Hy24 : un fonds de 1,5 milliard d'euros pour structurer le marché de l'hydrogène décarboné

Au travers du fonds Hy24, Air Liquide, TotalEnergies et Vinci, suivis d'autres acteurs industriels français comme ADP mais aussi américains posent 800 millions d'euros sur la table pour lancer la structuration du marché de l'hydrogène et créer les infrastructures nécessaires à son développement. L'objectif est de rassembler un milliard et demi d'euros dans les prochains mois.
Le fonds Hy24 va investir plus d'un milliard d'euros pour structurer le marché de l'hydrogène.
Le fonds Hy24 va investir plus d'un milliard d'euros pour structurer le marché de l'hydrogène. (Crédits : iStock)

Le gestionnaire Ardian et la plateforme FiveT Hydrogen ont annoncé le 1er octobre le lancement du fonds d'investissements Hy24, qui sera dédié à la création d'infrastructures pour l'hydrogène décarboné. Avec une dotation de 1,5 milliard d'euros à terme, il se positionne comme le plus important du genre avec une large participation d'industriels français. On retrouve ainsi un trio de tête composé d'Air Liquide, de TotalEnergies et de Vinci, suivi d'investisseurs de second rang comme le Groupe ADP (Aéroports de Paris).

« L'objectif est de développer l'usage de l'hydrogène décarboné pour lutter contre le changement climatique avec des retombées en termes d'emploi, notamment en France où Vinci Construction et Vinci Energies sont présents sur ce segment de l'hydrogène », déclare à La Tribune Nicolas Notebaert, directeur général de Vinci Concessions et président de Vinci Airports.

Le lancement de ce véhicule financier résulte de la fusion de deux initiatives lancées en parallèle par des acteurs industriels positionnés sur le secteur de l'hydrogène. L'une est française, avec Air Liquide, TotalEnergies et Vinci, qui vont investir à hauteur de 100 millions d'euros chacun, la seconde est américaine. Elle regroupe Plug Power et Chart Industries en partenariat Baker Hughes, qui sont les principaux investisseurs de FiveT Hydrogen, plateforme de gestion d'actifs dédiée à l'hydrogène lancée cette année au sein du groupe suisse FiveT.

Le fonds sera ainsi administré par Hy24, coentreprise à parts égales entre le gestionnaire d'investissement français Ardian et FiveT Hydrogen. Un comité exécutif de cinq membres a été constitué autour d'un président, Laurent Fayollas, directeur adjoint de la division infrastructures d'Ardian, et d'un directeur général, Pierre-Etienne Franc, qui dirige FiveT Hydrogen. Il sera assisté d'un comité d'experts réunissant les industriels impliqués. « Nous participerons aux comités stratégiques et techniques pour échanger avec les gérants du fonds et maximiser les retombées industrielles », confirme Nicolas Notebaert, directeur général de Vinci Concessions et président de Vinci Airports.

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800 millions d'euros déjà trouvés

Pour l'instant, Hy24 dispose d'un montant prévisionnel de 800 millions d'euros, apportés essentiellement par les acteurs principaux. Parmi eux, se trouvent également le chimiste coréen Lotte Chemical et l'assureur français Axa. Ils sont secondés dans des proportions moindres par le spécialiste canadien des piles à combustible Ballard, l'industriel allemand Schaeffler, ainsi qu'EDF et Groupe ADP. Il reste donc 700 millions d'euros à sécuriser pour boucler l'objectif de 1,5 milliard d'euros, ce qui devrait être fait dans les prochains mois avec des acteurs davantage financiers.

« En plus de ce montant de 1,5 milliard levé auprès d'autres partenaires, le fonds va lever de la dette bancaire et trouver des partenaires industriels et financiers sur chaque opération pour investir avec eux. A terme, nous serons 7 à 8 acteurs stratégiques industriels. Nous estimons donc à 15 milliards d'euros le volume global, dont les sommes seront progressivement libérées sur des projets de niveau mondial », assure Nicolas Notebaert.

Le fonds doit être opérationnel à la fin de cette année et les premiers investissements sont attendus pour début 2022. Le montant des tickets envisagés n'a pas été communiqué, mais il pourrait être conséquent au vu de la volonté de Hy24 de se positionner sur des projets structurants pour la filière. La durée de vie du fonds devrait être comprise entre 12 et 14 ans.

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Imposer l'hydrogène dans le mix énergétique

« Ce fonds répond au constat que notre économie à l'avenir dépendra beaucoup plus massivement de l'hydrogène, explique à La Tribune Amélie Lummaux, directrice du développement durable et des affaires publiques du Groupe ADP.  C'est en tout cas une des voies les plus prometteuses pour décarboner l'économie, en particulier dans le secteur des transports. L'hydrogène doit prendre une part croissante dans le mix énergétique, mais aujourd'hui c'est un marché qui n'existe pas et qui doit émerger. Le démarrage d'un tel secteur nécessite forcément énormément de moyens. »

Hy24 entend donc contribuer au financement des infrastructures nécessaires pour permettre l'émergence de ce marché. Il sera centré sur les solutions de mobilités, avec la volonté de développer l'ensemble de la chaîne de valeur : production, transport, distribution, flottes captives, etc. « L'objectif, c'est que l'hydrogène soit décarboné, c'est-à-dire renouvelable ou bas carbone. Il faut que les usages se verdissent et que les électrolyseurs - qui produisent l'hydrogène - soient alimentés par de l'électricité décarbonée. Nous ne pouvons pas faire l'un sans l'autre », précise Nicolas Notebaert du groupe Vinci.

« L'hydrogène est une solution qui peut être adaptée à beaucoup de modes de transport qui aujourd'hui n'ont aujourd'hui pas d'autres solutions de décarbonation, notamment pour les transports lourds et longue distance. C'est aussi probablement la seule solution pour faire un avion zéro émission, ce qui nous mobilise particulièrement », note Amélie Lummaux du groupe ADP.

Nicolas Notebaert mise également sur les aéroports et les autoroutes : « Il y aura progressivement des stations sur tous les réseaux, en France et à l'étranger (...). Cela démarrera sans doute avec les poids lourds et la mobilité lourde plus généralement », ajoute-t-il. Puis, avec les trains lorsqu'il faudra « basculer du diesel à l'hydrogène » quand les lignes ne sont pas électrifiées. Avant les usines et leurs « consommations énergétiques et électriques particulièrement importantes ».

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Créer un écosystème viable

En amorçant le développement d'infrastructures de l'hydrogène, les industriels impliqués espèrent contribuer à la création d'un marché mature dans la décennie à venir, sur lequel ils pourront mettre en œuvre des projets économiquement viables, avec des coûts d'investissement et d'acquisition moindres qu'actuellement. La cible géographique est triple : l'Amérique, l'Asie et l'Europe. Des centres de décision et d'investissement devraient ainsi essaimer un peu partout sur le Vieux Continent, à commencer par la France.

Côté aéroportuaire, Amélie Lummaux voit par exemple un développement en trois étapes. La première doit permettre la création d'un environnement fonctionnel « côté ville » avec des stations de recharge et des flottes captives, à l'image de la station de recharge mise en place à Orly en 2017 avec Air Liquide pour accompagner le développement de la société de taxis à hydrogène Hype. La deuxième sera de transformer la mobilité au sol « côté piste », avec l'assistance en escale ou le transport des passagers jusqu'aux avions. Et la troisième, à l'horizon 2035, de bâtir un écosystème capable de mettre en œuvre des avions approvisionnés en hydrogène.

Cette dernière étape devrait dépasser la temporalité du fonds Hy24, mais Amélie Lummaux estime que celui-ci permettra de créer les conditions favorables à sa réalisation. Côté Vinci, Nicolas Notebaert ne dit pas autre chose.

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Commentaire 1
à écrit le 03/10/2021 à 21:01
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Donc, l'énergie nucléaire sera nécessaire pour créer assez d'électricité non fossile.

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