Le dollar perd son statut de valeur refuge

L'opération coup de poing de la Réserve fédérale mercredi dernier se traduit par une enveloppe supplémentaire d'un montant comparable à la totalité des sommes engagées depuis le début de la crise. Cette monétisation de la dette à grande échelle a changé la règle du jeu, en particulier pour le dollar. Même si les vendeurs se sont calmés vendredi, le coup de matraque asséné au billet vert restera gravé dans le marbre. La semaine dernière, il a perdu jusqu'à plus de 6 % de sa valeur face à l'euro pour refluer à un point bas de 1,3740, et plus de 5 % en terme d'indice pondéré face aux monnaies des principaux partenaires commerciaux des États-Unis. On n'avait pas connu un décalage de cette ampleur en un aussi court laps de temps depuis l'accord du Plaza de 1985, dont l'objectif avoué était de le faire baisser. Ce n'est pas ce que cherchait directement la Fed, encore que l'on puisse supposer qu'elle ne soit pas contrariée de voir sa monnaie s'affaiblir pour redorer la compétitivité américaine.indigestion de dollarsLa joute avec les acteurs du marché des changes a été telle que les stratèges de Standard Chartered n'ont pas hésité à titrer une de leurs notes de recherche : « Le jour où le dollar est mort ». Et les prévisionnistes d'affûter à nouveau leurs pronostics, des modérés, à l'instar de ING ou UBS qui le voient tomber à 1,40 pour un euro, aux plus sombres, qui avancent une parité de 1,45 dans les prochains mois, tels Morgan Stanley ou Barclays.Qu'est-ce qui vaut à l'idole du marché des changes d'être ainsi déboulonnée ? Outre qu'elle a amorti l'aversion au risque dont le billet vert était le grand bénéficiaire, l'opération de « Ben Rambo », le nouveau surnom du patron de la Fed, va déboucher sur une forte augmentation du bilan de la Fed. Actuellement de 2.000 milliards de dollars, il se gonflerait de 1.000 à 1.600 milliards supplémentaires selon Goldman Sachs, via les achats de bons du Trésor et l'élargissement des facilités de soutien à l'immobilier et à la consommation. La remise en marche de la planche à billets va mettre un terme à la pénurie de dollars qui sévissait dans le monde, le menaçant même d'indigestion. Si l'offre de dollars devient pléthorique, son cours ne peut que baisser. Surtout si en même temps les rendements qu'il offre fondent. Sa rémunération à long terme, via les emprunts d'État à dix ans, a connu sa plus forte baisse depuis vingt-six ans la semaine dernière.Pourtant, les marchés pourraient réviser leur jugement sur le dollar lorsqu'ils auront fait ce constat : selon les calculs de la Commonwealth Bank, la BCE a fait davantage que la Fed en matière d'assouplissement monétaire non conventionnel. Elle y a consacré 2.100 milliards de dollars, ce qui représente 22,7 % du PIB de la zone euro, les 2.200 milliards de la Fed ne correspondant qu'à 15,5 % du PIB américain.
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