Un pétrole trop fluide

Une fois n'est pas coutume. Le Premier ministre britannique, Gordon Brown, et le président français, Nicolas Sarkozy, ont pris la plume, dans le « Wall Street Journal », à la veille du G8, pour rappeler la dépendance de la croissance économique à la demande pétrolière. L'intervention visait à souligner l'importance du sujet, juste avant un sommet cherchant à coordonner les efforts de tous les pays pour sortir de la crise économique. « La volatilité et l'opacité sont les ennemies de la croissance », soulignent les deux responsables, qui appellent à multiplier les initiatives pour améliorer la fiabilité de l'information sur ce marché. Comment, en effet, ne pas s'étonner de voir le baril s'apprécier de 80 dollars en quelques mois puis perdre près de 100 dollars en quelques semaines avant de rebondir et doubler son cours, pour revenir s'installer à plus de 60 dollars ? La frivolité d'un jeu spéculatif qui lance le prix du baril sur un vertigineux parcours de montagnes russes coïncide mal avec l'importance du statut du pétrole comme ingrédient majeur de l'économie. D'autant que les besoins mondiaux d'or noir ayant variés d'à peine quelques pour-cent, il est difficile de voir dans ces soubresauts un reflet de l'offre et de la demande physiques. Au-delà des spectaculaires embardées quotidiennes, il faut cependant noter que le prix moyen du baril s'affiche à un peu plus de 68 dollars sur un an. Un tel niveau permet d'exploiter le pétrole non conventionnel, de soutenir le développement des biocarburants, des énergies non renouvelables et des programmes d'économie d'énergie. Ce prix moyen du baril se situe d'ailleurs en deçà de la fourchette évoquée au G8, entre 70 et 80 dollars. Sur le long terme, les baisses brutales ont donc compensé les hausses brutales. En fait, la volatilité du marché pétrolier traduit davantage les incertitudes sur l'avenir de l'économie mondiale alimentées par l'interconnexion de la finance, de la diplomatie, de l'industrie, de la géologie? Si quelques règles prudentielles salutaires sont assurément bienvenues pour éviter les dérapages trop importants du marché et améliorer son efficience, elles ne pourront pas en revanche traduire les désirs des politiques. Le pétrole concentre de par son statut ? ressource énergétique, actif financier, enjeu géopolitique ? les nombreux aléas de la mondialisation et la vision de l'avenir qu'en ont ses intervenants. Aussi, son prix est plus un effet qu'une cause de la crise économique que nous traversons. [email protected] Jule
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