Une loi antipiratage difficile à appliquer

La loi de lutte contre le piratage sur Internet, déjà votée en novembre en première lecture au Sénat, sera examinée début mars à l'Assemblée. Mais elle poserait moult difficultés techniques d'application qui risquent d'affaiblir le volet répressif du texte. Le CGTI (Conseil général des technologies de l'information), un service dépendant de Bercy, soulève ainsi, dans une note interne rédigée l''an dernier, une série de problèmes.La loi prévoit ainsi de suspendre aux pirates avérés l'accès à Internet, mais pas le téléphone ni la télévision, qui sont aussi fournis via l'ADSL. Pour le CGTI, « les modalités techniques envisageables pour cette suspension ne permettent pas d'isoler l'accès Internet des autres services (audiovisuel, messagerie électronique) ». « Les fournisseurs d'accès confirment que couper le seul accès Internet est techniquement possible, c'est juste une question de coût », répond le ministère de la Culture.Mais l'identification même des pirates pose problème. Les repérer est assez facile, en notant sur les réseaux peer-to-peer (P2P) les adresses Internet et les contenus piratés, qui ne sont pas cryptés. Mais « les versions les plus récentes des logiciels P2P offrent des possibilités de dissimulation des adresses et des contenus ». Et « la généralisation rapide chez les internautes d'un recours à l'anonymisation des échanges et au cryptage des contenus rendrait inopérante » le repérage des pirates. Résultat : le mécanisme prévu par la loi, « devenu quasi aveugle, deviendrait rapidement obsolète ». Face à cet obstacle, le CGTI propose d'« étudier quelles solutions permettraient éventuellement de déjouer » ce cryptage.impossibilité techniqueAutre problème, le wi-fi. En effet, il est possible que l'adresse Internet repérée sur un site pirate corresponde à une borne wi-fi. Dans ce cas, identifier le pirate est ardu : on sait juste que le pirate a été l'un des multiples utilisateurs de cette borne wi-fi. Dans ce cas, « fermer la borne paraît inappropri頻, indique le rapport. Dans le cas du wi-fi payant, l'opérateur de la borne devrait donc vérifier que chaque client n'a pas vu son accès Internet à domicile coupé pour cause de piratage. Mais, dans le cas des bornes gratuites proposées par les mairies, les universités ou autres McDonald's, « identifier les internautes » n'est pas possible, et « l'application de la loi conduirait à faire porter la responsabilité sur les élus, les recteurs, etc., ce qui n'est pas envisageable ». Dans ces cas-là, l'accès Internet devrait être restreint uniquement aux sites « utiles à la vie économique, culturelle et sociale du pays. C'est la seule mesure qui permettrait d'endiguer » le piratage via le wi-fi. Interrogé, le ministère de la Culture rappelle qu'il est prévu dans ce cas une alternative à la coupure de l'accès : l'envoi d'une « injonction de prendre des mesures », par exemple installer un pare-feu.
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