L'envol de la croissance aiguise l'appétit des syndicats allemands

Le plus difficile commence peut-être pour l'économie allemande. Alors que la consommation des ménages pourrait être cette année le principal relais de la croissance, les acteurs sociaux doivent résoudre une difficile équation. Car si des hausses massives de salaires dynamiseraient la demande intérieure, elles risqueraient aussi d'affaiblir la compétitivité des entreprises à l'exportation et d'alimenter une inflation désormais menaçante. Dans la chimie, la construction et les services publics, ainsi que chez Volkswagen et RWE, les syndicats réclament des revalorisations salariales de 5 à 7 % cette année - au grand dam du patronat qui ne veut rien entendre et propose souvent à peine plus de 2 %. Vendredi, Dieter Hundt, le président de la Fédération des employeurs, la BDA, a jugé ces prétentions « exagérées » et « illusoires »... Reconnaissant toutefois la nécessité d'une hausse du « salaire réel », du reste espéré par le gouvernement, chancelière en tête, il a réclamé la « poursuite de la politique salariale flexible et centrée sur la productivité de ces dernières années ». Attisés par la forte croissance du PIB l'an passé (+ 3,6 %), les syndicats affûtent pourtant leurs arguments. D'abord, la hausse des salaires a été modérée en 2010, afin de permettre aux entreprises de reprendre leur souffle après la crise de 2009. Vendredi, Destatis, l'Insee allemande, révélait ainsi que les salaires négociés par les syndicats avaient en moyenne progressé de 1,6 % en 2010 - pour une inflation de 1,1 %. En 2009, la hausse avait été de 2,8 %, pour une inflation de 0,4 %. Et si la moyenne générale des salaires nets a connu, avec une hausse de 3,4 %, sa première augmentation en termes réels depuis 2004, la plus grande partie de la richesse créée outre-Rhin continue à être conservée par les entreprises. La part des salaires dans le revenu national a reculé en 2010 de 68,4 % à 66,3 %. Voici dix ans, cette proportion était de 72,2 %. C'est dire si, pour les syndicats, il existe des marges de manoeuvres. D'autant que plusieurs d'entre eux se sont découvert une nouvelle arme : le manque, désormais alarmant, de main d'oeuvre qualifiée. Crainte renaissante de l'inflationPour conserver et attirer leurs ingénieurs et techniciens, les employeurs vont devoir se montrer généreux. On comprend alors l'appétit des organisations syndicales. Pourtant, comme souvent outre-Rhin, il y a fort à parier que ces discussions aboutissent à des compromis. Celui dégagé à la Deutsche Bahn début janvier à la suite d'une médiation pourrait servir d'exemple. Les salariés y ont obtenu deux hausses de salaires, de 1,8 % en mars et de 2 % en janvier 2012. Reste à savoir si une telle issue est en mesure de doper la consommation. Alors que les ventes de détail de décembre ont déçu hier les observateurs, trois faits risquent de limiter la portée de ces négociations : la crainte renaissante de l'inflation, le fait que 40 % des salariés allemands n'ont pas une rémunération fixée par ce type de discussion et, comme l'a souligné récemment le chef de l'agence fédérale de l'emploi, Frank Jürgen Weise, la précarisation de l'emploi en Allemagne qui conduira dans l'avenir à une « revalorisation faible des salaires ».
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