
Malgré la remontée des taux d'intérêt, la pierre reste une valeur refuge. Selon les dernières données du Conseil supérieur du notariat (CSN), publiées le 31 mai, le volume annuel des transactions dans l'immobilier ancien se stabilise. Entre mars 2021 et mars 2022, le nombre de transactions réalisées est estimé à 1,175 million, tutoyant le record de 1,198 million réalisé entre janvier et novembre 2021. La demande est telle que le prix des logements anciens est, de nouveau, en hausse de 7,3% sur un an : +9,2% pour les maisons et +4,7% pour les appartements.
L'investissement locatif perçu comme rentable par 70% des Français
Dans ce contexte, l'investissement locatif reste perçu comme rentable par 70% des Français, selon un sondage réalisé par Harris Interactive le 24 avril auprès de 7.311 personnes et publié le 1er juin pour le groupe Consultim, spécialisé dans l'investissement immobilier.
Alors que l'inflation vient d'atteindre son plus haut niveau depuis 1985, les sondés le perçoivent même comme le placement « le plus rentable », devant l'investissement en Bourse, la constitution d'une épargne en assurance-vie ou en plan épargne retraite, ou encore la cotisation à un régime complémentaire de retraite.
« Il y a une inquiétude assez forte des Français non pas sur l'âge de la retraite, mais sur le montant de cette dernière. Plus d'un tiers d'entre eux déclarent ainsi vouloir réaliser un investissement locatif de par cette crainte sur les retraites et du fait de l'inflation. Ils méconnaissent les dispositifs fiscaux, mais savent que c'est un actif résistant à la crise », explique, à La Tribune, Jean-Luc Guitard, directeur général du groupe Consultim et commanditaire de l'étude.
Des freins économiques (taxe foncière, entretien, chauffage...)
Pour les deux tiers du panel qui ne veulent pas réaliser d'investissement locatif, les freins sont avant tout économiques. Les propriétaires redoutent les impôts (taxe foncière) et les charges (entretien) qu'ils jugent trop élevés. À cet égard, la question des factures d'énergie, absente de l'enquête mais tout sauf neutre en termes de coûts, mérite aussi d'être posée. En France, il existerait aujourd'hui entre 4,8 et 8 millions de « passoires thermiques », ces logements énergivores classés F et G au diagnostic de performance énergétique (DPE).
10% de mises en vente supplémentaires, selon MeilleursAgents.com
Faute de rénovation, ces habitats consommant plus de 450 kilowattheures par mètre carré (kWh/m²) ne pourront plus être loués. À partir du 1er janvier 2023, les « pires » d'entre eux vont en effet être interdits à la location, suivis de tous les logements classés G, F et E en 2025, 2028 et 2034. Tout locataire concerné est en droit d'exiger des travaux à son propriétaire, mais ce dernier ne peut pas les compenser en rehaussant son loyer... Résultat : ces biens immobiliers finissent par être vendus par leurs acquéreurs d'origine.
« Même si c'est compliqué de connaître le nombre exact de passoires thermiques sur 35 millions de logements, pour ceux classés F et G, nous voyons presque 10% de mises en vente supplémentaires par rapport aux années précédentes », affirme, à La Tribune, Thomas Lefebvre, directeur scientifique de l'estimateur en ligne MeilleursAgents.com.
Jean-Luc Guitard, directeur général du groupe Consultim, abonde:
« Dans les grandes villes, les logements classés F et G représentent 20% des annonces. C'est en quelque sorte un "marché gris" dont personne ne connaît la valeur. »
Des décotes de 10% à 15%, mais de gros travaux à réaliser
Ce dernier a fait ses calculs : ces passoires thermiques représentent « au moins » 200.000 logements dans le parc existant, sans compter les 100.000 habitats qui manquent dans la construction neuve.
À un moment où la demande est supérieure à l'offre, les acheteurs se trouvent, en outre, en position de force et négocient, toujours plus, le montant des transactions à la baisse.
« Les vendeurs reçoivent des offres qui décotent leur prix de 10% à 15% mais, en réalité, personne ne connaît aujourd'hui le coût ou le gain d'une étiquette énergétique après travaux », poursuit Jean-Luc Guitard de Consultim.
« Les propriétaires, qui mettent plus de temps à vendre, ont une décote plus importante qui s'explique par des travaux très lourds à réaliser. Les maisons en question se vendent 17% moins chères que celles avec des étiquettes A et B », appuie Thomas Lefebvre, de MeilleursAgents.com
Des différences significatives entre les métropoles régionales
Toutes les communes ne sont pas logées à la même enseigne. Paris reste un marché « particulier » où « l'investisseur privilégie l'adresse », à l'inverse des autres métropoles régionales. À Marseille, « les appartements se décotent un peu plus », relève ainsi le directeur scientifique. À Lyon, « la différence est significative » : les logements F et G se vendent 2% moins chers que ceux classés C, D et E, et même 7% moins chers que ceux classés A et B !
Toujours est-il que ces grandes villes sont également celles où s'applique l'encadrement des loyers : à Paris depuis juillet 2019, à Lille depuis mars 2020, sur les territoires séquano-dionysiens (93) de Plaine Commune depuis juin 2021 et d'Est-Ensemble depuis décembre 2021, ou encore à Lyon-Villeurbanne depuis novembre 2021. Les métropoles de Bordeaux et de Montpellier suivront au cours de cette année 2022.
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