Eric Mimoz : " j'ai été surpris par la taille du ventre mou  ! "

Eric Mimoz est coprésident de BcomBest.

Pour quelles raisons avez-vous commandé ce sondage à l'Ifop ?

Nous voulions disposer d'un baromètre pour nous permettre de vérifier deux sentiments que nous avions : d'abord, nous doutions de la réticence au ­changement supposée de la part des salariés, ensuite, nous pensions que la greffe avait bien souvent du mal à prendre dans ­l'entreprise. Cette enquête nous conforte ­finalement sur ces deux points. Elle montre qu'il y a avant tout un vrai problème de mobilisation.

Est-ce vos relations avec vos clients et votre passé de dirigeant qui vous le laissaient subodorer ?

Notre société travaille avec les plus grandes entreprises, françaises voire étrangères, qui opèrent dans tous les secteurs, Airbus, Areva, BNP Paribas ­Assurances, Casio, Faurecia, ­Foncia, ­Gemalto, Manpower, ­Michelin, Saipem, etc. Avant de la codiriger, j'ai longtemps travaillé chez HP (Hewlett-Packard). Je retire de mon expérience l'impression que les entreprises ont ­encore de gros efforts à faire en matière de conduite du changement et de sa mise en oeuvre. Surtout quand la décision vient de loin ou d'en haut : parfois, on attend le projet d'après, car on se dit qu'il va être en ­contradiction avec le projet précédent. D'où un risque majeur d'immobilisme voire de défiance.

N'est-ce pas particulièrement vrai pour les filiales européennes de groupes américains que vous avez connues ?...

Non. Les Américains pratiquent la répétition et l'explication, essentielles dans tout changement. En Europe, beaucoup moins, surtout en Europe du Sud : nous manquons de pragmatisme. Les entreprises d'Europe du Nord sont davantage à l'écoute de leurs ­collaborateurs, elles ont la culture du résultat et de la mise en oeuvre.

Quels résultats de ce sondage vous surprennent le plus?

La taille du ventre mou. Je m'attendais à 30 % ou 40 % de « moyennement convaincus », pas à 60 % voire 70 %. C'est très inquiétant car cela souligne un manque profond d'adhésion.

Qu'en déduisez-vous pour vos clients ?

Je note tout de même des évolutions. Chez Foncia, par exemple, ou chez BNP Paribas Assurances qui s'installe dans un nouveau siège social avec une organisation spatiale et ­managériale innovante. Nous ­expliquons au top management qu'il doit être au coeur de ­l'accompagnement du ­changement. Avec beaucoup d'écoute et ­l'implication de tous les acteurs : direction des ressources humaines, direction de la communication. Le changement ne réussira qu'à deux conditions cruciales : un diagnostic préalable en profondeur et un suivi le plus efficace possible.

Des résultats à lire en creux

Au premier regard, les résultats de l'enquête de l'Ifop sur les processus de changement sont loin d'être catastrophiques sur la capacité des entreprises à s'adapter et à impliquer leurs salariés. Mais si le changement est perçu positivement à 58 %, ces chiffres sont considérés comme « très insuffisants » par les spécialistes. « Ne pas avoir les deux tiers des salariés convaincus est un sévère constat d'échec », souligne Valérie Morel, coprésidente de BcomBest qui a commandé l'étude. « Il faut lire tous ces chiffres en creux : avoir un tiers de scores négatifs est très préoccupant pour les chefs d'entreprise, les directions ­générales et les ressources humaines », souligne Frédéric Micheau, directeur des études de l'Ifop au ­département opinion et stratégie d'entreprises. « Pour emmener une équipe dans le changement, il faut satisfaire une large majorité. On en est loin »,complète Éric Mimoz, l'autre coprésident de BcommeBest.

 

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