Le coup-de-poing irlandais

mé à cannesEncore un héros martyrisé. Après Baader et Mesrine, le cinéma n'est pas en reste, ressuscitant, en France, en Grande-Bretagne ou en Allemagne, les grandes figures ultra-radicales qui ont secoué l'opinion dans l'Europe des années 70. Il y aura bientôt Carlos. Coïncidence ? Sans doute?Voici venir cette semaine Bobby Sands, dans le film « Hunger », qui a gagné la caméra d'or du meilleur premier film au dernier Festival de Cannes. Ce gréviste de la faim (devenu le symbole de la révolte irlandaise face à Londres, élu symboliquement député par ses pairs) réclamait en 1981 le statut de prisonnier politique pour ses camarades et pour lui-même. Il est allé jusqu'à la mort, et la reconnaissance de son combat par les autorités britanniques fut posthume. Maggie Thatcher ne plaisantait pas...l'?il d'un peintreC'est un brillant plasticien qui a reconstitué cette tragédie, l'Anglais Steve McQueen. Le monde entier connaît déjà ses vidéos sur la guerre en Irak. Si sa démarche est humaniste, son ?il est celui d'un peintre. Son film est aussi beau qu'insoutenable dans sa restitution de l'horreur d'une détention où règnent la torture, la souffrance, les passages à tabac? Le premier tiers du récit montre Sands et ses camarades enfermés dans leurs cellules de Maze, près de Belfast, où ils résistent à leur façon aux coups qu'on leur assène, en barbouillant leurs murs d'excréments, de vomissures et de sang.Puis il y a ce saisissant dialogue avec le père Moran (20 minutes à l'écran) qui vient recueillir la confession du prisonnier, sachant que c'est sans doute la dernière fois qu'il le voit vivant.Enfin, c'est le chemin de croix qui conduit Bobby au bout de sa révolte et de sa vie, à 27 ans? Le corps du comédien qui l'interprète se transforme, jusqu'à n'être qu'une momie parcheminée, couverte d'escarres, tuméfiée, jusqu'au dernier souffle de vie?C'est aussi impressionnant qu'insupportable. À 39 ans, Steve McQueen parle du passé pour mieux évoquer le présent. Sa cellule britannique renvoie à celles de Guantanamo. C'est un très grand premier film, en forme de coup-de-poing.Michel Pascal
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