Rénovation des logements pour tous : faire simple ou compliqué ?

Sur les 35 milliards des 100 milliards d'euros du plan de relance pour la transition écologique, l'Etat met 6,7 milliards pour la rénovation des bâtiments, dont 2 milliards pour les logements privés. Le défi principal sera de simplifier l'accès aux aides afin que tous puissent réellement en bénéficier.
César Armand
(Crédits : Mike Fouque)

Changement de braquet gouvernemental sur la rénovation des logements privés. Après avoir transformé fin 2019 le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) en prime ("Ma Prime Rénov"), tout en excluant les plus riches du dispositif, l'aide sera désormais accessible à l'ensemble des propriétaires occupants ET bailleurs. Ce qui est inédit.

Dans le cadre de la relance de 100 milliards, 2 milliards d'euros seront en effet mobilisés pour soutenir la rénovation globale, la rénovation énergétique des logements pour les propriétaires bailleurs, la rénovation énergétique des logements pour les copropriétés et renforcer le volet "logement" déjà financé par l'Agence nationale de l'Habitat (Anah), le plan "Initiatives Copropriétés" et le programme "Action cœur de ville". Ce dernier sera prochainement complété d'un plan "petite ville de demain".

Prime versus crédit d'impôt

Avant 2020, le CITE permettait de déduire de ses impôts une partie des dépenses engagées pour des travaux d'amélioration écologique. Il était surtout utilisé par les foyers ayant les moyens d'avancer les frais avant qu'ils ne leur soient rétrocédés sous la forme d'un crédit d'impôt. Ce qui pouvait prendre entre un an et an et demi. Ainsi, il profitait surtout aux ménages les plus riches, dont les revenus annuels sont supérieurs à 96.240 euros.

Depuis 2020, à l'inverse du crédit d'impôt capté par les plus aisés, Ma Prime Rénov' est censée permettre aux ménages les plus modestes - dont les revenus annuels sont compris entre 14.000 et 35.000 euros en dehors de l'Île-de-France - de changer un équipement (une chaudière au fioul par exemple, énergivore et peu écologique) et de recevoir de l'argent public dès la fin du chantier.

"On simplifie et on met de l'argent" (Pompili)

En réalité, malgré la volonté gouvernementale de vouloir recentrer l'aide sur les moins riches, comme l'avait préconisé la Cour des Comptes en 2018, le reste à charge de zéro euro a été un vœu pieu, la prime couvrant jusqu'au maximum les deux-tiers de la dépense engagée par le particulier.

"On a mis de l'argent mais tout était très complexe et mal ciblé", a admis la ministre de la Transition écologique et solidaire ce 3 septembre en conférence de presse. "C'est pour ça qu'on ouvre à tout le monde. Ceux qui ont un peu plus de moyens vont faire un peu plus de travaux. On veut massivement augmenter l'efficacité: on simplifie et en même temps, on met de l'argent", a poursuivi Barbara Pompili.

Des modalités "précisées très prochainement"

Sans oublier que la transformation du CITE en prime devait initialement s'échelonner sur 2020 et 2021: d'abord, pour les quatre premiers déciles de ménages cette année, puis pour les quatre suivants (les classes moyennes) l'année prochaine. En 2018 comme en 2019, les cabinets de François de Rugy puis d'Elisabeth Borne expliquaient que "cette mesure est apparue coûteuse et complexe dans son déploiement". Justification : "on ne sait pas tout faire d'un coup. C'est pourquoi on le fait en deux temps".

Si la généralisation de Ma Prime Rénov vise à amplifier et à accroître l'efficacité des aides à la rénovation énergétique des bâtiments privés, "les modalités de l'aide seront précisées très prochainement", est-il écrit dans le document de synthèse des mesures gouvernementales. En attendant, l'exécutif promet également de débloquer 500 millions d'euros pour la réhabilitation lourde des logements sociaux.

 4,8 millions de passoires thermiques

Pourtant, comme le rappelle le gouvernement, "les efforts dans ce domaine doivent être amplifiés pour atteindre l'objectif de rénovation du parc au niveau BBC en 2050, et l'éradication des passoires thermiques à l'horizon 2030". Selon le dernier comptage du service des données et études statistiques du ministère de la Transition écologique, il en resterait près de 4,8 millions !

Depuis le Grenelle de l'Environnement de 2007, les gouvernements successifs se fixent donc un éternel objectif de 500.000 rénovations annuelles. Dans les faits, ce but n'est jamais atteint, les particuliers devant jongler avec une palette d'aides plus incompréhensibles les unes que les autres. A se demander si l'administration ne fait pas exprès de rendre le dispositif si complexe qu'il n'est pas ou peu utilisé, afin qu'il coûte moins cher à l'Etat...

César Armand

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 2
à écrit le 04/09/2020 à 10:59
Signaler
C'est surtout les constructions "légères" ou les bâtisses a grande inertie de température qui devrait être mise a l'honneur car le climat se réchauffant n'impose pas l'isolation hivernale, mais une adaptation aux violences de la nature!

à écrit le 03/09/2020 à 17:58
Signaler
C'est quand même pas trop mal fait même s'il est dommage d'avoir privilégié les grosses boites via le harcèlement des call centers, et du coup d'avoir entaché ce phénomène plutôt vertueux, plutôt qu'une simple information sur l'artisan local ou les a...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.