Quand l'histoire s'emmêle

Il y a deux ans, le Belge Jan Lauwers séduisait Avignon avec une Chambre d'Isabella truffée de chants et de danses. En quittant ce spectacle marqué par la forte personnalité de la comédienne Viviane De Muynck, tout le monde ou presque fredonnait un We go on nostalgique. Le voilà de retour dans la cité des Papes avec deux productions. L'une étrange et complexe (le Bazar du homard) à l'opposé des riches souvenirs de la vieille Isabella, l'autre sombre et dérangeante (la Poursuite du vent).Le Bazar du Homard, c'est d'abord un décor blanc, plateau et structures, dont les formes font penser à des totems japonisants. Une modernité clinique, si ce n'était un amas de bûches côté cour. Au centre, un écran suspendu, et ailleurs quelques micros. Ce Bazar commence comme une émission de télé glamour avec des personnages en tenues strass et paillettes murmurant un cantique pop et engageant quelques mouvements dansants après la projection d'un film où l'on ne voit que la mer et un homme inquiet assis dans son bateau gonflé.Une société de clones. Entre le généticien Axel, père notamment de deux clones (un homme caméléon et... un ours), et sa femme Theresa, il y a mort d'enfant. Mais dans quelles circonstances ? Pas simple ! La psy de service, Catherine, n'éclaire pas vraiment la situation. Si la pièce tente de remonter le fil, depuis ce restaurant où un vrai-faux serveur, immigré sans papiers, a renversé le homard à l'armoricaine sur le pantalon d'Axel, jusqu'à une scène d'une violence extrême projetée sur l'écran où, en bord de mer, deux adolescents se tapent dessus (bruitage hallucinant) au point que l'un reste inanimé sur le sable sans que les adultes n'interviennent, c'est qu'il y a chez Lauwers l'inquiétude d'une perte de sens. Si l'on y prend garde, une société de clones sans âme nous pend au nez. Bien. Mais cette histoire assez foldingue dans sa forme se développe devant nous, comme à la télé, avec des comédiens-danseurs qui interpellent le public. Du coup, on en voit tous les trucages et le propos s'emmêle les fils.C'est autrement plus percutant quand, sous une pluie de lampions plus ou moins lumineux, Lauwers met en scène Viviane De Muynck dans la Poursuite du vent. Elle donne à entendre le texte des mémoires de l'écrivain et journaliste Claire Goll. Publié en 1976, un an avant sa mort à Paris à l'âge de 87 ans. Des souvenirs, plus ou moins vrais, d'une violence - notamment envers sa mère - et d'une crudité folle. Les deux spectacles jusqu'au 15 juillet au Festival d'Avignon. Tél. : 04.90.14.14.14.
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