La réforme de l'État bute sur l'informatique

C'est bien entendu, l'informatique permet des économies importantes. Mais quand l'État investit massivement dans les hautes technologies, pour accélérer sa réforme, il n'est pas à l'abri de surprises. Entendu début novembre par les députés à ce sujet, Éric Woerth a dû se résoudre à deux aveux au nom de la « plus grande transparence ». Interrogé sur les grands projets informatiques en cours, le ministre du Budget a indiqué que le coût complet de Copernic atteindra 1,8 milliard d'euros, soit deux fois le montant prévisionnel initial. Copernic, lancé en 2001 et prévu pour s'étaler sur neuf ans, est un chantier informatique consistant d'abord à créer des liens électroniques avec les contribuables. Les applications les plus connues du grand public sont, pour les particuliers, la télédéclaration de l'impôt sur le revenu, et, pour les professionnels, TéléTVA. L'écart entre le coût initial et le coût final s'explique par le poids des dépenses s'ajoutant au coût direct initial. Éric Woerth chiffre ainsi à 510 millions le coût du personnel administratif mis à disposition du programme, avec les dépenses de formation afférentes. Le coût de la maintenance atteindrait 390 millions d'euros. Le deuxième aveu d'Éric Woerth concerne un autre chantier informatique, Chorus. Ce système « a pris une année de retard et devrait être opérationnel vers 2011 », a indiqué le ministre devant les parlementaires. Les députés, particulièrement attentifs, venaient de recevoir un rapport demandé à la Cour des comptes par la commission des Finances de l'Assemblée. Selon nos informations, ce document, non public, est très sévère sur la conduite du programme Chorus. Performance Ce projet lancé en 2006 est appelé à remplacer les outils existants afin de doter l'État d'un système commun de gestion financière, budgétaire et comptable. Cet outil, actuellement expérimenté au ministère du Budget, doit permettre une mise en ?uvre complète de la LOLF, la nouvelle constitution financière de la France, qui introduit la culture de la performance dans l'administration. Or la Cour des comptes paraît douter du résultat. Notamment en ce qui concerne la capacité de Chorus à réaliser une comptabilité analytique, en vue d'un pilotage par la performance. À la clé, le risque que les ministères soient contraints de conserver leurs anciennes applications? Elles sont au nombre de 350? La Cour des comptes voit dans cette situation un problème de pilotage du projet. Dans un rapport de 2007, elle avait d'ailleurs déjà dénoncé ce point en évoquant une conduite des systèmes d'information « désordonnée ». Enfin, ses observations portent sur la maîtrise des coûts. Des chantiers de cette envergure, y compris dans de grandes entreprises privées, donnent souvent lieu à des dépassements. Chorus ne devrait pas faire exception à la règle. Le gouvernement a fixé le coût prévisionnel total à 1,11 milliard d'euros en intégrant les dépenses de maintenance à partir de 2011. Or cette estimation fait l'impasse sur deux points : 78 millions de dépenses de fonctionnement de l'Agence pour l'informatisation financière de l'État qui pilote le projet et 80 millions d'euros à la charge des différents ministères pour adapter leurs applications au nouveau programme. Des progrès restent donc à faire en matière de transparence. Les députés pourraient d'ailleurs vouloir entendre Éric Woerth et les responsables de l'AIFE d'ici à la mi-décembre.
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