Taxe sur les éoliennes maritimes : Saint-Nazaire dénonce « un cadeau » fait aux communes riches

Au lendemain de l’inauguration du premier parc éolien off-shore français au large du Croisic en septembre dernier, le maire de Saint-Nazaire ne décolère pas. Un amendement voté mi-décembre modifie l’attribution des taxes sur les éoliennes maritimes au profit des communes ayant un plus grand nombre de résidences secondaires. Au détriment de la cité industrielle qui, depuis dix ans, investit dans le développement de l’éolien offshore. Saint-Nazaire voit rouge.
Calculées à l'origine pour neuf communes, ces taxes, payées par EDF Enr, représentent 8,9 millions d'euros dont la moitié est fléchée vers les communes où les installations sont visibles.
Calculées à l'origine pour neuf communes, ces taxes, payées par EDF Enr, représentent 8,9 millions d'euros dont la moitié est fléchée vers les communes où les installations sont visibles. (Crédits : Wikimedia Commons : Martin Doppelbauer)

Voté mi-décembre à l'Assemblée nationale, l'amendement 428 de la loi sur l'accélération de la production d'énergie renouvelable visant à revoir la répartition des taxes des éoliennes maritimes en fonction de la densité des résidences secondaires a fait bondir le maire socialiste de Saint-Nazaire, David Samzun. « C'est un scandale ! Et clairement, un cadeau fait aux communes riches », s'étrangle l'édile socialiste qui, avec 2% de résidences secondaires, chiffre sa perte à 242.519 euros par an quand la Baule, avec 60% de résidences secondaires, voit son enveloppe gonfler de +150.000 euros.

Si la somme en jeu ne fera pas vaciller l'économie nazairienne, le maire en fait une question de principe. « De symbole ! », ajoute-t-il. « On a d'un côté une ville industrielle, qui depuis dix ans, a investi et structuré la filière éolienne, aménagé sa voirie, construit des logements sociaux -29%- pour héberger les salariés de cette industrie, a fermé une plage pendant seize mois pour passer des câbles... et à qui l'on dit ce sera -20% et de l'autre, une cité balnéaire -comme La Baule, entre autres- qui n'a pas investi dans le développement de l'éolien et va toucher 20% de plus », dénonce-t-il.

Une prise en compte plus large

Perçues par l'Etat au profit des collectivités locales et de divers organismes, la taxe annuelle sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent concerne les eaux intérieures, la mer territoriale... dans un rayon de 12 miles nautiques (22 kilomètres). Calculées à l'origine pour neuf communes, (Saint-Nazaire, la Baule, Pornichet, le Croisic, la Turballe, Batz-sur-mer...), ces taxes, payées par EDF Enr, représentent 8,9 millions d'euros dont la moitié est fléchée vers les communes où les installations sont visibles. Trop, selon certains. Des élus de la presqu'île guérandaise s'en étaient fait l'écho auprès du président de la République lors de sa venue, le 22 septembre dernier, pour l'inauguration du premier parc français offshore. « On a voulu que soit prise en compte la disparité de communes plus petites jusque-là moins bien traitées comme le Croisic et Batz sur Mer, où la gêne est réelle», justifie le maire de la Baule LR Franck Louvrier, auteur d'un courrier, cosigné par les maires de la presqu'ile, et adressé à la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher. Pour sa part, le maire de Saint-Nazaire avait mis en garde :  « Si vous voulez prendre en compte les résidences secondaires très bien, mais par contre ça ne peut pas être au détriment de Saint-Nazaire...»

Un gâteau repartagé au détriment de Saint-Nazaire

Déposé le 30 novembre dernier par la député girondine Sophie Panonacle, l'amendement 428 appuie son mode de calcul, non plus sur la population Insee mais sur la population définie par la DFG (Dotation globale de Fonctionnement) qui inclut les résidences secondaires. Au passage, quatre nouvelles communes (Guérande, Paimboeuf, Plaine-sur-mer et Préfailles) ont été intégrés dans le dispositif. Soit treize bénéficiaires au lieu de neuf sans augmentation de l'enveloppe. C'est ce qui reste en travers de la gorge du maire de Saint-Nazaire qui paie les pots cassés de ce changement de mode de calcul. « Le fautif, c'est l'Etat. Il a retenu treize communes sans faire évoluer la dotation. C'est à lui d'aller négocier avec EDF. Le fond du problème, c'est que l'on déshabille l'un pour habiller l'autre », estime Jean-Claude Pelleteur, maire de Pornichet, dotée de quelques 5700 résidences secondaires (40%), vice-président de la communauté d'agglomération nazairienne Carene, et ex-président du réseau d'entreprises Neopolia, qui, malgré tout, soutient la démarche du maire de Saint-Nazaire.

L'éolien offshore posé préfigure ce que sera l'éolien flottant

Pour la ville industrielle, la taxe perçue ne serait donc plus de 1,275 millions d'euros mais de 1,033 millions d'euros. « Intolérable » pour David Samzun. Tous les acteurs s'accordent aujourd'hui sur la nécessité d'une augmentation de la dotation avec maintien des conditions antérieures pour Saint-Nazaire. Seront-ils entendus ? « Si l'éolien offshore a mis dix ans à sortir c'est bien parce que des gens s'y sont opposés sur nos côtes. Et aujourd'hui, l'éolien offshore posé préfigure ce que sera l'éolien flottant. Alors si l'on veut se prémunir des recours, il faut que la dotation qui concerne aujourd'hui treize communes, soit plus forte », défend Jean-Claude Pelleteur. « C'est vrai que la population se plaint. L'industriel - EDF Enr- nous avait vendu la vision de bâtons d'allumettes et on se retrouve avec de gros troncs d'arbres », constate le maire de Pornichet. « Tout l'enjeu est là. Il y a va du degré d'accessibilité des quinze prochains parcs français », indique Franck Louvrier. Ce sera notamment le cas avec le prochain parc situé en l'île d'Yeu-Noirmoutier qui sera lui aussi confronté à la problématique des résidences secondaires.

Une consultation « à enveloppe constante »

Le maire de Saint-Nazaire compte sur une commission paritaire mixte prévue en fin de mois entre des sénateurs et des députés pour faire avancer le dossier et rétropédaler le gouvernement. S'il n'obtient pas gain de cause, il n'exclut pas de se tourner vers ses avocats pour engager une procédure en conseil d'Etat. D'ores et déjà, missionnée par le gouvernement pour réécrire la répartition «à enveloppe constante » et rédiger les décrets d'application, la député guérandaise Sandrine Josso a fait savoir à la Tribune qu'elle allait, prochainement, entamer une consultation auprès des treize maires concernés. « Pour l'instant, en tout cas, je n'ai ni le son ni l'image du gouvernement » regrette David Samzun.

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Commentaire 1
à écrit le 12/01/2023 à 10:24
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Mais c'est la taxe d'acceptation des nuisances.. Il faut mettre les maires dans de bonnes dispositions..

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