« La vision fondamentale des analystes n'est plus prise en compte »

La crise financière met à mal tous les professionnels de la finance, comment se positionnent les analystes financiers dans ce maelström ? Ce qu'il faut savoir, c'est qu'il n'y a pas qu'une seule sorte d'analystes. On dénombre aujourd'hui au moins huit métiers différents, dont les analystes crédit, dérivés, les stratégistes, etc. Les analystes sell-side qui font des prévisions ont effectivement aujourd'hui bien des difficultés à évaluer l'ampleur des dégâts. Et leur vision fondamentale n'est absolument pas prise en compte par les investisseurs. On est sorti des limites de l'épure et je pense que les analystes doivent faire leur travail à partir de cet état de fait. Je constate d'ailleurs que l'on commence à revoir un peu plus de pertinence dans les évolutions de cours depuis une semaine avec une moindre désaffection pour les valeurs défensives. Ce qui traduit à mes yeux un début de retour à la rationalité. Cette tourmente risque de mettre en difficulté un certain nombre d'analystes. La SFAF a-t-elle l'intention de se préoccuper de ce problème ?La tourmente que nous connaissons actuellement va indéniablement mettre en péril nombre d'emplois dans l'analyse financière. Pour venir en aide à cette catégorie de salariés, la SFAF a d'ores et déjà identifié plusieurs pistes d'accompagnement. D'abord en leur proposant des formations spécifiques, mais aussi des bilans de compétence. On envisage aussi de développer des partenariats avec des chasseurs de tête avec lesquels nous travaillons régulièrement et qui sont, pour certains d'entre eux, d'anciens membres de la SFAF. Nous avons, par ailleurs, fréquemment des demandes d'évaluation ou de travaux d'analyses de la part d'émetteurs. Nous allons organiser une sorte de place de marché où nous pourrions alors mettre en rapport les analystes demandeurs pour des missions ponctuelles.Vous venez d'être réélu à la tête de la SFAF. Quelle mission vous donnez-vous pour les prochains mois ? La SFAF est en pleine mutation. Nous avons revu totalement notre organisation opérationnelle et la crise nous pousse à mettre les bouchées doubles. Nous avons trois grands chantiers que je compte bien accélérer et ce, de manière à conforter la marque SFAF. D'abord, nous allons renforcer notre pôle formation, avec des sessions toujours plus pointues, plus internationales et à destination d'un plus large public en systématisant des formats adaptés au DIF (droit individuel à la formation). Ainsi pensons-nous faire des incursions dans le monde de l'entreprise pour former managements et employés à l'actionnariat salarié. De même, voulons-nous développer notre offre vis-à-vis des émetteurs. À l'heure actuelle, nous organisons près de 900 réunions de présentations de résultats par an, ce qui représente 69 % à peu près des émetteurs cotés à Paris. Ce qui nous laisse de la marge. Parmi nos priorités, nous envisageons donc de proposer de nouvelles prestations dans le cadre de ces réunions annuelles (comme des questionnaires express réalisés à leur issue, de manière à renseigner les dirigeants sur la pertinence du message qu'ils voulaient faire passer), mais aussi de mettre à disposition nos locaux pour ces rendez-vous très attendus de la communauté financière, du moins pour les small et mid caps. Enfin, nous allons mettre en place un nouveau dispositif plus musclé pour accroître le nombre de nos membres. Sachant que nous constatons, depuis plusieurs années, une sérieuse déperdition compte tenu d'une série de dérives, notamment financières, certaines sociétés de Bourse ne voulant plus payer les cotisations de leurs salariés. Nous allons, pour cela, devenir plus offensifs auprès des différents acteurs de la finance, en démarchant notamment de nouvelles filières. Autre projet qui nous tient à c?ur : la modernisation de notre site Internet avec une meilleure interactivité vis-à-vis de nos membres et une plus grande visibilité. Notre objectif est bien évidemment de sortir renforcés de cette période difficile alors que, sur l'exercice 2007-2008, le résultat de l'association s'est révélé positif à hauteur de 276.000 euros. Issue qui sera plus difficile à tenir lors du prochain exercice. Je pense d'ailleurs que 2009-2010 sera pire. Pour l'heure, une chose est sûre, nous voulons reprendre l'offensive, mener une stratégie dynamique et nous montrer à l'écoute de nos membres.Quelle est votre position vis-à-vis de la directive transparence ? Sur le fond, il est bon d'avoir toujours plus d'information. Dans la forme, ce dispositif est démentiel. L'obligation de publier les comptes trimestriels au maximum deux mois après clôture des comptes n'a pas de sens. Il met en difficulté toutes les petites et moyennes entreprises, 150 d'entre elles ayant d'ailleurs publié leurs résultats après la date butoir cette année. La présentation de comptes trimestriels n'est rien d'autre que de la poudre aux yeux. L'activité d'une entreprise se juge sur le moyen long terme et le court-termisme est contre-productif. Nous militons avec d'autres associations pour que ce principe s'assouplisse. Il est indispensable que cela évolue ainsi. Propos recueillis par Pascale Besses-Boumard
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