Le grand bazar fiscal prospère

© Lanier/REA« En moyenne, 14 mesures ont été créées chaque année depuis 2003 ». Une loi de finances pour 2009, un collectif budgétaire pour 2008, adopté définitivement hier par le Parlement, un autre pour 2009, qui sera discuté à partir du 6 janvier : jamais, en si peu de temps, autant de mesures fiscales nouvelles n'auront vu le jour (voir encadré). De là à dire que ces réformes sont venues renforcer la cohérence générale du système, on en est loin. Ce serait même l'inverse. Le meilleur exemple est celui des fameuses niches fiscales. Voici quelques mois, la commission des Finances de l'Assemblée, sous la responsabilité du socialiste Didier Migaud et de l'UMP Gilles Carrez, s'est fendue d'un rapport plus que critique sur l'existence de quelque 486 dispositifs d'allégement d'impôts représentant une perte de 73 milliards d'euros pour l'État, soit 27 % de l'ensemble des recettes fiscales nettes. « En moyenne, 14 mesures ont été créées chaque année depuis 2003 », insiste le rapport. « On compte plus de 50 dispositifs différents concernant l'immobilier pour 11 milliards d'euros », déplorait encore la semaine dernière Frédéric Lefebvre, le secrétaire national de l'UMP à l'Économie. Un paradoxe, surtout pour Nicolas Sarkozy qui avait annoncé, lorsqu'il était ministre du Budget de 1993 à 1995, qu'il serait le ministre du grand nettoyage des niches.toujours de bons motifsOr, entre la mise en ?uvre du Grenelle de l'environnement et celui du plan de relance, les niches prospèrent. Naturellement pour de bons motifs à chaque fois. Par exemple, la majoration du crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt pour l'achat de logements « écologiques » a certainement une logique de long terme à défaut d'une logique fiscale. Le gouvernement pourra rétorquer que le projet de loi de finances pour 2009 contient une amorce de rationalisation. Ainsi, du plafonnement global à 25.000 euros plus 10 % du revenu imposable de l'avantage procuré à un contribuable par les niches. Ou un meilleur encadrement du dispositif concernant les investissements dans les DOM. Mais le gouvernement n'a pas été jusqu'à soutenir la suppression de la demi-part accordée aux parents isolés ? le prototype même de la niche dont l'utilité reste aujourd'hui à démontrer ? proposée par le rapporteur général du Budget du Sénat, Philippe Marini. Il l'a simplement limitée aux contribuables ayant élevé des enfants pendant plus de cinq ans. Autant dire que cette niche est encore là pour longtemps. Autre incohérence : un nouvel avantage fiscal en faveur de l'immobilier locatif va entrer en vigueur le 1er janvier, mais le dispositif Robien, pourtant critiqué, perdurera quelque temps ! Bricolage toujours avec une nouvelle taxation, l'annualisation de l'écovignette, touchant les gros véhicules très polluants qui a vu le jour, malgré la bronca de certains députés de la majorité. Pour éviter de mécontenter Jean-Louis Borloo, héraut du Grenelle de l'environnement, le gouvernement a finalement coupé la poire en deux : le malus sera bien annualisé, mais à un très faible montant. Cherchez la logique? De même, l'ISF et le bouclier fiscal continuent d'alimenter les polémiques entre majorité et opposition, voire à l'intérieur de la majorité. Qu'à cela ne tienne : Jean Arthuis, le président de la commission des Finances du Sénat, a proposé de mettre tout le monde d'accord ou presque en supprimant et le bouclier fiscal et l'ISF, et en instituant à la place une tranche supérieure de l'IR. Visiblement trop simple, la proposition n'a rencontré aucun succès. Le grand bazar fiscal a encore de beaux jours devant lui. n
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