La Corse se mobilise pour raffermir son économie

La nuit de la Saint-Sylvestre a été agitée en Corse : un nationaliste de trente-quatre ans, membre de la Cuncolta Naziunalista (la vitrine légale du FLNC-Canal historique), a été abattu à Ajaccio, où ont été également commis trois attentats à l'explosif, qui n'ont pas fait de victime. En 1995, 36 personnes ont été tuées par balles sur l'île. Jusqu'à présent, le gouvernement d'Alain Juppé n'a pas manifesté l'intention d'accorder une attention particulière aux problèmes de l'île, annonçant au passage qu'il ne désignerait pas de « Monsieur Corse ». Or, de toutes parts, des voix s'élèvent pour réclamer la reconnaissance d'une spécificité corse au sein de la France et de l'Europe. Spécificité qui exigerait des mesures particulières, telle l'attribution d'un Programme d'options spécifiques à l'éloignement et l'insularité (Posei) que le gouvernement Balladur s'était engagé à défendre auprès de Bruxelles. Ses successeurs ont hérité de ce dossier délicat. Pour Monika Wulf-Mathies, commissaire européen, le caractère de « région ultra-périphérique » ne s'applique pas à la Corse qui pourrait toutefois bénéficier de mesures fiscales dans un cadre réglementaire autre que celui du Posei. Dès le début 1996, les élus corses, avec à leur tête Jean Baggioni, président du Conseil exécutif de Corse, devraient insister auprès du gouvernement afin que celui-ci convainque Bruxelles d'étendre à la Corse le bénéfice du critère d'éloignement qui conditionne l'attribution du Posei. En cas d'échec, le député UDF de la Corse du Sud, José Rossi, propose de préparer au plus vite un « projet de statut fiscal dérogatoire » à soumettre au gouvernement. C'est précisément ce que réclament les nationalistes, mais aussi bon nombre de socioprofessionnels insulaires. Aussi l'année 1996 verra-t-elle une forte mobilisation autour de ce fameux statut fiscal destiné à pallier les handicaps structurels de l'économie locale. Le FLNC, Canal historique, en a fait l'un de ses chevaux de bataille. Autre revendication, portée par le mouvement politique Cuncolta Naziunalista : celle d'ériger la Corse en territoire d'outre-mer, en référence à l'article 74 de la Constitution. La classe politique traditionnelle corse ne veut pas en entendre parler et les autres mouvements nationalistes, Union du peuple corse, Accolta Naziunale Corsa et Mouvement pour l'autodétermination, n'en voient pas la nécessité. L'année 1996 devrait également voir la présentation au gouvernement, par les socioprofessionnels et les élus corses, d'un plan de redressement pour l'économie locale, élaborée par les chambres de commerce et d'industrie de Haute-Corse et de Corse-du-Sud. Il prévoit notamment l'application d'une TVA à taux zéro ainsi qu'un abattement de 50 % des charges sociales, patronales et salariales. Pour la Corse, 1996 sera donc une année charnière, entre espoir et crainte. Espoir que l'Etat prendra les mesures nécessaires pour ramener la sérénité à l'île. Crainte que la Corse ne soit trop éloignée des préoccupations du gouvernement. Elisabeth MILLELIRI, A Ajaccio
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