Logement : les locataires refusent d'être les oubliés de la loi sur le pouvoir d'achat

A la veille du premier tour des élections législatives, la Fondation Abbé Pierre appelle le gouvernement à augmenter de 10% les aides personnalisées au logement. Une demande déjà exprimée le 1er juin à Bercy par les bailleurs sociaux et les propriétaires privés. La Confédération nationale du Logement s'étonne, elle, de n'avoir pas été conviée par l'exécutif pour évoquer la lutte contre l'inflation. « Ils seront reçus par la ministre », rétorque-t-on chez Amélie de Montchalin, chargée de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Explications.
César Armand
La Fondation Abbé Pierre demande à l'exécutif d'augmenter de 10% les aides personnalisées au logement (APL).
La Fondation Abbé Pierre demande à l'exécutif d'augmenter de 10% les aides personnalisées au logement (APL). (Crédits : Charles Platiau)

L'ensemble des associations représentatives des consommateurs et des locataires* était réuni à Bercy le 11 mai dernier, au lendemain de l'investiture du président Macron, à l'invitation du ministre de l'Economie, des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire, et de son ministre délégué chargé des PME, Jean-Baptiste Lemoyne. Objet de la réunion : la lutte contre l'inflation.

Reconduit dans le gouvernement Borne le 20 mai, le désormais ministre de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique a organisé, le 1er juin, un autre tour de table, cette fois avec les agents immobiliers, les administrateurs et gestionnaires de biens, les bailleurs sociaux, les promoteurs et les propriétaires immobiliers. Une seconde réunion qui s'est tenue sans la Confédération nationale du Logement, qui s'étonne de n'avoir pas été conviée.

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Dans les deux cas, le sujet des loyers s'est invité. A chaque fois, le locataire de Bercy a écouté les intervenants les uns après les autres, sans arbitrer quoi que ce soit. Comme d'autres au gouvernement, Bruno Le Maire comme sa collègue Amélie de Montchalin, désormais ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires préparent, pour la Première ministre, le projet de loi sur le pouvoir d'achat ainsi que le projet de loi de finances rectificatives.

Augmenter de 10% les APL

Ces deux textes devraient être présentés par Elisabeth Borne en Conseil des ministres le 29 juin prochain au lendemain du second tour des élections législatives. Sauf que les principaux concernés s'impatientent. Invité de France Info ce 9 juin, le délégué général de la Fondation Abbé Pierre a exhorté l'exécutif à augmenter de 10% les aides personnalisées au logement (APL).

« Ces APL ont été malmenées pendant le quinquennat précédent. Elles ont perdu de leur pouvoir solvabilisateur, de leur impact pour les ménages. Et si on y ajoute maintenant une inflation aux alentours de 5%, il faut qu'elles augmentent de 10%. Il faut que les minima sociaux, dès le mois prochain, dès le projet de loi de finances rectificatives, augmentent également de 10% », a martelé Christophe Robert.

Auteur d'une lettre ouverte à l'attention des ministres Bruno Le Maire et Amélie de Montchalin, le président de la Confédération nationale du Logement (CNL) s'étonne, lui, de n'avoir « été entendu ni même contacté » par la nouvelle équipe gouvernementale, pour participer à la réunion du 1er juin. « Faire preuve d'un quelconque ostracisme concernant les partenaires sociaux serait, aujourd'hui, un déni démocratique qui ne ferait que renforcer la crise institutionnelle déjà aigue dans notre pays. Nous l'interpréterions comme une grave faute politique », écrit Eddie Jacquemart.

La CNL demande le blocage des prix des produits de première nécessité

Considérant que le gouvernement refuse d'augmenter « significativement » le SMIC, les salaires et les retraites, ce dernier demande « le blocage immédiat des prix des produits de première nécessité » au regard de l'inflation : + 44% pour les pâtes, +32% pour les semoules et les céréales, + 25% pour l'huile et + 18% farine. « A ce jour, je n'ai pas obtenu de réponse à mon courrier », affirme le président de la CNL à La Tribune.

« Nous ne voulons pas les écarter. Ils seront reçus par la ministre », rétorque-t-on dans l'entourage d'Amélie de Montchalin. « Nous allons écouter leurs propositions et leurs lignes rouges pour proposer un projet équilibré, avant les arbitrages à Matignon. Le logement rentre évidemment dans le paquet du pouvoir d'achat », poursuit-on au cabinet de la ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.

Un équilibre entre lisibilité, coût économique et coût politique

Du côté du ministre de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, « chacun doit prendre sa part du fardeau de l'inflation », bottait déjà en touche, la semaine dernièrel'entourage de Bruno Le Maire à La Tribune. D'autant que ce dernier, et son ministre délégué chargé des Comptes publics, Gabriel Attal, étaient, encore le 6 juin à Matignon, en réunion de travail avec Elisabeth Borne sur les mesures liées au pouvoir d'achat.

Que va donc faire l'exécutif ? Augmenter les APL comme le demandent les bailleurs sociaux de l'Union sociale pour l'habitat, la Fondation Abbé Pierre et l'Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) ? Pas sûr. « C'est niet car c'est inflationniste » entend-t-on dans les couloirs de Bercy. Geler les loyers, comme en rêvent les associations de consommateurs ? « Une fausse bonne idée » a évacué, dès le 22 mai dans le JDD, la Première ministre.

En attendant, les administrateurs et gestionnaires de bien militent en faveur d'une révision de l'indice de référence des loyers (IRL). Ce dernier sert de base pour réviser les loyers des logements vides ou meublés et fixe les plafonds des augmentations annuelles des loyers que peuvent exiger les propriétaires. Publié par l'Insee le 15 avril dernier, le nouvel IRL s'élève à 133,93 soit une hausse de 2,48% après avoir crû de 1,61% au quatrième trimestre 2021. Il est calculé à partir de la moyenne, sur douze mois, de l'évolution des prix à la consommation, hors tabac.

Une piste très technique qui ne fait pas l'unanimité, là encore. « Le gouvernement va devoir trouver un équilibre entre la lisibilité, le coût économique, le coût politique et les résultats du premier tour des législatives », prédit, auprès de La Tribune, David Rousset, secrétaire général de l'association Force ouvrière consommateurs (AFOC). Une équation à plusieurs inconnues qui sera donc connue avant l'été.

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 *L'association pour la défense des intérêts des consommateurs (ADIC), l'association Force ouvrière consommateurs (AFOC), l'association Consommation Logement Cadre de Vie (CLCV), le Conseil national des associations familiales laïques (CNAFAL), la Confédération nationale du Logement (CNL), les Familles rurales, la fédération Léo Lagrange, l'Information et défense des consommateurs salariés (Indecosa)-CGT et l'Union fédérale des consommateurs (UFC)-Que choisir).

César Armand

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