Le royaume chérifien ne connaît pas la crise

« Bien entendu, nous sentons les effets de la crise », reconnaît Ahmed Chami, le ministre de l'Industrie et du Commerce, comme si les conséquences du ralentissement économique mondial sur le Maroc n'étaient pas une évidence en soi. Il est vrai qu'avec près de 5 % de croissance attendus cette année et presque autant l'an prochain, le royaume chérifien est loin de baigner comme ses voisins européens dans les affres de la déprime économique.À Rabat, les rues sont congestionnées en raison de la construction d'un tramway qui verra le jour l'an prochain. Au nord, l'aménagement de la vallée du Bouregreg entre Rabat et Salé confirme un peu plus cette dynamique. Depuis quelques années, le Maroc est le théâtre d'importants chantiers d'aménagement, de construction, initiés par le lancement des grands travaux. Outre les autoroutes et les voix ferrées, ils comprennent surtout en point d'orgue la création de Tanger Med, le premier port de transbordement d'Afrique ? en passe de devenir le premier de Méditerranée avec Tanger Med II.« Avant les forces économiques étaient géographiquement très déséquilibrées, résume Nizar Baraka, le ministre délégué auprès du Premier ministre en charge des Affaires économiques et générales. Aujourd'hui, c'est l'ensemble des régions qui profite du développement et des retombées économiques. »Parallèlement, la lutte contre la pauvreté, via l'Initiative nationale pour le développement humain (INDH) initiée en 2005 par le roi Mohammed VI, et dotée d'un budget de 800 millions d'euros, a aussi contribué à l'augmentation de la richesse par habitant de 1.407 à 2.423 dollars entre 1999 et 2009 (+ 75 %). Le miracle économique marocain ? qui s'est traduit par un doublement en dollars, du PIB en une décennie ? est en ce sens une belle revanche du modèle keynésien. « Le Maroc est devenu au cours de la dernière décennie un pays émergent », résume un diplomate européen à Rabat, qui en veut pour preuve l'importance de l'investissement, dont la part dans le PIB est passée d'un quart à un tiers en dix ans. Ce décollage du tigre de l'Atlas a été rendu possible grâce à la manne des privatisations mais aussi des subventions des grandes institutions internationales. « Ce que l'on oublie, c'est que l'octroi de financements internationaux a pu se faire grâce aux efforts fournis durant les années 1990 pour assainir les finances du pays », souligne Abdellatif Jouahri, gouverneur de la banque centrale du Maroc. En outre, au début de la décennie, le royaume chérifien est devenu une terre d'exil privilégiée pour les pétrodollars des monarchies du Golfe. Une manne touchée aujourd'hui par la crise (lire page 4). Mais le Maroc est bien armé pour résister. Non seulement les excédents budgétaires engrangés en 2007 et 2009 laissent au gouvernement de la marge, mais le pays peut aussi compter sur la chance : les fortes pluies de l'hiver dernier ont dopé les récoltes de céréales, et la production agricole devrait progresser de 20 % cette année. De quoi compenser les effets de la récession internationale? Gaël Vautrin, envoyé spécial à Rabat
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