Un écrivain raconte  : « Je fai

Un écrivain raconte : « Je fais régulièrement des signatures dans les librairies que j'aime »Récompensé par le prix Interallié 2008, Serge Bramly a aussi obtenu le prix des Libraires en 1983 pour « La Danse du loup » (éditions du Masque). Il prépare, avec Bettina Rheims, un livre de photos. Et parle de son rapport avec les libraires.Il y a dix ans, on disait les librairies condamnées par la grande distribution?Heureusement, c'est le contraire qui se passe. La profession soi-disant moribonde a redoublé d'efforts pour prouver sa vitalité et son importance. Elle a incroyablement évolué et à son avantage. Les libraires ont innové, bousculé les habitudes, créé des espaces de lecture. Ils connaissent le goût de leur public. Ils orientent par des fiches, des notes, des commentaires. Face à la surproduction de livres, au tout-conso, on a plus que jamais besoin de conseils sérieux. Dans cette jungle, le bon libraire s'impose en guide et garde-fou essentiel. Le lecteur peut encore se tourner vers eux pour avoir un vrai avis critique. Son enthousiasme porte les auteurs, il est notre dernière bouffée d'oxygène. Quelle influence les libraires ont-ils sur le marché ?Rien ne remplace l'efficacité du bouche-à-oreille. La saga « Millenium », par exemple, est d'abord un choix de libraires. Ils sont capables d'aller repêcher des livres que les éditeurs ou les journalistes ont négligés. Cette capacité de soutenir de bons livres, d'arriver à les faire exister et leur donner vie envers et contre tous me paraît essentielle. Et n'a pas de prix dans le système du commerce actuel. Certains sont des monuments, des références. Qui ne connaît Le Furet du Nord à Lille ou Mollat à Bordeaux ? À Deauville, les deux petites librairies (La Maison de la Presse et La Librairie du Marché) sont capables d'épuiser un tirage en une saison malgré le manque de place, etc. Ils lisent et s'ils aiment, ils arrivent à convaincre leur clientèle. La simple manière de présenter, ? en vitrine, en tête de gondole ? peut faire la différence. Comment résister aussi à ces librairies « manifestes » qui vont à l'encontre des règles commerciales, affichent des choix et des opinions (parfois « à ne pas lire ») et ont toujours de bonnes piles de livres inattendus à partager. Les rapports entre libraires et auteurs ont-ils changé ?Pour les auteurs, les libraires sont devenus les premiers interlocuteurs, souvent par l'intermédiaire des éditeurs. Ils nous permettent d'être plus proches des lecteurs. C'est d'autant plus important qu'il y a pléthore de titres. Entre best-seller et tirage confidentiel, il n'y a plus rien, la classe moyenne semble avoir été laminée. Comment, par exemple, la poésie, vivrait-elle sans les libraires ? Ils sont moins influençables qu'on ne le pense. On ne peut pas leur en raconter. Je ferais un parallèle avec l'univers de la gastronomie. Le métier est dur mais il y a un regain d'intérêt pour la profession et ceux qui font leur marché eux-mêmes impriment une différence. Rien ne vaut le plaisir de la découverte chez le libraire quand on a envie de flâner. Je regrette pourtant la disparition des bouquinistes et des spécialistes de livres anciens qui diminuent comme une peau de chagrin. Signe des temps ? Je participe à un jury en juin prochain (prix Orange) et la moitié des jurés sont des libraires. C'est une excellente nouvelle. Et de toutes les façons, je voue une gratitude éternelle aux libraires, car ce sont eux qui ont placé « La Danse du loup » sur le devant de la scène. Cette récompense a été une très belle victoire et un joli pied de nez aux spécialistes.Propos recueillis par Catherine Deydie
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