Climat : « L’Afrique est en train de bouger »

INTERVIEW. Juste avant la COP26 qui se tiendra à Glasgow en novembre 2021, le maire-adjoint de Paris, chargé des relations internationales et de la francophonie, Arnaud Ngatcha organisera, à l'Hôtel de Ville, un grand événement sur la préservation des forêts d'Afrique centrale.
César Armand
Arnaud Ngatcha, Adjoint à la Maire de Paris en charge des relations internationales et de la francophonie.
Arnaud Ngatcha, Adjoint à la Maire de Paris en charge des relations internationales et de la francophonie. (Crédits : Paris)

LA TRIBUNE - Au lendemain du Forum Paris Zéro Carbone, co-organisé par La Tribune et la Ville pour fêter les cinq ans des Accords de Paris, quel est votre agenda en matière de relations internationales dédiées à la lutte contre le dérèglement climatique ?

ARNAUD NGATCHA - 
Permettez-moi de dire que ces deux journées d'échanges français et internationaux ont été un vrai succès et ont démontré le rôle que peuvent jouer les villes, et en particulier Paris. Malgré le désengagement voire le blocage de certains Etats, les villes, qui ont mené leurs propres politiques environnementales, seront toujours très actives.

Dans ce cadre, Paris restera le fer de lance. Dans la politique qu'elle conduit, dans la coalition qu'elle mène avec les écologistes, la maire Anne Hidalgo continuera à sensibiliser et à alerter sur le respect des Accords de Paris. Elle va ainsi poursuivre le réaménagement de la ville, la rendre plus fluide, moins encombrée, avec davantage d'espaces verts, plus de forêts urbaines. De même que sera mise sur pied l'Académie du Climat, car cela passe aussi par l'éducation et la transmission. Il s'agit de permettre à des jeunes de venir s'éduquer et se renseigner sur ce sujet.

Il nous faut également travailler avec les chefs d'entreprise : par exemple, François-Henri Pinault (Kering), Stéphane Richard (Orange), Jean-Bernard Lévy (EDF) ou Jean-Laurent Bonnafé (BNP Paribas), présents lors du Forum Paris Zéro Carbone. Toutes les grandes villes internationales sont en train de le prendre en compte dans leurs plans d'actions. Si certains peuvent regarder le monde de l'entreprise avec plus de réserves, je pense, au contraire, que c'est important de les sensibiliser. Elles sont en action pour s'emparer de ces différents changements. Quand des grands patrons viennent s'exprimer à l'Hôtel de Ville, ils engagent la responsabilité de leur société et la leur.

Est-ce cela la « diplomatie verte » qu'Anne Hidalgo appelle de ses vœux ?

C'est effectivement ce que m'a demandé la maire de Paris. Nous avons ainsi déjà les yeux tournés vers la COP26 qui se tiendra à Glasgow en novembre 2021. Il est fondamental que cette conférence soit réussie et que les Etats comme les collectivités participent à la réduction de l'empreinte carbone globale.

Juste avant, en octobre 2021, j'organiserai un grand événement sur la préservation des forêts d'Afrique centrale. Outre la célèbre forêt amazonienne, leur rôle est essentiel dans la préservation de notre écosystème mondial. Les maires francophones, que j'ai rencontrés à Tunis il y a peu, sont en outre demandeurs de solutions et d'échanges. Dans leurs grandes métropoles, ils veulent améliorer leur gestion des eaux, des déchets, car ils ne veulent pas être confrontés à des catastrophes naturelles.

La Ville est d'ailleurs la première municipalité en matière d'aide au développement, via des associations et des ONG qui traitent, sur place, des sujets d'éducation et de santé. Je serai également attentif à l'égalité femme-homme et aux droits humains dans ces pays qui ont moins de 60 ans et qui se développent à leur rythme sur ces plans-là, mais je pressens un changement majeur.

Enfin, je rencontre les ambassadeurs, comme celui de l'Angola, un pays lusophone, ou celui du Sénégal. Tous deux sont tournés vers la politique environnementale, le respect de leur écosystème. L'Afrique est en train de bouger. C'est le sens de tous ces événements.

Dans cet esprit, allez-vous convertir les grands groupes qui exploitent les ressources naturelles en Afrique en champions de l'environnement ?

Ce sera notre rôle avec cet événement sur les forêts d'Afrique centrale. Certains émettent des réserves. D'autres les voient comme des gros pollueurs. Toutefois, quand je vois l'importance que Kering porte à la traçabilité des cotons qu'il utilise, les normes environnementales très fortes ou l'attention particulière aux conditions de travail, je me dis qu'il est possible d'être une entreprise mondiale et d'avoir une politique environnementale à la pointe.

Tous les patrons le disent : « Demain, un actionnaire peut revendre ses actions, car cela ne correspond plus à ses valeurs ou cela ne va pas dans le sens de l'histoire ». Une nouvelle génération de dirigeants qui a grandi avec ces préoccupations est en outre en train d'arriver. Leur présence aux événements est la preuve qu'elles souhaitent transformer leur modèle et prendre la marche du monde.

Comment éviter le greenwashing ?

Nous l'évitons en les impliquant dans les différents combats que nous menons, plutôt que de les laisser dans leur coin à appliquer deux-trois mesures. C'est en les faisant travailler avec nous que nous ferons bouger la société. J'ai vraiment senti qu'ils sont dans une transition de leur modèle.

Peut-être cela ne va-t-il pas assez vite, mais ils ont conscience que leur modèle actuel n'est plus viable. Ce n'est pas en les mettant à l'écart que nous trouverons les solutions aux problèmes qui se posent. Sans les entreprises, j'insiste, cela va être extrêmement compliqué.

César Armand

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