L'objectif serait de s'appuyer sur le Fonds européen de défense et les programmes associés, explique Hervé Derrey. C'est vraiment notre stratégie sur laquelle on est en train de travailler de façon à asseoir complètement ce projet. Il faut qu'on arrive à boucler complètement boucler son financement tout simplement" pour lancer Stratobus.

A force d'attendre un financement public, le Stratobus ne va-t-il finalement pas rater le très précieux "time to market" ? "Si on regarde les autres initiatives du même type, nous avons quand même toujours une assez grande avance avec le concept que nous proposons, estime Hervé Derrey. Il existe d'autres concepts, qui pourraient être potentiellement complémentaires au nôtre mais avec des missions sur des durées de permanence un peu plus courtes. On ne voit pas d'autres projets équivalents ayant un positionnement identique au nôtre. Je n'ai pas cette inquiétude aujourd'hui très franchement".

"Une preuve de concept très solide"

En dépit du Covid-19, Thales Alenia Space a poursuivi ses travaux sur son projet en 2020. TAS ce a avancé sur le concept du Stratobus, qui reste encore un projet dans sa phase d'études. "On a une preuve de concept très solide, qui démontre que ce projet est complètement viable techniquement", précise le PDG de TAS. Ainsi, la filiale entre Thales (67%) et Leonardo (33%) a démontré la faisabilité du projet avec de nombreuses démonstrations, dont une avec un essai de déchirure d'un dirigeable de 13 mètres de diamètre en vol en septembre dernier. Un essai en présence du CNES et de CNIM, maison mère d'Airstar Aeropace en charge de l'enveloppe du dirigeable.

TAS a également quasiment terminé le contrat signé en 2016 avec Bpifrance, qui finance ce projet à hauteur de 16,6 millions d'euros, via le Programme d'investissements d'avenir (PIA). Ce financement couvrait la phase de mise au point des technologies clés pour une durée initiale de 24 mois. Cette phase doit se conclure en 2021 par la réalisation d'un démonstrateur technologique de 40 mètres de diamètre. En 2018, la région Provence Alpes côte d'Azur a elle aussi apporté plus de trois millions d'euros via le fonds européen FEDER. Enfin, TAS a exécuté fin décembre le contrat d'étude de concept (PEA) signé en janvier 2020 avec la Direction générale de l'armement (DGA). Il portait sur les applications ISR (Intelligence, Surveillance et Reconnaissance) à partir de la plateforme Stratobus et destinées à répondre aux besoins opérationnels des armées françaises.

Une capacité opérationnelle de rupture

Le temps d'observation très prolongé, permis par Stratobus, et ses fonctions de relais de transmissions devraient être de véritables atouts, entre autres, dans la conduite des opérations militaires. Par exemple dans la BSS. A condition que la France y reste un peu de temps encore. Le Stratobus est efficace à la condition de posséder une supériorité aérienne sinon il reste très vulnérable. Doté de quatre moteurs électriques alimentés par des panneaux solaires le jour et des batteries la nuit, il est totalement autonome en énergie et peut rester en position pendant une année entière. Dans des conditions optimales, il peut emporter une charge utile allant de 250 à 450 kg.

Stationné juste au-dessus du trafic aérien à 20 km d'altitude (couche basse de la stratosphère), soit bien plus près de la Terre qu'un satellite, Stratobus peut assurer des missions civiles et de défense dans les domaines des télécoms, de la surveillance, de l'observation et de la navigation. Ce ballon dirigeable de 85.000 m3 répond aux besoins de surveillance des frontières, de sites critiques sur terre comme sur mer (vidéo protection des plates-formes off-shore). Il adresse également le besoin de sécurité militaire (lutte contre le terrorisme, les trafics de stupéfiant) ainsi que le contrôle environnemental (feux de forêts, érosion des plages, pollutions...) et télécommunications (internet, 5G). Un véritable "game  changer" à condition de le lancer...

Michel Cabirol

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Commentaires 8
à écrit le 13/01/2021 à 7:33
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Un projet mort-né, ce truc se verra comme le nez au milieu de la figure, même dans la stratosphère....mais bon il faut bien financer les entreprises françaises... à tout prix...

à écrit le 12/01/2021 à 20:48
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On ne trouve pas 150 MEUR et on va quémander l'UE!!! C'est à pleurer.

à écrit le 12/01/2021 à 16:21
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Une bien belle idée pour une série SF voir fantastique sur netflix non ? Vu que radicalement différent des habituels engins que l'on connaît prévus pour aller dans l'espace, franchement il y a un truc à faire de ce côté là ! Bon par contre ne pas ...

à écrit le 12/01/2021 à 13:29
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Les américains n'ont aucune envie d'en découdre avec ce type de projet. La cible, ce sont les groupes terroristes. Il faut le voir comme un drone XXL. On pourra s'en servir pour du renseignement, voire des frappes. Si celui ci vole à une al...

le 12/01/2021 à 16:24
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"Les américains n'ont aucune envie d'en découdre avec ce type de projet. " Et puis franchement si on est malin on fait pas la guerre aux américains qui ont démontré pouvoir abattre n'importe qui n'importe où et ça nos oligarchies elles l'ont bien...

à écrit le 12/01/2021 à 7:00
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Les ricains doivent bien rire en voyant cette "innovation. Un simple missile et hop au tapis.

le 12/01/2021 à 8:55
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c est comme les drones, pas fait pour se battre contre des armees modernes mais contre des terroristes ou des low tech genre taliban. Ceux ci sont pas capable d abattre des drones et encore moins un dirigeable volant dans la startosphere

le 12/01/2021 à 9:31
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Reste a savoir quelle peut être la signature radar ou thermique d'un tel engin.

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