La Turquie, un tigre dans le moteur européen

« Fort comme un Turc » : le pays, candidat à l'Union européenne, a de quoi montrer ses muscles  : au premier trimestre de cette année, il affiche, avec un taux de 11,7 %, la quatrième meilleure croissance des pays émergents - juste derrière les pays asiatiques, dont la Chine. Et devance tous les pays de l'Europe émergente, ainsi que ceux d'Amérique latine (celle du Pérou, meilleure performance régionale, s'établit à 9,3 % sur le premier trimestre). Certes, la super-croissance du PIB turc au début de cette année n'est, selon les économistes, qu'un rattrapage logique, après la chute vertigineuse qu'a connue l'activité économique au début de l'an dernier. Plombé par la crise mondiale, le PIB turc s'était contracté de 14,7 % au premier trimestre 2009, un plongeon inédit dans l'histoire économique - pourtant tourmentée - du pays. Et cette reprise en « V » ne devrait pas durer. « Nous tablons sur une croissance de 5 % seulement sur toute l'année 2010 », prévient un économiste d'Istanbul qui préfère l'anonymat. Les experts de Natixis, à Paris, ne sont guère plus optimistes, avec une prévision à 5,5 %. Tous mettent en avant les mêmes éléments modérateurs de croissance : ils vont de la persistance d'un taux de chômage élevé (13,7 % actuellement), induisant une stagnation des salaires, à des incitations fiscales à l'achat de produits tels que des réfrigérateurs ou des lave-linge, qui prendront bientôt fin, en passant par le fait que l'Union européenne, qui a absorbé l'an dernier 45 % des exportations turques, aura du mal, compte tenu de sa méforme économique, à faire mieux cette année. Réactive à la criseIl n'empêche, l'Europe pourrait trouver dans la bonne santé de l'économie turque des raisons d'espérer. Car même avec 5 % de croissance sur 2010, le pronostic turc est nettement supérieur aux prévisions européennes, autour de 1,5 %. Mieux, aujourd'hui, les ménages turcs consomment (la demande interne a crû de 9,9 % au premier trimestre), en partie grâce à des taux d'intérêt relativement bas. Très réactive à la crise, la banque centrale a fait refluer ses taux directeurs de 18 % en 2007 à 7 %. Le crédit à la consommation ne cesse de progresser : il a fait un bond de 21,7 % en mai dernier. Mieux, « le taux de pénétration est loin d'être à 100 % dans les foyers turcs pour certains produits, tels que les télévisions et autres équipements ménagers », remarque ainsi l'économiste d'Istanbul. Si les ménages turcs achèteront sans doute d'abord des produits locaux, plus compétitifs au niveau des prix que des produits sophistiqués allemands, français ou italiens, certains économistes restent optimistes, dont Juan Carlos Rodado, de Natixis. Alors que sur le total des importations turques, les produits allemands ne représentent que 9,1 % (contre 13,6 % pour la Russie, principalement en raison des livraisons de pétrole russe et 8,4 % pour la Chine), les produits italiens 5,4 % et les français 4,6 %, les possibilités de percée plus grande du marché turc pour les Européens sont évidentes. Lysiane J. Baudu
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