Les zones d'ombre de la réforme des faillites

La loi de sauvegarde des entreprises contient encore des zones d'ombre. Ses décrets d'application devront s'atteler à les combler d'ici au 1er janvier 2006, date d'entrée en vigueur de la réforme. "Il faut que ces textes soient simples. Mais je suis persuadé qu'ils respecteront l'esprit du législateur, ce qui n'est pas toujours le cas", a avancé le président de la commission des Lois au Sénat, Jean-Jacques Hyest, le 13 septembre, lors d'un colloque organisé par la chambre de commerce et d'industrie de Paris. Les services de la chancellerie sont en train de les préparer et se disent confiants pour respecter le délai imparti. "Le succès de cette réforme dépendra en grande partie du changement de comportement et de culture des entrepreneurs, mais aussi de leurs créanciers. C'est une question de confiance réciproque. Il n'est pas admissible que les procédures collectives inspirent de la crainte aux entrepreneurs et aux salariés", a insisté le garde des Sceaux, Pascal Clément.Pour y remédier, l'entrepreneur aura seul l'initiative pour engager son entreprise dans la principale nouveauté de la réforme qu'est la sauvegarde (sorte de redressement judiciaire anticipé). L'administrateur judiciaire ne sera toutefois pas démuni de moyens. "Lors de la sauvegarde, il pourra refuser la continuation des contrats", a indiqué l'avocat marseillais Christian Lestournelle. Un accord entre les créanciers privés et publics devra aussi être trouvé afin d'établir un plan de sauvegarde. Remise de créances. Pour Philippe Leroy, secrétaire général du Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri, pour les entreprises de 400 salariés et plus), il ne faudrait pas non plus arriver à ce qu'une entreprise en difficulté prévoie à l'avance dans son passif les remises de créances publiques qui lui seront acceptées. "Il est souhaitable qu'il y ait des négociations coordonnées entre les créanciers publics et privés", a-t-il précisé. D'autant que l'épée de Damoclès européenne existe. Certaines remises de créances publiques ne devront-elles pas être notifiées à la Commission européenne sur le terrain sensible des aides d'État ? "Notre premier objectif est d'éviter une telle notification systématique", a insisté Philippe Leroy.Autre question : les créanciers publics doivent-ils faire le même effort que les créanciers privés dans l'accord ? "La loi parle d'un effort concomitant, répond Thierry Montéran, avocat associé chez UGGC & Associés. Le législateur invite le créancier public à se placer sur le marché." Une position non partagée par Jean Hue, directeur adjoint à la direction générale de l'Urssaf Paris-région parisienne, intervenant à titre personnel, pointant du doigt un problème : "En cas d'ouverture de la sauvegarde, le paiement des cotisations et des majorations et pénalités continuera de courir au regard du dernier alinéa de l'article L. 243-5 du Code de la Sécurité sociale."Les décrets d'application sont donc fortement attendus, dans un contexte économique bien difficile. Car, selon Euler Hermes Sfac, les défaillances d'entreprises ont progressé de 5,1 % au premier semestre. Le spécialiste de l'assurance-crédit prévoit quelque 51.000 cas de défaillance en 2005, ce qui serait le niveau le plus élevé depuis 1998. Les juges vont aussi jouer un rôle majeur pour réussir la réforme. Le tribunal de commerce de Paris ouvrira en janvier 2006 une chambre spécialisée sur la sauvegarde.F. H. et A. P.
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