L'accès au crédit

Les signaux sont clairs : la crise financière est en train de se transformer en crise économique avec, comme première conséquence, une restriction du crédit pour les entreprises. « Le monde ban? caire a pris des risques inconsidérés et en paie les conséquences, analyse Jean-Pierre Alix, président de l'Ordre national des experts-comptables. Le risque aujourd'hui est que les banques, après avoir été très peu vigilantes au niveau de leurs placements spéculatifs, deviennent très prudentes dans l'exercice de leur métier. » Cela étant, la plupart des experts financiers estiment que la restriction du crédit ne date pas de ces dernières semaines, mais a bien commencé avant l'été. « Même si les états-majors des banques s'en défendaient, nous avons observé que le crédit était distribué avec plus de parcimonie ; les désordres financiers ne font qu'accentuer la tendance », ajoute Jean-Pierre Alix.« On assiste à un changement d'attitude des banques, confirme Patrick Berthon, PDG de Tokheim qui fabrique des appareils de distribution de carburant et des systèmes de gestion de paiement pour les stations-service. Dès l'instant qu'on a besoin d'obtenir une ligne de crédit à court terme plus forte, on ressent une plus grande réserve de la part de nos banquiers. » Mais pas de coupure nette d'accès au crédit, du moins pas dans toutes les banques. « On assiste plutôt à un accès différencié selon le risque et à une augmentation des prix de l'argent », remarque Jacques Sourbier, directeur banque des entreprises chez Barclays. Pas de quoi paniquer ? Tout dépend de la situation de la trésorerie. Pour les PME qui ont su accumuler un « trésor de guerre », c'est le moment d'envisager des opérations de croissance externe. En revanche, les moins chanceuses vont devoir se rapprocher des banquiers, de leurs actionnaires, voire de leurs concurrents, pour estimer si des projets communs ne sont pas opportuns. « Les entreprises qui n'ont pas musclé leurs marges d'exploitation ont du souci à se faire », estime Sylvain Charignon, directeur de participations chez Edmond de Rothschild. En tout état de cause, « nous entrons dans une belle période pour les avocats en relecture de contrats ! » prévoit Emmanuelle Leroy, associée au département droit des financements chez Norton Rose.Crédit fournisseurAutre conséquence de la raréfaction du crédit, le retour à la prime de risque, comme définie par Bâle II, qui impose aux banques de catégoriser leurs prêts en fonction des risques réels encourus. « Les banques vont regarder attentivement toutes leurs activités pour voir ce qu'il en coûte en termes d'immobilisation de capital et de rendements », analyse Mark Foulds, associé chez Duke Street. « Le rapport fonds propres/endettement va se modifier : on ne vivra plus sur l'avenir en pariant sur la croissance », estime Jacques Sourbier. Dès lors, toutes les solutions sont bonnes pour trouver des lignes de crédit. « L'affacturage, par exemple, est une vraie ressource pour l'entreprise », déclare Sylvain Charignon. On estime qu'une PME sur deux se finance via le crédit fournisseur. Sauf que, avec la loi LME, les conditions d'affacturage vont être sévèrement modifiées à compter du 1er janvier. Une situation qui pourrait ne pas réussir à tout le monde : « La réduction des délais de paiement est une bonne chose, estime Sophie Lazard, associée chez PricewaterhouseCoopers. Mais les PME qui font de l'affacturage sont financées par les clients. Et, pour celles qui sont le plus en difficulté, la LME va être difficile à passer. » « Dans un monde où les relations sont le fruit d'un rapport de force, l'entreprise la plus fragile va se faire imposer la LME par son fournisseur et sera incapable de l'imposer à son client. Elle va devoir faire face à des réductions des délais fournisseurs sans réduction de ceux d'encaissement. C'est une très bonne idée a priori, mais c'est demander un effort inaccessible à la plupart des acteurs », confirme Jérôme Pezé, président de Tinubu Square.Faut-il céder au désespoir pour autant ? « Les entreprises doivent garder un regard positif sur l'avenir, souligne Sophie Lazard. Elles doivent se poser les bonnes questions stratégiques, être attentives aux opportunités de recrutement et en profiter pour mettre la pression sur les délais de livraison. » Une « positive attitude » qui devrait leur permettre de passer la crise et d'être prêtes pour la reprise?Les plus touchées sont les gazeLLes, car elles sont les plus endettées?. Les LBOsont aussi à la peine.
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