Le chômage au Japon a augmenté de 15,4 % en un an

Le monde entier lui envie le niveau de son chômage. Le Japon s'alarme pourtant du chiffre record enregistré en mai dernier : les demandeurs d'emploi représentent désormais 3,5 % de la population active, contre 3,4% avril, selon des chiffres publiés vendredi par l'Agence des affaires générales. Un record depuis 1953, date à partir de laquelle les statistiques sur l'emploi ont démarré, mais un chiffre qui sous-estime très largement la réalité, selon la fédération patronale Nikkeiren, qui évalue le chômage à 6% de la population active. Officiellement, le nombre de personnes sans emploi, après avoir dépassé pour la première fois 2 millions en mars dernier, atteint désormais 2,4 millions de personnes, soit 320.000 de plus qu'un an plus tôt, et une hausse impressionnante de 15,4 % en douze mois. Selon l'Agence gouvernementale, ce nouvel accès de fièvre est à attribuer paradoxalement au processus de reprise de l'économie japonaise, qui pousserait de nouvelles personnes à entrer sur le marché de l'emploi. Cette explication ne peut cacher une tendance à long terme différente : la fermeture dudit marché de l'emploi à ses deux extrémités (par classes d'âge) : les salariés les plus âgés et les jeunes, diplômés ou non. Le taux de chômage parmi les 55-64 ans atteint aujourd'hui 5,5 % (+ 0,8 % par rapport au même mois en 1995). Il est le reflet statistique des plans de réorganisation des grandes entreprises lancés depuis 1993. « Poussés dehors par des plans de départ à la retraite anticipés ou incités à démissionner, sous peine de se voir transférer à un poste moins valorisant, ces salariés les plus âgés (donc les plus coûteux au Japon en raison de la rémunération à l'ancienneté) n'arrivent pas à retrouver un emploi stable, en raison de la tendance actuelle des entreprises à recourir au travail temporaire en cas de création de poste », explique Takayo Oda, de l'institut de recherche de la banque Sakura. Ce sont ces salariés font aussi les frais de l'ajustement macro-économique que connaît aujourd'hui le Japon, dix ans après les Etats-Unis : le secteur manufacturier a détruit l'an dernier près de 400.000 emplois, alors que les services en ont créé près de 250.000. C'est seulement depuis 1994 que la population active employée dans les services dépasse celle employée dans l'industrie, témoignant du retard pris par le Japon pour adapter son marché de l'emploi. La croissance du chômage des jeunes est tout aussi inquiétante : le taux de chômage parmi les 15-24 ans est désormais de 7 % (+ 1,6 % en un an). D'une part, les grandes entreprises ont sérieusement revu à la baisse ces dernières années les plans d'embauche des jeunes diplômés. D'autre part, les entreprises préfèrent désormais embaucher une main-d'oeuvre immédiatement opérationnelle, et ne plus s'encombrer de jeunes universitaires à former pendant de longs mois. Une mutation qui nécessite une autre révolution, en amont : celle du système éducatif nippon. Xavier Lambert, à Tokyo
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