La Société Générale passe au crible les conditions de travail de ses traders

Obnubilées par la « création de valeur », les salles de marché auraient-elles perdu de vue les « vraies valeurs » ? La question taraude encore le corps social de la Société Généralecute; Générale, traumatisé par la perte de 5 milliards d'euros causée en janvier 2008 par un jeune trader, Jérôme Kerviel. Un choc qui a poussé, quelques semaines plus tard, les élus du comité central d'entreprise (CCE) à demander une expertise dont la note, proche de 150.000 euros, a été partagée avec la direction. Choisi pour « la méthodologie proposée, et notamment l'idée d'envoyer un questionnaire aux traders », selon une source syndicale, le cabinet Technologia a présenté ses conclusions le 14 mai. « Cette expertise n'avait pas vocation à faire la lumière sur l'affaire Kerviel, précise une source, mais à éclairer les élus du personnel sur l'organisation et les conditions de travail dans les salles de marché. »Basé sur l'expertise des rapports existants, notamment ceux de l'inspection générale de la banque (mission Green) et de Bercy, un premier rapport conclut que le programme « Fighting Back », mis en place peu après la découverte de la fraude, est un « bon remède aux lacunes constatées ». « Nous y voyons une forme de reconnaissance des efforts engagés », indique un porte-parole de la banque. Toutefois, faute d'avoir eu accès aux audits du cabinet PricewaterhouseCoopers sur la mise en ?uvre de Fighting Back, Technologia souligne que si « la description des nouvelles mesures sur le papier donne l'assurance du renforcement des contrôles », il ne peut garantir qu'« il n'y ait pas des écarts entre les processus théoriques et réels ».Le second rapport (le plus intéressant) aborde la question des comportements déviants. L'objectif : analyser le contexte qui a permis la survenue d'un incident aussi grave que l'affaire Kerviel, ou n'a pas permis de l'empêcher. D'où l'idée de s'appuyer sur le modèle sociologique dit « de Karasek », qui étudie la santé au travail en fonction de trois facteurs : le rapport à la charge de travail, le degré d'autonomie et le soutien social dont bénéficie l'employé. Basé sur un questionnaire et sur une série d'entretiens, ce travail analyse le ressenti des différentes catégories de personnel, à savoir le front-office, qui réalise les transactions, et les middle et back-office, chargés de les contrôler. Les conclusions dressent un constat peu amène des conditions de travail dans les salles de marché (lire ci-contre).problèmes « culturels »Tout en jugeant les résultats chiffrés de l'étude « non représentatifs », la banque reconnaît que « même si cela reflète l'état d'esprit d'un seul de nos employés, il ne faut pas l'ignorer ». Elle estime prendre au sérieux les problèmes « culturels » des salles de marché : « Nous avons lancé dès le printemps 2008, dans le cadre de Fighting Back, un chantier ?culture et responsabilité? basé sur des actions concrètes. » Notamment la « formalisation en profondeur et en détail du cadre de travail et des responsabilités de chacun ». Mais aussi un « travail sur les valeurs et les principes d'actions qui doivent nous guider au quotidien » afin de faciliter leur « appropriation formelle » et de les décliner dans les actes au quotidien.Le cabinet Technologia conclut en formulant cinq préconisations, dont la banque estime qu'elles trouvent un écho dans les chantiers lancés en réaction à l'affaire Kerviel (voir infographie). Quant aux élus du CCE, ils veulent se servir de ces travaux pour améliorer les conditions de travail, indique un représentant FO : « Nous nous sommes mis d'accord avec la direction pour continuer à travailler sur le sujet, afin que le CCE puisse rendre un avis positif. » Le cabinet Technologia aurait même été chargé d'une « étude complémentaire ». Interrogée par « La Tribune », la direction de la banque parle d'un « suivi sur les chantiers mis en ?uvre correspondant aux préconisations ». n
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