« Une coalition entre conservateurs et libéraux-démocrates serait un désastre »

Peter Mandelson, numéro deux du parti travailliste britanniqueLes amateurs de complots électoraux en seront pour leurs frais. Peter Mandelson a mis fin, dans une interview à « La Tribune », à l'idée de former une coalition avec les libéraux-démocrates si les travaillistes terminaient au troisième rang lors des élections qui se dérouleront jeudi. « Si nous sommes troisièmes en nombre de voix, la probabilité que nous formions une coalition avec les libéraux-démocrates est vraiment lointaine. »Son aveu signifie que les travaillistes doivent absolument remonter dans les sondages dans les trois derniers jours de la campagne s'ils veulent demeurer au pouvoir, même via une coalition. Ce dimanche, trois des cinq sondages publiés les mettaient en troisième position (autour de 28 %), derrière les libéraux-démocrates (29 %). Les conservateurs sont en tête (35 % de soutien), mais c'est insuffisant pour remporter une majorité absolue.Jusqu'à présent, une frange du parti travailliste espérait tirer profit du système électoral britannique (uninominal à un tour, qui favorise les bastions locaux), qui lui permettrait de terminer troisième en pourcentage de voix mais premier en nombre de sièges à la Chambre des communes. Certains imaginaient qu'un tel résultat forcerait Gordon Brown à démissionner, mais qu'un nouveau leader travailliste pourrait trouver un compromis avec les libéraux-démocrates. Là encore, Peter Mandelson coupe court aux rumeurs : « Comment ferions-nous ? Il n'y aurait pas de gouvernement dans ce pays pendant deux mois le temps que les travaillistes élisent un nouveau leader ? »Le principal stratège du Labour, souvent qualifié de « prince des ténèbres », compte donc sur un rebond de son parti dans la dernière ligne droite. Pour cela, sa stratégie est simple : faire peur à l'idée d'un gouvernement conservateur. « Il faut que l'on concentre les gens sur le vrai choix qu'ils ont. Nous devons leur dire qu'un changement serait dangereux. »À en croire Peter Mandelson, le parti conservateur n'a pas changé sous David Cameron. « Les candidats conservateurs sont des gens qui doutent du changement climatique, sont anti-européens, peu sympathiques envers les droits des homosexuels... » Leur arrivée au pouvoir mettrait en danger la reprise économique : « La crise a été bien gérée (par les travaillistes) et nous avons bien avancé sur le chemin de la reprise : il ne faut pas s'en détourner. »Peter Mandelson, toujours maître médiatique, en profite pour attaquer frontalement le groupe de Rupert Murdoch, qui possède le « Times » et le « Sun ». « Murdoch s'est complètement rangé derrière les conservateurs, avec de bonnes raisons : c'est dans son intérêt commercial. Les conservateurs veulent écraser le régulateur des médias, l'Ofcom, réduire les ressources de la BBC, et garder la télévision payante aux mains de Sky (appartenant au groupe Murdoch, Ndlr). » Quant aux libéraux-démocrates, la révélation de cette campagne électorale, Peter Mandelson les traite d'un revers de la main. « Bien qu'ils aient de bonnes valeurs - ils croient en la notion de justice sociale -, leurs politiques sont complètement irréalistes, ou dangereuses, ou trop chères. Leurs politiques sont une blague. » Il en conclut que « mettre les conservateurs et les libéraux-démocrates dans une coalition serait un désastre : ces deux partis sont en désaccord sur presque tout, et n'ont pas les mêmes valeurs ».Selon lui, la majorité des sympathisants lib-dems sont au centre-gauche, relativement proches des travaillistes. Gordon Brown a d'ailleurs parlé d'une possible « alliance progressiste   » entre les deux partis. « Les progressistes travaillistes et libéraux-démocrates forment une majorité (en Grande-Bretagne)  », estime Peter Mandeslon.Calcul cyniqueC'est pourquoi il fait un appel du pied à ceux tentés par les libéraux-démocrates, en affirmant que seuls les travaillistes pourront apporter le changement électoral nécessaire pour le rendre plus proportionnel : « Les libéraux-démocrates ne seront jamais assez forts pour diriger un gouvernement avec le système électoral actuel. Le seul parti de gouvernement qui peut réaliser la réforme électorale est le Labour. Les conservateurs mourront plutôt que de faire cette réforme, parce qu'ils pensent qu'il y a une majorité progressiste dans ce pays. »En d'autres termes, votez travailliste si vous voulez un jour voir un gouvernement libéral-démocrate en place. Le calcul est cynique. Mais alors que cette élection est la plus ouverte depuis trente-cinq ans, rendant les résultats complètement imprévisibles, tous les arguments sont bons à prendre. nInterview accordée à un groupe de quatre journaux européens.L'intégralité de l'interview sur www.latribune.f
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