Emprunt EDF  :   faut-il y aller  ?

La dernière fois qu'un plan d'envergure nationale avait été lancé pour mobiliser l'épargne des Français, c'était en 1993 et il s'agissait de l'emprunt Balladur. Mercredi prochain, EDF reprendra le flambeau avec un programme obligataire de 1 milliard d'euros. Bonne rémunération, risque quasi nul, ticket d'entrée raisonnable? l'emprunt est, à première vue, intéressant. Mais, à y regarder de plus près, il ne conviendra pas à tous les épargnants.Comment fonctionne l'emprunt EDF ?Les obligations privées, c'est-à-dire émises par des entreprises, suivent toutes le même principe : le particulier prête de l'argent à une société qui s'engage à restituer les sommes au bout de quelques années. Dans l'intervalle, l'épargnant perçoit chaque année des intérêts, appelés « coupons », proportionnels à la somme prêtée. Pour faire simple, les particuliers jouent donc le rôle du banquier qui accorde un crédit à un client. Comment y souscrire ?Trois conditions doivent être réunies : posséder un compte dans un établissement bancaire français (que l'on soit ou non de nationalité française), avoir ouvert un compte titres, et disposer d'au moins 1.000 euros. Tous les grands réseaux bancaires se sont engagés à proposer d'emblée l'emprunt EDF mais il sera en revanche impossible de placer les titres au sein d'un PEA ou d'une assurance-vie. La période de commercialisation se déroulera du 17 juin au 10 juillet inclus. Vous pourrez acheter autant de titres que vous le souhaitez (au coût unitaire de 1.000 euros), mais attention : en cas de raz de marée, EDF se réserve la possibilité de clore à tout moment la souscription, à condition de prévenir 24 heures avant.Combien rapporte-t-il réellement ?Chaque mois de juillet pendant cinq ans, les coupons seront versés sur le compte titres. Les gains s'élèveront à 4,5 % du montant investi (un multiple de 1.000 euros). Sauf qu'il s'agit d'une rémunération brute, de laquelle il faut retrancher impôts et prélèvements sociaux. Comme pour un compte sur livret, vous aurez le choix entre le prélèvement forfaitaire et la déclaration à l'impôt sur le revenu. Préférez cette seconde option si votre tranche marginale est de 14 % ou moins. Si vous n'êtes pas imposable, vous paierez seulement les prélèvements sociaux, et la rentabilité passera à 3,96 %. Elle tombera à 3,71 % si vous êtes à la tranche marginale de 5,5 % et à 3,33 % si vous êtes à 14 %. Dans les autres cas, mieux vaut opter pour le prélèvement forfaitaire qui fera passer la rémunération à 3,14 %.Mais ce n'est pas tout. La plupart des établissements facturent chaque année des droits de garde sur les comptes titres, qui varient souvent entre 0,25 % et 0,3 % des montants investis. Dans ce cas, la rentabilité pourrait passer sous la barre des 2,9 %. Une petite vérification s'impose auprès de votre agence : il arrive en effet que les frais de garde soient supprimés, notamment lors des privatisations. Compte tenu de l'envergure nationale du plan, l'emprunt EDF pourrait bénéficier de cette largesse. Une chose est sûre : il a été convenu que la souscription ne donnerait lieu à aucun frais d'entrée.Ce placement est-il sûr ?Oui, à condition de garder ses titres pendant cinq ans. L'échéance de l'obligation interviendra très exactement le 17 juillet 2014. C'est ce jour-là que le capital investi sera restitué aux particuliers. Comme pour n'importe quelle obligation d'entreprise, les seuls risques de ne pas retrouver sa mise sont d'assister à la faillite d'EDF ou à une restructuration de sa dette. Un scénario presque inenvisageable puisque l'État français détient plus de 80 % du capital du groupe d'électricité. Cette obligation possède donc quasiment la même garantie que celle d'un emprunt lancé par un État.Les sommes sont-elles bloquées ?Non. Même si le marché des obligations est traditionnellement peu liquide, Calyon et la Société Généralecute; Générale assureront l'animation sur Euronext Paris. Autrement dit, ils garantiront au particulier la possibilité de revendre à tout moment leurs titres, dans les meilleurs délais, et dans une fourchette de prix resserrée. La valeur de l'obligation sera consultable depuis n'importe quel site boursier, grâce au code Isin (FR0010758888). Elle dépendra de plusieurs paramètres, dont le niveau des taux. Si ceux de la BCE remontent dans les années à venir, l'emprunt EDF pourrait fortement baisser. L'épargnant souhaitant revendre ses titres réaliserait alors une moins-value. Mieux vaut donc placer de l'argent dont on n'aura pas besoin dans les cinq années à venir. Bon à savoir : à mesure que l'échéance se rapprochera, la sensibilité de l'obligation aux taux sera moindre. Il y a un cas pour lequel le particulier aura intérêt à revendre ses titres avant l'échéance : « Si le niveau des obligations d'entreprises continue de baisser, comme c'est le cas depuis quelques mois, et que les taux de la BCE restent bas, la valeur de l'emprunt augmentera mécaniquement », juge Bertrand Lamielle, directeur de la gestion de B*Capital (lire l'interview ci-contre). Le gain peut alors atteindre 3 % à 5 % en quelques mois. Mais il faudra prendre en compte deux autres paramètres : les frais de courtage prélevés par l'établissement financier, et le montant des cessions de valeurs mobilières (actions, obligations, Sicav et FCP?) dans l'année. Si ce dernier ne dépasse pas 25.730 euros (seuil fixé en 2009), il n'y aura aucun impôt à payer sur les plus-values.Qui a intérêt à y souscrire ?Le fonds en euros d'une assurance-vie vous rapportera certainement beaucoup plus (entre 3,9 % et 4,2 % en moyenne en 2008), à condition de ne pas payer trop de frais sur les versements. En prenant pour hypothèse un rendement de 4 % par an sur le fonds en euros, les deux placements se valent si les frais d'entrée sur le contrat sont de 5 %. S'ils sont nuls, comme c'est le cas avec un contrat Internet, le gain, pour 1.000 euros investis sur cinq ans est de 60 euros par rapport à l'emprunt EDF, soit 38 % de mieux. Vous risquez d'avoir besoin des sommes investies ? Dans ce cas, l'assurance-vie est également préférable : seuls les gains y sont taxés en cas de retrait avant huit ans alors qu'il y a un risque de perte en capital pour une revente de l'emprunt EDF avant son terme.L'obligation EDF est préférable dans deux cas seulement. D'une part, si vous prévoyez une grosse dépense (achat d'un logement par exemple) dans plus de cinq ans mais dans moins de huit et que vous n'avez toujours pas souscrit d'assurance-vie. Mais il est difficile de planifier aussi précisément son projet de vie. D'autre part, si vous misez sur une plus-value à la revente dans quelques mois. Inconvénient : il faudra être prêt à conserver les titres cinq ans, car le scénario escompté ne se produira pas forcément.
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