Un projet qui suscite des interrogations

Après la réussite de l'alliance Renault-Nissan, l'idée d'une union à trois donnant naissance au plus gros rapprochement de l'industrie automobile mondiale (plus de 14 millions de véhicules vendus) pose plusieurs questions. L'industrie automobile mondiale est certes entrée dans une crise profonde. La bataille fait rage entre les constructeurs, non seulement aux États-Unis mais également en Europe : les restructurations se multiplient et la guerre des prix s'intensifie. Bon nombre d'observateurs parient sur une recomposition du secteur, l'alliance en vue entre Renault-Nissan et GM pouvant donner le coup d'envoi à d'autres annonces. Dès lors, certains estiment que Toyota, en passe de ravir la place de leader mondial à GM et très présent aux États-Unis, devra réagir.En attendant, aux États-Unis, les analystes du secteur automobile ne sont pas hostiles à une alliance entre les groupes franco-japonais et américain. Mais ils doutent des bénéfices que pourrait en tirer General Motors. " Les surcapacités industrielles de GM tout comme celles de Renault-Nissan s'élèvent à 30 %. Elles limitent le potentiel de leurs synergies ", juge Jon Rogers chez Citigroup.Celui-ci note en outre que " la stratégie de GM est axée sur les véhicules larges comme les SUV (4x4 de loisirs) quand celle de Renault-Nissan est tournée vers des véhicules plus légers, ce qui là encore réduirait les compressions de coûts "." Ce type de collaboration prend généralement beaucoup de temps pour se concrétiser au niveau industriel alors que GM a besoin de régler ses problèmes au plus vite", note David Zoia du groupe Ward's Communication, dont les publications professionnelles font référence dans les milieux automobiles américains. "De plus, la possibilité d'un rapprochement est évoquée au moment où Renault et Nissan montrent des signes patents de faiblesse. "Comprimer les coûts. Pour certains spécialistes, l'opération de croissance externe peut sembler prématurée pour Renault, à peine lancé dans son vaste plan " Contrat 2009 " initié par son patron (qui est aussi celui de Nissan) Carlos Ghosn.Pour d'autres, la baisse de régime enregistrée en Europe et en France par le constructeur au losange devrait l'inciter à trouver de nouveaux débouchés. " Des synergies industrielles sont possibles en Europe, Renault pouvant certainement occuper la place abandonnée par Fiat après l'échec de son alliance avec GM, que ce soit dans la construction de moteurs ou dans l'achat d'équipements ", estime David Zoia. " Sur le Vieux Continent, GM pourrait aussi comprimer les coûts de sa filiale Opel si Renault était prêt à partager ses usines et son expertise en matière de moteurs diesel ".Au niveau du management, les risques sont cependant importants. En allant proposer cette alliance directement à Carlos Ghosn, Kirk Kerkorian a clairement fait savoir que Rick Wagoner, le patron de GM, n'était pas l'homme de la situation. Mais, en partageant déjà son temps entre le Japon, l'Europe et les États-Unis, Carlos Ghosn a déjà un emploi du temps bien chargé.Pour Standard and Poor's, " la capacité des trois partenaires à structurer, se mettre d'accord et réaliser des synergies en matière de production, d'achats et dans d'autres secteurs est douteuse compte tenu de leur évidente complexité ".Sans oublier la renégociation cruciale des acquis sociaux, des salaires et de la restructuration du groupe avec le puissant syndicat UAW en septembre 2007. Rick Wagoner a, lui, de bon contact avec les syndicats... qui s'inquiètent déjà d'une éventuelle arrivée de Renault-Nissan.
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