Des filières de soins pour mieux rationaliser le système

Comment mieux orienter le malade à travers le système de soins, éviter les doublons de consultations, et la course à l'acte à laquelle se livrent un certain nombre de praticiens ? A cette question, l'ensemble des pays européens ont répondu par la création de filières de soins, facultatives (Allemagne) ou obligatoires (Royaume-Uni, Italie). Une filière permet d'articuler les interventions auprès d'un patient, à partir d'un médecin généraliste, qui le dirige vers ses confrères spécialistes ou à l'hôpital, contrôle les dépenses de santé et assure une continuité dans le suivi médical. En France, c'est au contraire le sacro-saint principe de la liberté de choix qui prévaut. La réforme de la Sécurité sociale fait cependant une timide tentative pour « promouvoir des formes nouvelles d'organisations de soins ». L'ordonnance relative à la maîtrise médicalisée prévoit ainsi la possibilité d'expérimenter des filières, sur cinq ans. Les projets feront l'objet d'une autorisation de l'Etat, après avis d'un comité ad hoc. Ces filières pourront déroger aux règles de remboursement des soins, et de paiement des honoraires. Mais elles doivent rester facultatives : il n'est pas question d'exercer une contrainte sur le patient pour ses choix de médecins ! Le décret organisant l'expérimentation pourrait sortir dans le courant de juillet. L'initiative viendra sans doute des régimes de prévoyances complémentaires, assurances ou mutuelles, qui voient grimper leurs dépenses d'autant plus rapidement que la part prise en charge par la Sécurité sociale diminue. « Les filières ne fonctionneront que si tout le monde y trouve son intérêt : le patient comme le médecin », analyse Jean-Pierre Davant, le président de la Mutualité française. Dans les propositions de son organisation, les malades bénéficieront du système du tiers payant, et auront droit à des tarifs mieux remboursés. On leur assurera une continuité des soins. Ainsi, la filière générera son propre système d'urgence, alors que, dans les grandes villes, en dehors des heures d'ouverture des cabinets médicaux, les malades n'ont bien souvent que l'hôpital comme unique recours. De son côté, le médecin s'engagera à prescrire les médicaments les moins chers. Il rendra différents services au malade, suivi des vaccinations, bilan général. Enfin, il devra suivre régulièrement une formation médicale continue. La Mutualité française a réfléchi aux moyens d'inciter le médecin à entrer dans une filière. Elle pourrait ainsi financer une partie de la formation, fournir les logiciels d'aide à la prescription. « Il faudrait aussi pouvoir payer les services rendus par le médecin (suivi des vaccinations, des pathologies longues) qui ne feront pas l'objet d'un paiement à l'acte », ajoute Jean-Pierre Davant. D'où l'idée d'une rémunération du généraliste aussi par capitation (c'est-à-dire versé au médecin, quel que soit le nombre de ses actes). Toute la difficulté, pour les promoteurs de l'expérimentation, sera de ne pas faire des futures filières un système destiné et utilisé par les patients les plus modestes. On verrait alors se créer une « médecine à deux vitesses », ce que justement la réforme de la Sécurité sociale voulait éviter. Isabelle de Gaulmyn
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.