Economie circulaire : le réseau Envie cherche à se diversifier vers d'autres produits à reconditionner

Le réseau d'économie circulaire Envie, spécialiste de la rénovation de l'électroménager, déploie des activités complémentaires dans les composants électroniques et la réparation et la vente de matériel médical. Envie compte 2.200 salariés en réinsertion et propose ses services dans 51 villes en France.
Le réseau d'associations Envie compte 2.200 salariés en insertion spécialisés dans l'électroménager reconditionné.
Le réseau d'associations Envie compte 2.200 salariés en insertion spécialisés dans l'électroménager reconditionné. (Crédits : Margot L'Hermite / Envie)

Après quatre décennies dans l'électroménager, la fédération Envie cherche de nouvelles filières pour accompagner la réinsertion de ses salariés. Le réseau associatif duplique ses activités dans le matériel médical reconditionné et la pièce détachée de réemploi. "Nous répondons à la demande du marché de l'électroménager dans le contexte de pénurie de composants électroniques", annonce Jean-Paul Raillard, président de la Fédération Envie, qui vient d'ouvrir sa 51ème antenne locale à Caen. Cette activité additionnelle s'intègre à une base de données existante pour la gestion des pièces détachées créée à l'initiative du Groupement interprofessionnel des fabricants d'appareils d'équipement ménager (GIFAM). Gérée collectivement par les fabricants, cette plateforme Agora s'adresse aux professionnels de la réparation et aux particuliers.

La collecte et la vente de matériel médical reconditionné, une diversification lancée sous la bannière Envie Autonomie, constitue l'autre plier de la diversification en cours. Initiée en 2015 à Angers, elle a peiné à se diffuser dans d'autres villes malgré l'apport financier (5 millions d'euros) de France Active, du groupe de protection sociale Klesia, de la BNP et de la Banque des Territoires. Cette nouvelle activité est appelée à se développer "en mode startup", sous forme de société coopérative d'intérêt collectif (SCIC). "Nous appliquons aux fauteuils roulants, scooters et lits médicalisés le même modèle de collecte et de réemploi qu'à l'électroménager. Envie Autonomie a commencé à embaucher des ergothérapeutes", annonce Jean-Paul Raillard.

Avec 16 structures locales actives, soit moins d'une ville sur trois où le réseau est présent, Envie Autonomie peine à atteindre son point d'équilibre financier. "Depuis 2020, le législateur a prévu que la sécurité sociale rembourse aux patients l'achat de matériel rénové, remis en état d'usage. Mais le décret d'application de cette loi tarde à paraître", déplore Jean-Paul Raillard. Envie Autonomie soutient que le coût moyen d'un fauteuil reconditionné est trois fois inférieur à celui d'un fauteuil neuf. Son déploiement sur ce marché, jugé porteur du maintien à domicile, est prévu à court terme dans 30 villes en France.

Des ratés dans les smartphones

La diversification dans le matériel de téléphonie peine, elle aussi, à s'imposer. Six antennes locales se sont lancées. "Elles ont beaucoup de mal à récupérer des appareils", a observé Jean-Paul Raillard. "Le marché européen du reconditionnement des smartphones est mal organisé. Nos concurrents achètent des lots sur des marchés internationaux, ils les font réparer en Roumanie pour les revendre en France. Ce type d'économie circulaire, nous n'en voulons pas", estime-t-il.

Né en 1984 à Strasbourg, le réseau Envie (Entreprise nouvelle pour l'insertion par l'économie) continue de produire l'essentiel de son activité dans l'électroménager. Ses 2.200 salariés en parcours de réinsertion sont encadrés par 850 salariés permanents. Les contrats d'insertion s'adressent à des personnes exclues du marché du travail, ou à des migrants. Les embauches portent en théorie sur une durée de deux ans, mais la présence effective constatée ne dépasse pas 13 ou 14 mois. "Nous essayons de diversifier leurs parcours et nous aidons nos salariés à trouver un emploi, pas forcément dans l'électroménager", explique Jean-Claude Raillard. Le taux de sorties positives (en CDI ou en CDD d'au moins 6 mois) s'établit à 74 %.

La mission est donc partiellement remplie, et l'autonomie d'Envie reste son atout majeur. En 1984, l'activité a été lancée par un dirigeant local de l'enseigne d'électroménager Darty avec des animateurs et travailleurs sociaux de la communauté Emmaus. "Darty se débarrassait des appareils électroménagers destinés au ferraillage, une vingtaine de jeunes les réparaient et ils étaient revendus avec un an de garantie", rappelle Jean-Paul Raillard. Le concept a très vite été dupliqué à Marseille puis à Tours, avant d'essaimer dans toute la France. Darty et Emmaüs ont cessé d'être des partenaires privilégiés. La collecte s'effectue dans tous les réseaux et dans les déchetteries.

Les freins de l'immobilier

"Nous avons toujours connu des difficultés pour trouver des lieux où nous implanter. Les coûts de l'immobilier sont trop élevés", déplore Jean-Paul Raillard. Pour installer une association locale, qui comprend un atelier et un magasin, Envie s'établit a minima sur 1.500 mètres carrés. Caen, dernière implantation en date, a été inaugurée au début du mois de juin 2022. L'arrivée à Paris a été tardive (2021), sous forme de tiers lieu : sur deux étages, Envie y organise pour la première fois des séminaires et des ateliers de sensibilisation aux problèmes écologiques.

En 2021, la fédération a réalisé un chiffre d'affaires cumulé de 90 millions d'euros. Les subventions, sous forme d'aides ponctuelles au poste de travail, représentent 15 % de ce chiffre d'affaires. Ces aides publiques financent des parcours de mise en compétence et les différentiels de productivité.

Le plan de développement établi jusqu'en 2030, qui doit aboutir par croissance organique au doublement des activités du réseau Envie, se heurte à la question des gisements d'appareils électroménagers susceptibles d'être réparés. Sur 700.000 tonnes d'équipements mis au rebut chaque année en France, 1 % seulement est réemployé. "Nous visons au moins 5 % de réemploi", annonce Jean-Paul Raillard.

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