ArcelorMittal lève le voile sur ses mines

C'est une petite révolution à laquelle se prépare ArcelorMittal. Le leader mondial de la sidérurgie a décidé de publier de façon séparée à partir du premier trimestre 2011 les résultats financiers de sa division minière, aujourd'hui invisibles. Objectif : « cristalliser », « externaliser » plus de valeur de ses actifs miniers, comme disent les analystes. Formulé plus prosaïquement, soutenir son cours de bourse, troisième plus forte baisse du CAC cette année, en déplaçant la perception du groupe par les marchés vers celle d'un groupe minier. Car ArcelorMittal souffre, affaibli par la demande molle des économies OCDE, alors que les groupes miniers prospèrent, dopés par la demande des pays émergents. « Les investisseurs pensent encore très sidérurgie lorsqu'ils regardent ArcelorMittal, pourtant quatrième producteur mondial de minerai de fer derrière Vale, BHP et Rio Tinto », observe Aurélien Bonneviot, analyste chez Oddo. « Le groupe à tout intérêt à mettre l'accent sur ce business très rentable, alors que la sidérurgie reste pénalisée par des surcapacités importantes en Europe et un marché de la construction morose au États-unis. Nous pensons pour notre part que la majeure partie de la valorisation d'ArcelorMittal se trouve dans ses actifs miniers ». L'intégration verticale d'ArcelorMittal constitue une de ses grandes forces, dans le contexte actuel des prix historiquement élevés des matières premières. L'entreprise, autosuffisante à 64 % sur le minerai de fer l'an dernier (un taux inhabituellement élevé lié à la baisse de la production) devrait en produire environ 50 millions de tonnes cette année. Elle vise le double à l'horizon 2015, soit 100 millions de tonnes. Le groupe compte également accroître sa production de charbon, qui a assuré 21 % de ses besoins l'an dernier. Mais ArcelorMittal est aujour-d'hui peu disert sur ses mines dans sa communication financière. Dans ses résultats, il ne dévoile que son volume de production trimestrielle de minerai de fer et de charbon, rien d'autre. Rien non plus sur sa politique de tarification interne de ses productions. Mais les analystes estiment qu'ArcelorMittal vend à ses usines les matières premières qu'il extrait à un prix couvrant ses coûts de productions, augmenté de quelques pour cent, citant un ordre de grandeur de 40 à 70 dollars par tonne de minerai de fer, contre un prix d'environ 160 dollars sur les marchés au comptant. « On pense que les actifs miniers subventionnent un peu les actifs sidérurgiques », résume un analyste.Changement comptableOr les résultats des activités minières devraient être basés sur les prix spot, permettant une présentation flatteuse. « Le processus vise à séparer la production des mines potentiellement vendables à des tiers, soit 8 à 10 millions de tonnes (de minerai de fer) sur 12,5 millions au dernier trimestre. L'idée serait d'établir le prix qu'elles pourraient atteindre sur le marché », indique le groupe. Conséquence de ce changement comptable, les divisions aciers devront encaisser un brutal renchérissement de leurs approvisionnements, en passant d'un prix interne à un prix de marché. Leurs résultats en souffriront. Cette évolution « pourrait accroître la pression sur les usines les moins rentables du groupe qui devront subir un coût des matières premières proche des prix de marchés », indique Aurélien Bonneviot. Les aciéries intégrées (accolées aux mines) ou proches des zones de production de minerai bénéficient en effet d'avantages compétitifs. C'est un des paramètres expliquant que les aciers plats du groupe soient deux fois plus rentables en Amérique qu'en Europe, où le minerai est importé. Les analystes sont partagés sur le bénéfice qu'ArcelorMittal pourra retirer de cette réallocation de ses bénéfices, qui ne changera rien à l'échelle des résultats de l'ensemble du groupe. UBS juge improbable qu'elle « libère de la valeur » mais applaudit la décision, qui améliorera la lisibilité d'ArcelorMittal. « La séparation des résultats des mines permettra que chaque division soit comparée sur ses mérites propres, sans ses approvisionnements captifs en matière première », souligne la banque.
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