L'éditorial de Valérie Segond

Faut-il se réjouir de voir ceux que l'on appelle par paresse « les économies émergentes » rebondir à plus de 10 % l'an, en espérant qu'elles finiront par sortir nos vieilles économies de leur léthargie ? On peut considérer que le réveil du consommateur chinois aidera à corriger les déséquilibres globaux, et que nos champions de l'habillement comme des cosmétiques, de la distribution et du luxe sauront en tirer le plus grand profit. Car, au moins, dans ces secteurs longtemps négligés par Pékin, la Chine n'a pas encore de champion mondial. Pas plus d'ailleurs que l'Inde ou le Brésil. Seulement, ce qui est effrayant ici, ce n'est pas tant leur rythme de croissance, que l'on peut aussi imputer à un rebond postcrise, que l'écart entre eux et nous. Euler Hermes SFAC relève que, à la fin avril, la production industrielle des pays émergents était de 10 % au-dessus de son niveau d'avant-crise, quand, pour les pays dits développés, elle était de 10 %... inférieure ! En ce sens, la crise est sortie du phénomène de cycle, pour enclencher une bascule historique. Car cet écart crée une dynamique qui nous est fatale : entre l'écart des gains de productivité, celui de l'évolution des populations en âge de travailler, et un investissement en pourcentage du PIB deux fois plus élevé dans les zones émergentes que dans les grands pays de l'OCDE, leur potentiel de croissance est désormais trois fois plus rapide que le nôtre, a calculé Natixis. Et pendant qu'ils accumulent toujours plus d'épargne, nos déficits publics galopants asphyxient encore un peu plus notre activité. Sans compter que l'argent ne va plus s'investir que là où est la croissance. En un mot, l'écart ira grandissant, car leur croissance nous cannibalise plus qu'elle nous tire. Un nouveau concept est né : les pays en voie de sous-développement. Mais cette fois, c'est nous ! [email protected]
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