Les jours de gloire du yen sont révolus

Le yen s'est mollement ressaisi vendredi. Il n'en a pas moins signé son mois le plus désastreux face au dollar depuis 1995, accusant aussi sa plus forte baisse en huit ans vis-à-vis de l'euro. Qu'on en juge : fin janvier, il fallait 87,25 yens pour un dollar, contre 98,75 à l'avant-veille du week-end, tandis qu'il a rechuté au cours de la même période de 113,15 à 126,10 pour un euro. faisceau d'événementsCela représente une extravagante dépréciation de plus de 10 % en un mois face à ses deux principales contreparties sur le marché des changes, alors que la monnaie de l'Archipel avait regagné 27?% de sa valeur face au billet vert et 47 % face à l'euro depuis la faillite de Lehman Brothers, qui avait définitivement mis un terme aux stratégies de portage consistant à jouer sur les écarts de taux, l'aversion au risque gelant toute transaction douteuse.Que s'est-il donc passé au cours des dernières semaines pour que celui qui, avec le dollar, drainait les capitaux en mal de placements sécurisés, subisse pareil retour de balancier, laissant le billet vert seul à capter le « hot money », l'argent spéculatif qui circule dans le monde. Et ce, alors même que la tradition veut que le yen monte à cette époque de l'année, via les rapatriements de capitaux des exportateurs nippons en vue du bouclage de l'exercice fiscal japonais, le 31 mars. Et alors qu'il entretient une corrélation historique inverse avec les indices boursiers, dont la dépression nerveuse ne se dément pas ? C'est un faisceau d'événements qui explique pourquoi le vent a tourné. D'abord, les ardeurs de Mme Watanabe se sont calmées. La ménagère japonaise, très active sur le marché des changes pour particuliers, a fini de rapatrier précipitamment son épargne, un mouvement qui avait été partiellement responsable de la flambée du yen. Ensuite, les investisseurs de l'empire du Soleil-Levant se précipitent, comme tout un chacun, sur les bons du Trésor étrangers, produit phare en période d'aversion au risque, liquidant au passage leurs valeurs japonaises, ce qui pèse sur le yen. Enfin, les fondamentaux économiques ont achevé le travail de sape. La récession fait un retour en force, avec un recul du PIB de 12,7 % en rythme annualisé au quatrième trimestre de 2008. Pour le seul mois de janvier, la production industrielle s'est effondrée de 10 %, laminée par la chute des exportations de voitures et de matériel électronique. C'est justement là que le bât blesse, cruellement. Le seul moteur de l'économie nipponne qui ne s'était jamais grippé, même durant la décennie perdue ? le commerce extérieur ?, est tombé en panne. La chute calamiteuse des exportations japonaises a provoqué une contraction de plus des deux tiers de l'excédent de la balance des paiements courants depuis l'automne : elle est désormais à peine positive.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.