Recyclage du plastique : Eastman choisit la Normandie pour son usine à 1 milliard de dollars

Le groupe américain Eastman a sélectionné la commune de Saint-Jean-de Folleville (Seine-Maritime) pour implanter sa future usine de recyclage chimique du plastique. L’investissement à un milliard de dollars avait été annoncé lors du sommet Choose France. Le projet pourrait néanmoins en compromettre un autre de moindre importance : celui du recycleur canadien Loop Industries qui convoite un site voisin.
L'usine d'Eastman devrait être capable de recycler chaque année de quoi remplir 2,5 fois le stade de France.
L'usine d'Eastman devrait être capable de recycler chaque année de quoi remplir 2,5 fois le stade de France. (Crédits : Reuters)

C'est un américain originaire du Tennessee qui pourrait permettre au gouvernement français d'honorer -au moins en partie- sa promesse de tendre vers le 100% plastique recyclé en 2025. Annoncé lors du dernier sommet Choose France, le projet d' Eastman de construire une usine de recyclage du plastique dans l'Hexagone vient de franchir une étape décisive. Le groupe dont le cœur balançait entre deux sites, l'un dans le Grand Est (à Saint-Avold), l'autre en Normandie, a finalement tranché.

Le géant de la chimie (14.000 salariés - 10,5 Mds$ de chiffre d'affaires) annonce ce jour, 30 mars, entrer en négociations exclusives avec la commune de Saint-Jean-de-Folleville située au cœur du complexe industriel de Port Jérôme à quelques kilomètres du port du Havre. « Le site offre les éléments essentiels à la construction et à l'exploitation d'une installation de cette ampleur », justifie Marc Costa, PDG d'Eastman dans un communiqué.

La future usine devrait être opérationnelle d'ici trois ans moyennant la création de 1.800 emplois -dont 350 directs- et une dépense de l'ordre de 850 millions d'euros. Soit l'un des plus importants investissements industriels des trois dernières décennies en France avec celui de la méga usine de batteries des Hauts-de-France.

Objectif : 160.000 tonnes de déchets

Utilisant une technologie de recyclage chimique par renouvellement du polyester éprouvée par Eastman, l'installation très intégrée devrait être capable de recycler jusqu'à 160.000 tonnes de déchets plastiques par an. De quoi remplir 2,5 fois le stade de France. Le groupe se vante d'offrir « une vraie circularité » à des rebuts jusqu'ici difficiles à recycler. Sa cible ? Le PET coloré (matériaux recyclés) et les textiles dégradés qui finissent souvent leur vie dans les incinérateurs ou les centres d'enfouissement, faute de pouvoir être traités mécaniquement ou de façon performante.

A l'inverse, l'Américain promet la mise sur le marché de « matériaux de première qualité » à un coût moindre grâce à des gains d'efficacité. Il revendique une diminution des émissions de gaz à effet de serre jusqu'à 80% en comparaison des méthodes traditionnelles de recyclage, notamment grâce au recours à des énergies renouvelables.

La présence autour de la zone de Port-Jérôme de réseaux de chaleur a d'ailleurs pesé lourd dans le choix du site, à écouter Hervé Morin, président de la Région. « Marc Costa a une obsession, le plastique zéro carbone. Aussi le couple énergie décarbonée et potentiel industriel de la vallée de Seine a t-il été décisif davantage que les 30 millions d'euros d'aide que nous allons consentir », affirme t-il.

Pour l'ancien ministre de la défense, l'arrivée d'Eastman valide à postériori la pertinence de la stratégie régionale en faveur de l'axe Seine. « Nous avons la démonstration du raisonnement que nous tenons depuis des années sur le caractère stratégique de la vallée de Seine pour l'éco-industrie et l'économie circulaire », analyse t-il.

Du côté de l'agglomération Caux Seine, qui englobe Saint-Jean-de-Folleville, on se félicite de n'avoir pas cédé aux avances des logisticiens qui frappaient à la porte. Virginie Carolo, présidente de l'agglo, a ainsi interrompu les négociations menées de longue date avec le promoteur Panhard qui guignait le terrain en passe d'être cédé à Eastman. « Nous avons refusé d'augmenter les surfaces dédiées à la logistique moins créatrice d'emploi et moins sujettes à des synergies avec notre écosystème industriel », justifie t-elle.

Américain contre canadien

Si la décision de l'Américain est accueillie comme une excellente nouvelle par le territoire, elle pourrait néanmoins compromettre un autre projet de recyclage chimique du plastique également révélé lors du sommet Choose France.

En janvier dernier, le canadien Loop Industries associé à Suez annonçait vouloir construire à Port-Jérôme-sur-Seine une usine capable de produire 70.000 tonnes de PET recyclé par an, au prix d'un investissement de 250 millions d'euros. Deux mois plus tard, l'arrivée de son rival pourrait bien contrarier ses plans. « Il sera sans doute compliqué de faire cohabiter sur un même espace deux usines qui convoitent le même gisement de déchets », admet Virginie Carolo. Réponse sans doute dans les prochaines semaines.

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