Climat : le rapport du Giec dénonce l'inaction "criminelle" des dirigeants

Les experts climat de l'ONU notent que la moitié de la population mondiale est d'ores et déjà "très vulnérable" aux impacts des émissions à effet de serre, soit plus 3 milliards de personnes. Alors que les engagements pris par les États ne permettent pas aujourd'hui de limiter le réchauffement à 1,5°C, "si on s'en tient aux engagements actuels, les émissions devraient augmenter de près de 14 % au cours de cette décennie", prévient Antonio Guterres, le secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.
(Crédits : Mike Hutchings)

Ce sont encore plus de 3.000 pages rédigées par les plus grands scientifiques du monde. Et ce nouvel opus des experts climat de l'ONU (le Giec, pour Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) est toujours aussi alarmant. Selon ce rapport, la moitié de la population mondiale est d'ores et déjà "très vulnérable" aux impacts cruels et croissants du changement climatique, et l'inaction "criminelle" des dirigeants risque de réduire les faibles chances d'un "avenir vivable" sur la planète, s'alarme l'Organisation internationale.

Dans un contexte où l'attention médiatique est focalisée sur la guerre en Ukraine, "il n'est pas question que ce rapport soit éclipsé par l'invasion russe en Ukraine, plaide Hans-Otto Pörtner, co-président du groupe du Giec ayant préparé ce rapport. Le réchauffement nous hante. L'ignorer n'est pas une option", a-t-il déclaré à l'AFP.

Un dépassement temporaire de +1,5°C provoquerait de nouveaux dommages "irréversibles"

Alors que la planète a gagné en moyenne environ +1,1°C depuis l'ère pré-industrielle, le monde s'est engagé en 2015 avec l'accord de Paris à limiter le réchauffement bien en deçà de +2°C, si possible +1,5°C. Dans le premier volet de son évaluation publiée en août dernier, le Giec estimait que le mercure atteindrait ce seuil de +1,5°C autour de 2030, soit dix ans plus tôt qu'escompté. Il laissait toutefois une porte ouverte, évoquant un retour possible sous +1,5°C d'ici la fin du siècle en cas de dépassement.

En novembre dernier, après deux semaines de négociations intenses, les quelque 200 pays réunis à Glasgow pour la COP26 avait fini par adopter un accord global afin d'accélérer la lutte contre le réchauffement climatique. Mais sa portée reste limitée, puisque ce pacte ne permettra ni de tenir l'objectif de hausse des températures sous les +1,5°C, ni de répondre aux demandes pressantes d'accompagnement des pays pauvres, en première ligne face aux effets du dérèglement.

Le deuxième volet du rapport du Giec publié lundi souligne que même un dépassement temporaire de +1,5°C provoquerait de nouveaux dommages "irréversibles" sur les écosystèmes fragiles comme les pôles, les montagnes et les côtes, avec des effets en cascade sur les communautés qui y vivent.

"Si on s'en tient aux engagements actuels, les émissions devraient augmenter de près de 14 % au cours de cette décennie. Ce serait une catastrophe. Toute chance de maintenir l'objectif de 1,5°C en vie serait anéantie", a dénoncé Antonio Guterres, le secrétaire général de l'ONU, désignant comme "coupables" les grands pays émetteurs "qui mettent le feu à la seule maison que nous ayons". Plusieurs Etats, notamment Chine, Inde et Arabie saoudite ont tenté pendant les négociations de faire retirer des références à l'objectif de +1,5°C, ont indiqué à l'AFP plusieurs sources participant aux discussions.

"L'adaptation est cruciale pour notre survie"

Selon le résumé de 37 pages publié ce jour par l'ONU, ce sont pas moins de 3,3 à 3,6 milliards de personnes sont déjà "très vulnérables" aux effets du changement climatique : sécheresses, inondations, canicules, incendies, insécurité alimentaire, pénuries d'eau, maladies, montée des eaux... La situation pourrait encore empirer dans les prochaines années sans une réaction forte des pays jusqu'à devenir "parfois irréversibles", alertent les scientifiques.

"J'ai vu de nombreux rapports scientifiques dans ma vie, mais rien de comparable à celui-ci", a réagi Antonio Guterres, décrivant "un recueil de la souffrance humaine et une accusation accablante envers l'échec des dirigeants dans la lutte contre les changements climatiques".

Les conséquences du réchauffement climatique pourrait toucher toutes les régions du monde et toutes les classes sociales, même si les populations plus fragiles comme les peuples autochtones ou les populations pauvres, pourraient être encore davantage en première ligne.

Dans ce contexte,"l'adaptation est cruciale pour notre survie", a réagi dans un communiqué le Premier ministre d'Antigua et Barbuda Gaston Browne qui préside l'Alliance des petits Etats insulaires (AOSIS), appelant les pays développés à respecter leur engagement d'augmenter l'aide climatique aux pays pauvres, en particulier pour leur permettre de se préparer aux catastrophes qui s'annoncent.

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Le rapport constate toutefois que malgré quelques progrès, les efforts d'adaptation sont pour la majorité "fragmentés, à petite échelle" et que sans changement de stratégie, cet écart entre les besoins et ce qu'il faudrait risque de s'accentuer.

Mais à un certain point, s'adapter n'est plus possible. Certains écosystèmes sont déjà poussés "au-delà de leur capacité à s'adapter" et d'autres les rejoindront si le réchauffement se poursuit, prévient le Giec, soulignant ainsi qu'adaptation et réduction des émissions de CO2 doivent aller de pair. Un troisième volet doit être publié début avril sur les solutions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

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Commentaires 6
à écrit le 01/03/2022 à 6:38
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Mais si ça bouge ! On trouve encore des réserves de pétrole. Tout va bien...

à écrit le 28/02/2022 à 21:01
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Le GIEC a bien choisi la date de sortie de son rapport, déjà dans le contexte actuel de forte inflation et baisse de pouvoir d'achat les citoyens ont d'autres préoccupations que le climat dans 20 ans ,mais avec en prime une guerre aux portes de l'UE ...

à écrit le 28/02/2022 à 19:26
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Chut c'est la guerre... ben oui juste avant c'était chut c'est le covid... bref, chut !

à écrit le 28/02/2022 à 18:59
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Il n'y a rien de criminel à ne pas lutter contre une fatalité. Le réchauffement climatique est une maladie incurable, c'est maintenant établi, donc ce ne sont pas les gesticulations des écologistes qui changeront quoi que ce soit au devenir de la pla...

à écrit le 28/02/2022 à 18:43
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Le timing d'un tel rapport est malheureusement inaudible. Déjà que personne ne voulait entendre. On va déjà se prendre 50° l'été pour se mettre dans le bain.. Mon pari à moi: Avant 2030 les catastrophes climatiques et agricoles incommensurables.

à écrit le 28/02/2022 à 17:47
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c est totalement faux. Tonton Vladimir agit et fait pression pour que l EU reduise sa consommation de gaz. Il lutte aussi contre la surpopulation en supprimant des males blancs (admirez le politiquement correct). Et si on le contrarie trop il pourrai...

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