
Dans le cadre du plan de relance présenté jeudi dernier, le monde HLM n'a pas été oublié. Après trois ans de relations conflictuelles avec l'exécutif, sa porte-parole Marianne Louis en est la première surprise. "500 millions d'euros pour la réhabilitation lourde, c'est une enveloppe vraiment intéressante", a déclaré la directrice générale de l'Union sociale pour l'habitat, la première fédération professionnelle du logement social avec 660 organismes représentés, lors de sa conférence de rentrée ce 7 septembre. "Le gouvernement n'est pas hostile à ce qu'on fasse des opérations exemplaires qui peuvent préfigurer une politique de long-terme", a-t-elle ajouté, en référence à d'actuelles discussions entre l'USH et le gouvernement.
Flou sur les critères d'attribution gouvernementaux
Le flou persiste toutefois sur les critères d'attribution de ce montant. "On propose que cette enveloppe soit distribuée par le fonds national des aides à la pierre (FNAP) pour discuter des critères et réaliser une évaluation collective dans les deux ans", a dit Marianne Louis interrogée par La Tribune.
"Après nous avoir ponctionné la moitié de notre autofinancement, soit 1 milliard d'euros, entre 2017 et 2018, l'Etat met dans la machine 500 millions pour qu'elle redémarre", regrette pour sa part Frédéric Paul, DG de l'USH de 2013 à 2018, et auteur d'HLM mon amour (Editions de l'Aube-Lettre HCL). "Est-ce que ce sera des prêts ? Des subventions ? Nous sommes sur une politique d'à-coups qui est la preuve d'une absence de vue à long-terme et de mise en perspective", réagit-il pour La Tribune.
Car selon la dernière étude du service des données et études statiques (SDES) du ministère de la Transition écologique, dont dépend le ministère du Logement, publiée le 2 septembre, il ne reste plus que 7% de passoires thermiques dans les habitats à loyers modérés (HLM). "Le parc social est sensiblement moins énergivore que le parc privé, ce qui s'explique par une forte prévalence du chauffage collectif au gaz, ainsi que par un effort de rénovation ciblé", a ainsi salué le SDES.
"Si on ne modifie pas trop les règles du fonds européen de développement régional (FEDER) et s'il n'y a pas de mauvais coup, on résorbera ces 7% restants d'ici à 2027", a assuré pour sa part Marianne Louis. "Le mouvement est parfaitement capable de mettre fin aux passoires thermiques dans les délais indiqués. Encore ne faudra-t-il pas de signaux contradictoires", abonde Frédéric Paul.
Démolition et construction de logements neufs
Dans le cadre de la programmation des fonds européens 2021-2027, actuellement en cours de négociations entre l'Union européenne et les Etats-membres, l'enveloppe française pour le Feder devrait en outre augmenter d'une centaine de million d'euros. Les conseils régionaux restent, eux, les autorités de gestion de ces fonds structurels.
C'est pourquoi les élections régionales du printemps 2021 pourraient rebattre les cartes au niveau local. "Nos associations régionales discutent déjà avec les exécutifs de même qu'elles mèneront un travail de sensibilisation avec les exécutifs renouvelés", a répliqué la DG de l'USH questionnée par La Tribune.
Pour atteindre l'objectif 2050 de neutralité carbone, le monde HLM entend parallèlement poursuivre sa politique de construction de logements neufs, même si 75% des habitats présents dans 30 ans sont déjà debout et qu'il existe "un hiatus entre l'obligation environnementale de zéro artificialisation nette et les besoins des locataires".
Autrement dit, les bailleurs adhérents de l'Union sociale pour l'habitat, qui affirment détruire près de 10.000 logements par an, vont continuer à en démolir la même quantité dans les dix prochaines années afin d'ériger des immeubles exemplaires sur le plan écologique et thermique. "Nous avons des habitats qui se trouvent dans un environnement urbain qui fonctionne, mais il s'agit de T5 des années 1970, sans ascenseur, ou mal insonorisés", a précisé Marianne Louis. Cette situation se retrouve par exemple dans les quartiers en politique de la ville.
Questionnements sur l'ANRU et Action Logement
Mais même lors du conseil d'administration de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), où siège l'USH, les administrateurs ont appelé l'Etat à redonner des marges de manœuvre à l'agence, ne serait-ce que pour répondre aux besoins des nouveaux élus locaux. Ils considèrent en effet qu'il manque 2 milliards d'euros, mais n'ont obtenu aucune réponse. "Il se profile des prélèvements sur Action Logement. Pour l'instant, on est surpris. De toute évidence, il y a des conciliabules à Bercy", a estimé la DG de l'Union sociale pour l'habitat.
Elle ne croyait pas si bien dire. Peu après la fin de sa prise de parole, l'AFP informait que le gouvernement entendait mettre à contribution l'ex-1% Logement au plan de relance via "un prélèvement de 1 milliard", actant "le principe d'une réforme de fond, qui reste à discuter avec les partenaires sociaux".
Au même moment, par la voix de son directeur général Eric Lombard, la Caisse des Dépôts et des Consignations annonçait, lui, avoir comme objectif "la rénovation thermique de 22 millions de mètres carrés de bâtiments publics et de HLM en métropole et en outre-mer".
En réalité, comme pour toute banque, il s'agit de prêts, à commencer par celui de 1,3 milliard d'euros qui n'a rien de nouveau, puisqu'il est issu du plan Juncker de 315 milliards d'euros lancé en septembre 2015. Une plateforme d'intermédiation sera toutefois lancée le 15 septembre prochain pour que tous les bailleurs, quelle que soit leur taille, puissent y accéder.
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