Dates de péremption : industriels et distributeurs s'engagent contre le gaspillage

38 acteurs de la filière alimentaire ont signé un pacte promu par l'application anti-gaspillage Too Good To Go. Ils s'engagent à mettre en oeuvre dix mesures visant à améliorer la compréhension et l'utilisation des dates limites de consommation.
Giulietta Gamberini
Le pacte s'attaque aussi à la logistique et à "la valorisation des produits exclus des circuits de vente", en suggérant l'échange d'expertise et l'intégration des dates de consommation dans les codes-barres.

Les industriels et les distributeurs s'engagent à accroître la transparence des dates de péremption des aliments. Menés par l'application mobile Too Good To Go, qui depuis 2016 a sauvé 12 millions de repas du gaspillage alimentaire, ils ont signé le 28 janvier le premier "Pacte sur les dates de consommation". Les signataires, 38 au total, incluent de grands distributeurs: Auchan, Carrefour, Casino, Cora, Leclerc, Franprix, Intermarché, Monoprix, Bio c'Bon, Naturalia et Nature & Découvertes. Tout comme les marques Bel, Danone, Les 2 Vaches, Michel et Augustin, Nestlé France et Savencia.

Sont également associées des fédérations professionnelles comme l'Association nationale des industries agroalimentaires (ANIA) et la  Fédération du commerce et de la distribution (FCD), des associations de consommateurs (Familles Rurales), des ONG comme France Nature Environnement (FNE) et des coopératives comme La Coopération Agricole et Système-U.

"La lutte contre le gaspillage devient de plus en plus un enjeu de réputation", note la fondatrice de Too Good To Go, Sophie Basch. Et le projet de loi d'économie circulaire, qui doit être adopté cette semaine par le Parlement, fixe l'objectif de le réduire de moitié avant 2025.

Une communication nationale sur les dates de consommation

"En Europe, les dates de péremption sont responsables de 10% du gaspillage alimentaire. Et chez les ménages français, de 20%", souligne Sophie Basch, en citant un livre blanc que Too Good To Go a publié sur le sujet en 2019. C'était donc l'un des premiers problèmes à résoudre afin d'"engager toute la société dans la lutte contre ce phénomène", bien au-delà des 13.000 commerçants qui ont adhéré à l'application, et des 6 millions de personnes qui l'ont téléchargée. L'idée a d'ailleurs rapidement suscité "beaucoup d'intérêt chez des acteurs puissants", et trouvé le soutien des ministères de l'Agriculture comme de la Transition écologique et solidaire, ainsi que du Conseil national de l'alimentation, explique-t-elle.

Quelques mois de concertation ont abouti à l'élaboration de 10 engagements "qui peuvent changer la donne", souscrits par tous les signataires. Ils sont articulés autour de quatre axes. Le premier est l'éducation, non seulement des consommateurs, mais aussi des producteurs et des collaborateurs des entreprises agroalimentaires. L'un des engagements prévoit notamment la mise en place, dans les magasins, de "rayons anti-gaspi", un autre le déploiement d'une communication nationale sur les dates limites de consommation.

"Assurer la cohérence dans la date de consommation"

Le deuxième axe est la clarification de la différence entre les deux types de dates prévus aujourd'hui par le droit européen: la date limite de consommation (DLC) et date de durabilité minimale (DDM). La première ("à consommer jusqu'au...") indique une limite impérative. Elle s'applique à des denrées périssables, potentiellement dangereuses pour la santé humaine après cette date. La DDM ("à consommer de préférence avant le") n'a pas le même caractère impératif: une fois la date dépassée, la denrée peut perdre une partie de ses qualités gustatives mais, si l'emballage n'est pas l'altéré, ne présente aucun risque. Mais les consommateurs ne connaissent souvent pas la différence. Le pacte recommande donc la mise en place de pictogrammes visuels ou d'informations digitalisées.

Dans le cadre du troisième axe, relatif à la collaboration entre acteurs et à l'harmonisation des bonnes pratiques, le pacte engage d'ailleurs aussi les signataires à "assurer la cohérence dans la date de consommation d'une même référence produit", et à "substituer les DLC par des DDM quand cela est possible". Aujourd'hui, en effet, "la réglementation fait confiance aux producteurs et aux industriels pour la détermination de cette date", explique Sophie Basch, pour qui "il faut rouvrir la discussion autour de leur définition". Une fois de telles bonnes pratiques adoptées, elle n'exclut pas une action de lobbying auprès de l'Union européenne, pour revoir carrément les règles.

Une cartographie des acteurs anti-gaspillage

Le pacte s'attaque enfin à la logistique, ainsi qu'à "la valorisation des produits exclus des circuits de vente", en suggérant l'échange d'expertise, l'intégration des dates de consommation dans les codes-barres et la construction d'une cartographie des acteurs anti-gaspillage. "Les dates de péremption engendrent des pertes tout au long de la chaîne", rappelle en effet Sophie Basch, qui déplore notamment la règle non écrite des "deux tiers": aujourd'hui, les distributeurs exigent que les produits leur soient livrés avec encore deux tiers de vie devant eux.

La mise en oeuvre de ces engagements par chaque entreprise sera mesurée par un comité de suivi.  Elle sera même rendue publique sur le site consacré au pacte, assure Too Good To Go.

Giulietta Gamberini

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