Une petite éclaircie pour les salariés d'Alvance Wheels, le producteur de jantes de roues basé à Diors dans l'agglomération castelroussine. Placée en redressement judiciaire en avril à la demande de son propriétaire depuis 2018, le conglomérat minier anglo-indien Gupta Family Group Alliance, l'entreprise, fournisseur notamment de Renault et Peugeot-Stellantis, suscite des convoitises. Selon des sources concordantes, l'équipementier Saint Jean-Industrie, basé à Belleville en Beaujolais dans le Rhône, pourrait adresser une offre de reprise d'ici au 21 décembre au tribunal de commerce de Paris. Elle comprendrait la reprise d'environ 50% des salariés soit 135 salariés sur 270, ainsi qu'un investissement de l'ordre de 40 millions d'euros sur cinq ans. A la clé, la remise à niveau de l'outil industriel, largement obsolète, d'Alvance Wheels afin de gagner en productivité mais aussi en fiabilité. Une partie des sommes investies servirait aussi à renflouer la trésorerie de la société.
Bras de fer avec Renault et Peugeot
ETI familiale, présidée par Emile di Serio et spécialisée notamment dans la fabrication des châssis et suspensions de voitures, Saint Jean industrie conditionne toutefois sa proposition à un engagement ferme des deux constructeurs de commander un million de roues d'ici 2024. Le point d'équilibre financier d'Alvance Wheels serait situé à ce niveau. Or pour l'instant, Renault, et surtout Peugeot, restent assez flous au niveau des quantités.
« Dans ces conditions, on ne peut être certain d'une reprise du site, même avec moitié moins d'effectifs, reconnaît Gil Averous, président de Châteauroux Métropole. Nous restons raisonnablement confiants mais prudents ».
« De leur côté, les constructeurs conditionnent le montant de leurs commandes à la réalité des investissements de Saint Jean industrie, assure un délégué syndical d'Alvance Wheels. L'issue de ce bras de fer larvé restera donc incertaine encore trois semaines et on ne peut exclure une mauvaise surprise jusqu'au dernier moment » . Ainsi, Renault, sollicité par l'Etat pour soutenir le plan de reprise de la Société aveyronnaise de métallurgie (SAM) à Décazeville dans l'Aveyron, s'est retiré du projet le 24 novembre.
Alors qu'un expert du secteur automobile anticipe une diminution de 40% du nombre de pièces dans les futurs véhicules électriques par rapport aux modèles thermiques, les constructeurs rechignent à s'engager à long terme aux côtés de sous-traitants, même dotés d'un savoir-faire unique.
Mobilisation générale
Si Renault et Peugeot restent prudents, l'activisme du cabinet de la ministre déléguée à l'industrie, Agnès Pannier-Runacher, pour trouver une solution est lui incontestable. Ce sont ses services qui ont trouvé le potentiel repreneur et l'ont convaincu de s'engager. Le caractère familial et l'assise du groupe équipementier ont été déterminants dans ce choix, afin cette fois d'assurer la pérennité d'Alvance Wheel. Détenu depuis sa création en 1962 par le même actionnaire, la famille Di Serio, Saint Jean industrie opère quatre sites en France, à Belleville-en-Beaujolais, en Lorraine et à Laval en Mayenne. Il est également implanté aux Etats Unis, en Chine, en Espagne et en Allemagne. Solide, la société emploie 1.850 salariés dans le monde et a réalisé un chiffre d'affaires consolidé de 290 millions d'euros en 2020. La mobilisation de l'Etat a été également relayée au niveau des collectivités locales concernées. La région Centre Val de Loire a ainsi promis d'injecter cinq millions d'euros dans le plan de reprise, dont deux millions sous forme d'entrée au capital: une première pour elle. La métropole de Châteauroux accompagnera aussi le repreneur via une enveloppe de 150.000 euros. Cette mobilisation exceptionnelle fait écho au leitmotiv gouvernemental de mettre fin à trois décennies de délocalisation, dont les effets dévastateurs sur la souveraineté nationale ont été mis en exergue lors de la crise sanitaire. Après la liquidation de la SAM en Aveyron, l'arrêt éventuel d'Alvance Wheels pourrait avoir un impact désastreux pour le président-candidat, Emmanuel Macron, qui fera de la réindustrialisation de l'Hexagone l'un des thèmes phare de sa campagne.
Sujets les + commentés