Le futur tarif d'utilisation des réseaux d'électricité, l'une des composantes importantes de la facture des Français, devrait augmenter ces prochaines années pour financer de gros investissements attendus, a annoncé lundi la Commission de régulation de l'énergie (CRE).
Le régulateur a publié ses projets de décisions pour les tarifs applicables en matière de transport (qui servent à financer RTE) et de distribution (pour Enedis) d'électricité applicables au 1er août 2021, pour quatre ans.
Une hausse annuelle d'environ 15 euros
"La CRE retient des hausses tarifaires moyennes de 1,57% par an pour RTE et de 1,39% par an pour Enedis, soit une hausse d'environ 15 euros de la facture annuelle d'un particulier à l'horizon 2024", indique-t-elle.
Les projets de hausse des tarifs doivent maintenant être transmis au Conseil supérieur de l'énergie (CSE) pour avis. Le gouvernement a ensuite deux mois pour s'y opposer.
Le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (Turpe), dont il s'agira de la sixième mouture (Turpe 6), est payé par les consommateurs via leurs factures d'électricité. Pour un client résidentiel, cela représente environ 30% de sa facture d'électricité TTC, rappelle la CRE.
Il permet de financer les gestionnaires Enedis et RTE, qui prévoient chacun de lourds investissements notamment pour s'adapter à la transition énergétique: 69 milliards et 33 milliards d'euros respectivement sur 15 ans.
De lourds investissements indispensables pour accompagner l'essor des énergies renouvelables
"L'ampleur des investissements à venir pèsera inévitablement sur la facture d'électricité, mais les hausses des tarifs de réseau doivent rester maîtrisées", commente la CRE.
Ces investissements massifs sont nécessaires pour accompagner, entre autres, l'essor des énergies renouvelables (EnR) et le développement attendu des véhicules électriques. Dans son schéma stratégique publié au printemps dernier, RTE prévoyait ainsi un développement important du réseau pour faire fonctionner correctement le système électrique avec une forte intégration des énergies renouvelables, dopées par les projets de champs éoliens en mer.
Ce développement supplémentaire est directement lié à la nature intermittente des énergies renouvelables : il n'y a jamais autant de soleil ou de vent sur tout le territoire au même moment. Plus ces sources d'énergies sont importantes, plus il faut transférer des gros volumes d'électricité sur les différentes zones du territoire.
L'écrêtement pour limiter les coûts
Pour limiter l'ampleur des investissements, RTE mise, entre autres, sur l'écrêtement de la production d'énergies renouvelables quelques heures par an. L'idée est de diminuer la production de manière très ponctuelle quand elle n'est pas nécessaire (trop de vent à un moment où la consommation est basse par exemple). Objectif : ne pas surdimensionner la taille du réseau pour évacuer une trop grosse production d'énergie renouvelable lorsqu'elle n'est pas nécessaire.
Dans le détail, pour éviter de devoir dimensionner le réseau à la pointe, RTE souhaite pouvoir couper la production d'EnR 200 heures par an (soit 0,3% de la production annuelle d'EnR). Selon le gestionnaire, cet écrêtement permettrait d'économiser 7 milliards d'euros d'ici à 2035, en évitant la construction de nouvelles lignes électriques. Une approche qui soulève toutefois des défis techniques, juridiques et contractuels.
Vers une électrification des usages
Outre cette hausse probable des tarifs, la facture d'électricité des particuliers devrait s'alourdir en raison de l'électrification de plus en plus importante des usages, aussi bien dans la mobilité que dans les logements. La nouvelle norme environnementale pour les bâtiments neufs (RE 2020), qui entrera en vigueur l'été prochain, acte en effet la sortie progressive du gaz dans les bâtiments neufs alors même qu'il alimente les trois quarts des nouveaux bâtis et la majorité des maisons et immeubles anciens. Une mesure qui devrait donc profiter aux systèmes électriques.
Cette hausse de la facture électrique pourrait inciter les particuliers à se tourner davantage vers des solutions d'autoconsommation solaire, comme l'offre My Power proposée par Engie ou la technologie de la start-up Mylight Systems. Un marché encore balbutiant en France, avec seulement 85.000 sites dénombrés début 2020, contre plus de 500.000 en Allemagne. Si elle est encore marginale, cette pratique attire de plus en plus et a enregistré une croissance de 63%, entre fin 2019 et fin 2020, selon le cabinet PwC. Elle pourrait davantage se développer via l'autoconsommation collective (une quarantaine d'expérimentations seulement en France), à condition que le cadre réglementaire et fiscal, peu incitatif aujourd'hui, évolue.
Aujourd'hui, la facture électrique des Français reste sensiblement inférieure à celle de leurs voisins européens. Selon les données du ministère de la Transition écologique, en 2019, "le prix de l'électricité en France reste de 14 % inférieur à la moyenne de l'Union européenne" : 178 euros/MWh contre 207 euros/MWh. Un écart qui tend néanmoins à se réduire suite à la hausse continue des tarifs de l'électricité au cours des dernières années.
(Avec AFP)
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